Je ne jette la pierre à personne : il est toujours facile de réécrire l'histoire. Recontextualisons. Très tôt, nous avons mobilisé les ARS et les établissements de santé. Le 8 janvier, la réunion de sécurité sanitaire, qui rassemble l'ensemble des acteurs concernés, a abordé ce point. Nous étions donc très attentifs à l'évaluation des risques. Ceux qui étaient liés à une importation du virus vers l'Europe étaient alors jugés comme étant extrêmement faibles, notamment dans les avis du CDC européen. Or, comme j'aime à le dire, ce n'est pas le virus qui circule, c'est l'homme, et il nous faut veiller à ce qui se passe dans notre tout petit village planétaire.
Les EHPAD sont un sujet extrêmement sensible. Nous avons eu des discussions très étroites avec les acteurs de terrain. Le Président de la République s'est rendu dans un établissement au début du mois de mars. Les fédérations, les soignants, les psychologues s'interrogeaient : ils savent quel déchirement constitue pour les résidents la restriction des visites chaque hiver au moment des épidémies de bronchiolite ou de grippe. Ils nous demandaient de les laisser décider des modalités d'organisation. Les décisions d'interdire les visites puis de demander l'isolement en chambre, dans le cadre du plan bleu, ont été si délicates à prendre que nous avons saisi le Conseil consultatif national d'éthique (CCNE). Il est en effet compliqué de mettre en balance bénéfices et risques – protection de la santé des individus d'un côté, effets collatéraux de l'autre : absence de stimulation, désespoir, voire syndrome de glissement.