Intervention de Maxime Sorin

Réunion du mardi 7 juillet 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Maxime Sorin, conseiller technique pour UNSA santé sociaux :

Je travaille dans le Val-d'Oise, un département qui a été extrêmement touché par le covid. À l'hôpital de Pontoise, hôpital pivot du GHT, nous avions initialement dix-huit lits de réanimation et nous sommes montés à quarante-quatre, ce qui est énorme. Nous avons eu le nombre de respirateurs suffisants pour ouvrir ces chambres de réanimation. Nous avons également eu des masques en nombre suffisant en réanimation. Mais la situation était hétérogène selon les différents services. Nos collègues administratifs, par exemple, ont dû faire des pieds et des mains pour obtenir des plexiglas.

Les modalités d'octroi de la prime covid ont suscité des difficultés sur le terrain, oppositions entre professionnels, incompréhensions… Les salariés sont, bien sûr, contents de recevoir 1 500 euros, surtout alors que les paramédicaux français sont au vingt-sixième rang sur vingt-huit en termes de salaire par rapport au PIB au sein de l'OCDE, mais ils veulent surtout être augmentés. Nous demandons 300 euros nets d'augmentation pour tous les salariés de l'hôpital.

S'agissant de la situation psychologique de nos collègues, je vous laisse imaginer ce qui passe quand, pendant deux mois on est applaudi, quand on ne fait plus la queue pour ses courses parce que les magasins ouvrent les portes avant pour les personnels de l'hôpital, et que, du jour au lendemain, on retourne dans la banalité. Pendant cette crise, tout le monde s'est mobilisé et a essayé de faire de son mieux, et ce matin encore des collègues sont partis pour la Guyane pour aller soutenir le personnel de ces départements. Comme une seconde vague est possible à la rentrée, cela fera six mois de combat acharné contre le virus. La situation psychologique est très grave. En même temps, dans beaucoup de structures, la médecine du travail est défaillante : les rendez-vous réguliers, le suivi spécifique pour les personnels de nuit et ceux qui travaillent en horaires dérogatoires font cruellement défaut à l'hôpital. Pour rappel, nous faisons partie des professionnels qui présentent le plus de troubles musculo-squelettiques, devant les travaux publics.

Quand on ouvre des lits pendant une crise, se pose une question pratique, à savoir : de quoi a-t-on besoin pour faire tourner ces lits ? Les directeurs ont été plutôt efficaces, pour la plupart, en organisant des filières de soin, des aménagements d'entrées et de sorties pour que personne ne se croise. En termes de médicaments, il n'y a pas vraiment eu défaut mais on ne s'était pas rendu compte qu'on allait manquer de curares parce qu'avec quatre fois plus de patients la consommation de médicaments serait aussi multipliée par quatre, le tableau chimique étant exactement le même pour chaque patient.

Les ARS, je rejoins Mme Cornière, sont complètement hors sol. Les informations vont de haut en bas et jamais de bas en haut, les ARS ne savent donc pas vraiment ce qui se passe dans les structures hospitalières. Elles se préoccupent de la rentabilité, de la gestion, de la T2A, mais l'hôpital n'est pas une entreprise ; on y traite de l'humain, et cela nécessite de mettre les moyens et d'arrêter de couper tous les budgets des hôpitaux.

De ce que j'ai vécu et des remontées que j'ai pu avoir, il n'y a pas eu de choix. Les critères réanimatoires sont préétablis : on étudie un patient à un instant t, et quand c'est possible on anticipe. Tout le monde s'est mobilisé pour essayer de voir les patients un à un et évaluer si la réanimation devait être lancée ou non car les implications sont nombreuses.

La reconnaissance de la maladie professionnelle est compliquée, sachant que nous avons eu du mal à obtenir des tests pour les soignants au début de la crise. Certains de mes collègues ont été reconnus en maladie professionnelle, car ils ont pu avoir accès à un test ou parce que les symptômes suffisaient à poser le diagnostic. Nous avons à présent des tests, y compris des tests sérologiques, qui ne permettent cependant pas de savoir si l'on est protégé du covid mais seulement si on l'a eu.

S'agissant des alertes, cela a manqué de timing. En janvier, février, on nous disait que l'on aurait un ou deux cas seulement sur le territoire, et on voit aujourd'hui le nombre de morts…

S'agissant des politiques de santé publique, et notamment de l'ONDAM, les salaires à l'hôpital sont extrêmement bas, conséquence de budgets hospitaliers de plus en plus réduits. La prime covid a coûté quelque 1,8 milliard d'euros sur le territoire, alors qu'il y a un an, quand le budget de la sécurité sociale est tombé, il manquait pratiquement 3 milliards. Nous devons faire toujours plus avec toujours moins.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.