Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du mercredi 22 avril 2020 à 17h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Muriel Pénicaud, ministre :

L'ASP s'est entièrement adaptée pour que les remboursements aient bien lieu dans les sept à dix jours. Les banques, qui bénéficient du dispositif de prêts garantis par l'État (PGE), peuvent accorder en toute sérénité des prêts aux entreprises. Nous verrons fin avril si elles ont pleinement joué le jeu et assuré leur rôle de relais. Rappelons tout de même que le délai du dispositif originel, pour 821 000 entreprises, était de deux mois !

Quelles règles faudra-t-il conserver en matière de chômage partiel ? Nous tirerons les leçons de ce qui aura été fait, mais il est certain que la douzaine de catégories que nous aurons intégrées devra continuer à bénéficier de ces dispositions. Le chômage partiel doit couvrir un champ large. Nous déterminerons les conditions particulières quand nous aurons plus de recul.

La taxation de 10 euros des CDDU avait été décidée en loi de finances pour 2020, dans un contexte marqué par une forte reprise de l'activité et une précarisation phénoménale : neuf emplois sur dix étaient de très courte durée, sept CDD sur dix étaient conclus pour moins d'un mois et un tiers d'entre eux pour moins d'une journée. J'ai suspendu cette taxation ; nous verrons par la suite ce qu'il faut conserver ou modifier.

J'ai repoussé l'application des nouvelles mesures concernant les « permittents » du 1er avril au 1er septembre. La priorité est de protéger l'emploi, les entreprises et les salariés, et de permettre la reprise de l'activité en garantissant un niveau extrêmement élevé de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Monsieur Barrot, le site du ministère du travail met à disposition trente-trois guides élaborés avec des professionnels et des experts, après avis des partenaires sociaux. Ils fournissent des informations pratiques tout en apportant de la sécurité juridique. Ils ont d'abord couvert des secteurs tels que la distribution alimentaire, l'agriculture, la logistique et les transports, avant d'être étendus à de nombreux autres métiers, comme la collecte des ordures ménagères. Outre la trentaine de guides qui vont être publiés dans les jours qui viennent – nous en avons déjà fait paraître un consacré au commerce de détail –, nous avons l'ambition de diffuser, d'ici au 11 mai, un guide générique, transversal, détaillant les conditions de reprise de l'activité et les gestes barrières.

L'agriculture embauche chaque année, au printemps, 200 000 saisonniers, dont 70 000 travailleurs détachés. Les frontières sont quasiment toutes fermées en Europe. La France ne saurait prendre un risque épidémique en rouvrant unilatéralement les siennes. Nous avons conclu des protocoles avec plusieurs pays pour permettre le recours aux travailleurs frontaliers, mais il n'est pas envisageable de le faire pour les travailleurs détachés. Par ailleurs, beaucoup de demandeurs d'emploi sont prêts à travailler dans le domaine agricole. Enfin, nous avons permis le cumul, pendant quelques semaines, des allocations de chômage partiel et de la rémunération du travail agricole, ce qui a attiré beaucoup de candidats. En complément, nous avons autorisé la venue de travailleurs saisonniers espagnols, qui viennent chaque année et sont formés, et nous avons rédigé des guides de sécurité en espagnol. La directive sur le travail détaché ne s'appliquant qu'au 1er juillet, nous leur imposons de signer un contrat de travail de droit français. Avec la FNSEA et Pôle emploi, nous avons créé une plateforme de recrutement de travailleurs saisonniers qui pourra être pérennisée.

Monsieur Vallaud, les assistantes maternelles et les employés à domicile sont désormais éligibles au chômage partiel. Nous avons créé un dispositif exceptionnel, avec le concours de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), sur le site du chèque emploi service universel (CESU). Une ordonnance adoptée ce matin en Conseil des ministres permet de couvrir toutes les heures chômées par les assistantes maternelles. Aujourd'hui, le chômage partiel repose sur une durée de travail présumée de 35 heures, alors que les assistantes maternelles exercent très souvent 40 à 45 heures.

Vous faites part de pressions concernant les RTT, les congés payés et le compte épargne temps. Nous avons précisé les règles par voie d'ordonnance. En droit du travail, un employeur peut fixer les dates de congés payés en respectant un préavis d'un mois. En l'occurrence, nous avons prévu qu'un salarié pouvait être contraint de prendre une semaine de congé en étant prévenu un ou deux jours à l'avance, sous réserve de l'accord du CSE. Un grand nombre d'entreprises l'ont fait, les salariés étant conscients de la situation de leur entreprise et de l'emploi. L'employeur peut aussi mobiliser les RTT et le compte épargne temps. Il peut tenir compte du ralentissement de l'activité en cas d'annualisation du temps de travail. À défaut, le compte d'heures négatif serait illégal et sujet à sanction. J'ai été alertée sur ce sujet par plusieurs organisations syndicales ; des contrôles sont en cours.

Le décret concernant la prescription d'arrêts maladie par les médecins du travail sera prochainement publié. Les visites de reprise pourront avoir lieu, notamment pour les plus fragiles. Nous avons estimé que nous aurions besoin de tous les médecins, y compris des médecins du travail, dans le cadre de la mobilisation générale concernant les tests, et avons donc pris une ordonnance à cette fin. Les tests ne sont pas encore généralisés ; le ministère de la santé déterminera quels types de tests seront réalisés, quand et dans quelles conditions. Le secret médical devra être protégé.

Madame Auconie, je n'ai pas été alertée sur les difficultés d'embauche, notamment de fonctionnaires ; je vous invite à me transmettre vos informations. Je salue les nombreuses PME qui se sont lancées dans la fabrication de masques homologués, à l'instar du groupe Résilience, qui regroupe vingt entreprises d'insertion et conduit cette activité au profit des services de secours aux plus vulnérables, avec le concours de Thibaut Guilluy, haut-commissaire à l'inclusion dans l'emploi et à l'engagement des entreprises.

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