Intervention de Jérôme Salomon

Réunion du mardi 16 juin 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Jérôme Salomon, directeur général de la santé :

Vous avez raison, il faut que je sois précis en ce qui concerne le type de masques. Pour tout ce que nous venons de préciser avec M. le rapporteur – la quantité de 754 millions en 2018 dans le stock stratégique, la découverte de la péremption et de la dégradation importante de ce stock dormant –, il s'agit de masques chirurgicaux. Il n'y avait plus de masques FFP2 depuis plusieurs années dans le stock, là encore pour des raisons concrètes : ils sont réservés aux soignants des services réalisant des actes invasifs et à risque. J'en ai commandé lors de l'alerte du mois de janvier. À cette époque, je vous le rappelle – il est difficile de se souvenir de tout ce qui s'est passé en six mois –, il n'y avait pas de cas dans notre pays, mais nous voulions être prêts, et nous organisions le rapatriement de Français de Wuhan. Leur accueil devait être parfait. Des équipes de réservistes se sont occupées d'eux et ont effectué les tests – tous nos compatriotes de retour de Chine ont été testés à deux reprises : à leur arrivée puis une semaine après. Nous avons mis en œuvre des moyens importants pour prendre en charge les premiers cas et les clusters. D'où les commandes effectuées le 30 janvier, puis au début du mois février – je retrouverai la date précise –, qui comprenaient donc des masques FFP2, mais aussi des équipements de protection individuelle dont nous parlions tout à l'heure : les surblouses, les surchaussures, les gants et les lunettes, mais aussi des masques pédiatriques, qui, vous le savez, ont servi récemment dans les écoles.

L'État a donc fourni une réponse à une crise totalement inédite. Les stocks dormants ne bougent pas : il y a peu d'entrées, peu de sorties, parfois des destructions et des commandes. Là, nous devions nous procurer rapidement des quantités de masques très importantes, d'autant plus que nous observions une consommation totalement inédite, en particulier de la part des professionnels de santé, du fait de l'épidémie. Nous avons mis en place un pilotage, avec le ministère, évidemment, mais aussi Santé publique France et la direction de crise. Nous avons également beaucoup échangé – il est important de le rappeler – avec les acteurs de terrain.

Il y avait plusieurs filières de distribution. La première concernait les établissements de santé, qui sont très nombreux, et il n'y avait, évidemment, aucune raison de faire des différences entre eux. Cependant, nous étions également attentifs au fait que la situation dans en France était hétérogène : de la même façon que dans d'autres pays européens, des différences ont été observées entre les départements français s'agissant de la circulation du virus, avec des gradients très importants qu'on ne s'explique pas. Nous avons voulu répondre en urgence, la nuit, aux départements les plus touchés : nous avons ainsi effectué en urgence des livraisons aux hôpitaux en première ligne, par exemple dans le Grand Est et les Hauts-de-France. Nous avons décidé que les groupements hospitaliers de territoire (GHT) seraient les points d'entrée initiaux, puisque ce sont eux qui sont les plus connectés avec leur territoire, et ils permettent également d'approvisionner les EHPAD.

La seconde filière visait à distribuer des masques, à partir des entrepôts de Santé publique France, aux professionnels de santé qui en avaient besoin rapidement. Le ministre avait demandé de déstocker des masques à leur intention. Pour cela, il a été décidé de passer par les grossistes répartiteurs puis par les officines, ce qui correspondait à la demande des pharmaciens et des professionnels de santé. De fait, il nous paraissait commode de confier aux officines le soin de répartir les masques entre les professionnels de santé de proximité : on en trouve sur tout le territoire, et chacun connaît sa pharmacie.

Comme je vous le disais en introduction, nous avons fait face à une crise inédite, massive et mondiale, avec l'arrêt de la production du plus gros fournisseur de masques, à savoir la Chine, qui nous a obligés à mettre en place une chaîne de sourcing dédiée – comme le disent les experts – allant des négociations aux importations, qui plus est dans des quantités considérables. Un gros-porteur ne contient que 15 millions de masques. Il a donc fallu instaurer un pont aérien, avec plusieurs avions par semaine, pour répondre à la demande et fournir 770 millions de masques – en plus de ceux que nous avions déjà et que nous avons déstockés, ce qui signifie qu'il y a eu aussi des opérations d'acheminement de la France vers la France. Il faut également rappeler la mobilisation des producteurs nationaux de masques FFP2 et de masques chirurgicaux, comme je l'avais souvent demandé. Plusieurs industriels français ont accepté de tripler leur capacité et de travailler jour et nuit à la fabrication de masques sanitaires, ce qui a permis d'augmenter la production de masques sur le territoire national. Nous avions donc trois sources : le stock stratégique d'État, la production nationale et l'importation massive de masques, en particulier depuis la Chine, pour alimenter deux circuits : d'une part, celui des professionnels de santé dans les établissements, d'autre part, celui des professionnels de santé en ville. Nous avons aussi répondu, ce qui n'était pas simple à faire, aux besoins des professionnels intervenant auprès de personnes fragiles, notamment à domicile.

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