Intervention de Astrid Petit

Réunion du mardi 7 juillet 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Astrid Petit, membre de la direction fédérale de la fédération CGT santé action sociale :

Du point de vue du matériel médical et de protection, et du suivi chronologique de la pénurie, au-delà du fait que les ARS n'avaient pas les informations ou ne les transmettaient pas, elles n'ont pas non plus réparti les matériels existants en fonction des secteurs qui en avaient le plus besoin. Nous l'avons prouvé au travers d'une enquête couvrant le mois d'avril, en différenciant bien les zones rouges et les zones vertes. Dans les Hauts-de-France, l'Île-de-France et le Grand Est, au début du mois, 65 % de nos syndicats disaient manquer de matériel de protection individuelle ; à la fin du mois, ils étaient 71 % ; au regard du matériel médical dans les CHU, ils étaient 14 % de plus à signaler des manques alors même que l'épidémie était en pleine progression. C'est pourquoi nous estimons que l'hôpital n'a pas pu faire face, malheureusement : il y a eu tous ces patients des EHPAD qui n'ont pas pu y accéder, tous ces transferts. Quelques régions seulement ont été touchées, mais on n'a pas pu faire face à la situation. On a transféré en Allemagne 183 patients. A-t-on manqué ou non de respirateurs ? En tout cas, on en a trouvé 200 en dehors de nos frontières.

Nous craignons que l'hôpital ne parvienne pas à faire davantage face en cas de nouvelle crise. Aujourd'hui, ce sont des centaines de milliers d'opérations chirurgicales qui ont été reportées, des consultations, le suivi de patients au long cours. Un système sanitaire doit répondre à l'ensemble des problèmes sanitaires d'une population. Les personnels étaient dans la rue précédemment pour dire que l'hôpital explosait. Nous en avons eu la démonstration en grandeur nature : non, il ne pourra pas faire face.

Si Mme Buzyn n'a pas pu mesurer la pénurie, la CGT a été capable de le faire à la fin du mois d'avril. Ce qui pose vraiment question, c'est qu'au début du mois de juin, 26 % de nos syndicats nous ont dit manquer encore de matériel de protection individuelle.

La prime covid, les autres organisations syndicales l'ont dit avant moi, est en effet la prime de la discorde. Elle est injuste, parce que c'est l'ensemble des personnels soignants et non soignants qui s'est mobilisé, qui a annulé des vacances ou accepté qu'on lui impose des congés, qui a vécu des horaires dérogatoires. Il y a eu tout autant de dérogations au code du travail ou aux accords sur le travail dans les zones vertes que dans les zones rouges. Dans les zones où il n'y avait pas de tension, le travail en douze heures et les mobilités entre les services ont été instaurés. C'est donc l'ensemble des personnels soignants et non soignants de l'hôpital qui mérite la prime de 1 500 euros. Avec 500 patients qui ont été transférés en TGV très coûteux vers d'autres régions de France, c'est l'ensemble du pays qui a été mobilisé.

Avec les 8 milliards d'euros annoncés pour le secteur de la santé, la CGT considère qu'on est bien loin de la revendication de base d'une augmentation salariale de 300 euros pour l'ensemble des personnels, notamment dans la fonction publique hospitalière, qui correspondrait aux années durant lesquelles le point d'indice a été injustement gelé. Nos salaires n'ont pas suivi la courbe de la hausse du coût de la vie, ce qui fait qu'en proportion nous sommes plus pauvres que dans les années 80. Ce qui est mis sur la table est insuffisant, et cette dissociation entre soignants et non soignants est insultante. D'ailleurs, nous avons prouvé que les contaminations ont touché tous les personnels, qu'ils travaillent dans les cuisines, dans les ateliers, qu'ils soient cadres de santé ou soignants au lit du patient.

L'autre élément qui nous semble extrêmement grave, c'est que cette augmentation salariale, qui prend la forme d'un complément indiciaire insuffisant, est assujettie à des contreparties. Je ne comprends pas pourquoi les héros en blouse blanche, encensés il y a quelques mois, doivent accepter que leurs primes fixes deviennent variables en fonction de l'évaluation professionnelle ; pourquoi la contractualisation de quotas d'heures supplémentaires doit être acceptée par les personnels en contrepartie de quelques points d'indice supplémentaires. Pourquoi le développement des glissements de tâches et des pratiques avancées doit-il être accepté en contrepartie d'une juste et légitime revalorisation salariale ? Ce qui est sur la table aujourd'hui, c'est une augmentation des rémunérations – et encore, puisqu'une partie va devenir variable – en contrepartie d'atteintes inacceptables.

Comme tout le monde, nous avons cru comprendre que l'ensemble des personnels atteints du covid-19 auraient automatiquement droit à la reconnaissance en maladie professionnelle, ce que justifient les taux de contamination. Or, dans un communiqué du 30 juin, le ministère fait le distinguo entre soignants et non-soignants, entre reconnaissance automatique et facilitée, et introduit pour la première fois la notion de formes sévères d'atteinte du covid-19. Nous sommes donc inquiets de ce qu'il n'y a pas d'automaticité de reconnaissance en maladie professionnelle et de l'apparition de nouveaux éléments dans ce communiqué.

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