Intervention de Xavier Bertrand

Réunion du jeudi 2 juillet 2020 à 10h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Xavier Bertrand, ancien ministre de la santé et des solidarités (2005-2007) et ancien ministre du travail, de l'emploi et de la santé (2010-2012) :

Je ne répondrai pas à la question sur la sortie au théâtre, je ne souhaite pas faire de commentaires.

Mettre en place un confinement régionalisé impose d'empêcher les déplacements d'une région à l'autre, comme on l'a fait en Italie. Il aurait fallu durcir les procédures et les limitations dans les transports. Ce n'est pas simple à organiser.

Nous avons connu des différenciations régionales au moment du déconfinement : ma région était mal classée. Nous avons fini parmi les régions en vert, mais après un suspens ; nous avions écrit au Premier ministre, avec le président de la région Grand Est, à propos des critères retenus. Je n'ai pas bien compris pourquoi des rendez-vous étaient fixés toutes les trois semaines, alors qu'il fallait le maximum de souplesse. Les décisions pour libérer les villes et l'économie ont été annoncées au lendemain de longs week-ends. Il aurait mieux valu annoncer clairement à l'avance que le déconfinement aurait lieu le lendemain de la Pentecôte, parce que l'on voulait éviter de fortes concentrations pendant le week-end.

Un confinement régionalisé n'est possible qu'accompagné de mesures drastiques pour empêcher la circulation d'une région à l'autre. L'Italie l'a fait, parfois au sein du même quartier, et ça n'a pas été facile à gérer. La Chine l'a fait également, toujours au prix d'importantes restrictions à la liberté de circulation. Mais il est vrai que nombre de nos concitoyens n'ont pas compris pourquoi tout le monde était logé à la même enseigne. Il est difficile de faire accepter des mesures différenciées : lorsque j'ai annoncé que les masques seraient distribués en priorité dans les départements où le virus circulait le plus, certains ont protesté.

S'agissant de l'usine Bacou-Dalloz de Plaintel, des protocoles ont été signés pour une durée de cinq ans. L'idée, c'était que l'entreprise diversifie ensuite sa production pour trouver d'autres clients que l'État français. En effet, une fois l'objectif-cible atteint, il n'y avait pas de raisons de renouveler le protocole. Les dates et les montants commandés sont parfaitement connus, mais l'usine de Plaintel était censée chercher des clients supplémentaires dans le secteur privé, par exemple dans l'industrie agroalimentaire, très présente en Bretagne, ou à l'export. Macopharma, à Tourcoing, a trouvé beaucoup de clients à l'étranger qui lui ont permis de perdurer. J'ai d'ailleurs saisi le ministre de la santé à la mi-février car Macopharma m'a fait savoir que toute sa production n'était pas réquisitionnée par le Gouvernement. Ce fut chose faite au début du mois de mars.

Le protocole avec l'entreprise Bacou-Dalloz date du 26 décembre 2005. J'en suis signataire, et il prévoit des commandes de 30 millions de masques en 2006, de 140 millions en 2007 et 30 millions en 2008, pour un total de 200 millions de masques. Tout est prévu depuis le départ, pour une durée de cinq ans, pas cinquante ans. Il faudrait savoir s'ils ont cherché d'autres clients : Macopharma, à Tourcoing, continue son activité en ayant trouvé d'autres débouchés.

J'ai passé les commandes suffisantes pour asseoir la capacité de production, mais une fois que le volume de masques FFP2 nécessaire est atteint, nous n'en commandons pas plus. Aujourd'hui, pour constituer la filière locale dans les Hauts-de-France, je fais de même : les commandes sont garanties, mais il faut faire le tour des acheteurs potentiels pour que les entreprises ne dépendent pas uniquement des commandes destinées au personnel du conseil régional. Une centrale d'achat a été créée pour que ces entreprises aient des perspectives, et elles savent qu'elles devront aussi produire des charlottes, des gants, des surblouses, voire des voilages, dont les moindres coûts de production permettent d'être compétitif. Il est donc inexact de prétendre que c'est par ma décision que le contrat a été rompu.

S'agissant des propos de Didier Houssin rapportés dans Le Monde, je rappelle que ce n'est pas lui qui a préparé l'instruction ministérielle de novembre 2011, puisqu'il a quitté ses fonctions en mai. C'est Jean-Yves Grall qui a pris sa suite, mais il n'y a aucune contradiction entre eux. Je comprends que vous puissiez penser que tout a changé en 2011, mais vous constaterez en lisant l'instruction qu'il n'y est pas question des masques. Une confusion est entretenue entre l'avis du HCSP, l'instruction ministérielle de 2011 et la doctrine du SGDSN de 2013, mais cette dernière n'est jamais citée. S'il y a un choix regrettable dans toute cette affaire, c'est d'avoir décidé que chacun devait payer ses masques, alors que c'est la responsabilité de l'État.

C'est en ma qualité de maire de Saint-Quentin que je siégeais au sein du conseil de surveillance de l'hôpital. J'ai conservé l'habitude de me placer en immersion complète. J'ai demandé à voir où étaient les différents équipements, mais les masques relèvent de stocks nationaux, ils ne sont pas placés dans les établissements de santé. Il en aurait été autrement si mon instruction ministérielle avait prévu que les masques fassent partie des stocks tactiques, dans les SAMU ou les SMUR.

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