Intervention de Jérôme Salomon

Réunion du jeudi 23 avril 2020 à 10h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Jérôme Salomon, directeur général de la santé :

Nous avons affaire à un nouveau virus, séquencé en janvier. Cela a suscité une énorme incertitude scientifique, et une production record de connaissances. Dans les années 1970, on avait pu croire que les maladies infectieuses allaient disparaître, mais on voit aujourd'hui, avec la persistance du sida et l'apparition de phénomènes d'antibio-résistance, qu'il n'en est rien – et l'environnement et le climat ne vont pas arranger les choses. Depuis le début de la crise, les experts échangent en permanence au niveau international. Les réanimateurs, les spécialistes des maladies infectieuses et des virus, les sociétés savantes – notamment l'Académie de médecine et l'Académie des sciences –, le Haut Conseil de la santé publique et le conseil scientifique mis en place à la demande du Président de la République, ont toujours été associés à nos travaux.

Pour ce qui est de la déclinaison territoriale de la gestion de la crise, la France se trouve dans une situation épidémiologique totalement hétérogène : certains départements, tels le Haut-Rhin qui a payé un lourd tribut en termes de mortalité, sont massivement touchés ; dans d'autres, le virus a très peu circulé. Les propositions que nous allons faire pour les prochaines semaines dépendront de l'évolution de cette situation, ainsi que de l'activité médicale de ville et hospitalière.

Le premier enjeu sur lequel nous devons nous mobiliser est celui du dépistage massif, avec des tests dont les résultats peuvent être connus dans la journée, afin de mettre en œuvre des mesures adaptées, à savoir l'isolement – à domicile ou en structure adaptée en fonction de la situation de chacun – ou l'hospitalisation de la personne testée positive. Les capacités ont explosé, puisque nous avons commencé à 5 000 tests par jour et que notre objectif actuel est de 700 000 tests par semaine sur l'ensemble du territoire. Aux équipes mobiles de test vont être associées des équipes de tracing ayant pour mission d'identifier et de tester les contacts avant de les placer éventuellement en isolement. Cela se fera en lien étroit avec les collectivités locales, les maires, les préfets, les présidents de conseil départemental, les agences régionales de santé, l'assurance maladie et Santé publique France.

J'insiste sur l'importance de la deuxième vague à laquelle il faut s'attendre, une vague « non Covid-19 », silencieuse, constituée par le fait qu'en période critique – on l'a déjà constaté lors des attentats –, les Français ont le réflexe de ne pas consulter pour les affections autres que le coronavirus afin de ne pas déranger les soignants. Je répète ce que je dis depuis des semaines, à savoir qu'il est essentiel de continuer à prendre soin de sa santé : nous encourageons les personnes atteintes de pathologies chroniques à appeler le médecin généraliste ou spécialiste qui les suit habituellement, et nous appelons également les médecins et les services hospitaliers à contacter spontanément leurs patients les plus fragiles, ceux qui ont besoin d'un suivi, d'un bilan ou de soins. Après une diminution du recours aux soins en ville comme à l'hôpital, on commence aujourd'hui à observer un retour des patients dans le circuit de soins, ce qui est très positif.

Les maladies aiguës doivent, elles aussi, être prises en charge en urgence, et je précise que le 15, qui n'est pas surchargé, est disponible pour répondre à toutes les urgences vitales.

La dernière composante de la deuxième vague silencieuse est celle de l'impact psychologique et psychiatrique sur la population de ce confinement d'une durée inédite.

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