Intervention de François Braun

Réunion du mercredi 15 juillet 2020 à 11h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

François Braun :

. Je suis mal placé pour répondre à votre question sur la recrudescence des cas de covid-19 : le Grand Est est la région qui a le R0 le plus faible actuellement, sans doute parce que les habitants ont été fortement touchés par cette épidémie et qu'ils demeurent particulièrement prudents.

Monsieur le rapporteur, vous avez parlé de rapport coût/bénéfice, une logique à laquelle nous sommes tout à fait étrangers. Le coût n'entre jamais en ligne de compte dans la régulation médicale ou dans l'urgence. La seule question que nous posons est de savoir si l'hospitalisation en réanimation bénéficiera ou non au patient. Être placé en réanimation est particulièrement douloureux et inconfortable. Les proches ne peuvent pas entrer dans le service et accompagner les patients dans leurs derniers instants. Pour les personnes âgées, le rapport bénéfice/risque est défavorable, c'est le contexte habituel.

Vous avez aussi évoqué une non-prise en charge. Mais ce n'est pas parce que les patients n'étaient pas hospitalisés qu'ils n'étaient pas pris en charge : au contraire, ils restaient dans leur EHPAD, dans un secteur dédié, accompagnés par le personnel qu'ils connaissaient.

Je ne dispose pas de statistiques nationales sur ces choix et je doute que nous n'en ayons jamais, car les SAMU ne bénéficient pas d'un système d'information national uniforme. Nous y travaillons depuis des années avec l'Agence du numérique en santé, mais cela traîne et les étapes suivantes ne sont pas encore débloquées par le ministère de la santé. Ce serait pourtant crucial pour apporter un éclairage uniforme et précis. Je pense à cet article du Point, qui a eu beaucoup d'écho, et qui faisait état de taux de réponse très inégaux selon les SAMU. Seulement, les modes de calcul ne sont pas les mêmes : certains SAMU estiment que l'appel est décroché lorsque la boîte vocale se déclenche, d'autres prennent pour repère le moment où une personne physique répond.

Nous avons montré, malheureusement a posteriori, que le nombre d'appels au 15 est un élément prédictif – dix à quinze jours en amont – de la saturation des services de réanimation.

Pour les professionnels qui ont participé aux transferts interrégionaux ou internationaux des patients – difficiles, compliqué –, il est inacceptable de lire dans le rapport de la FNSPF que ces opérations relevaient de l'esbroufe.

Il n'y a pas eu de perte de chances pour les patients hors covid. Les appels relevant de l'aide médicale urgente n'ont pas augmenté durant le premier pic d'appel et le tri initial a permis de les orienter très rapidement. Il est démontré qu'à Paris et dans la petite couronne, l'objectif du décrocher en moins de 60 secondes s'est amélioré par rapport à la même période l'an passé. De fait, les personnels étaient tous mobilisés, l'AP-HP a ajouté deux autocommutateurs au SAMU de Paris. Par ailleurs, l'analyse du registre national des arrêts cardiaques (REAC) montre qu'il n'y a pas eu davantage d'arrêts cardiaques lors du pic d'appels et que leur issue, globalement moins bonne pendant le confinement, a été la même lorsque les appels passaient par le 18 ou lorsqu'ils passaient par le 15.

En France, nous avons la chance d'avoir deux numéros d'urgence : lorsque les personnes n'arrivent pas à joindre le 15, elles composent très logiquement le 18. Or la courbe des appels au 18 n'a pas augmenté durant cette période. Cela prouve que les appels au 15 relevant de l'aide médicale urgente ont été très correctement orientés. Nous sommes prêts à débattre de cette question, mais sur des éléments objectifs, pas sur des accusations.

Cette chance, nous l'éprouvons chaque jour, plus encore lorsque surviennent des événements climatiques. Quand des tornades ont traversé la Moselle, le 18 était saturé ; les personnes qui avaient besoin d'une aide d'urgence ont alors composé le 15. L'essentiel est que les deux plateformes soient interconnectées.

Vous connaissez certainement la position de SAMU-Urgences de France sur cette question : il convient de réaliser une grande plateforme unique virtuelle, mais qui conserve ses spécificités. Une étude européenne publiée il y a dix-huit mois a montré que lorsqu'il y avait un numéro unique, le temps d'accès à l'expertise médicale était multiplié par trois. Trois pays seulement en Europe disposent d'un numéro unique pour toutes les urgences dont la Norvège, et le Danemark. Les Britanniques et les Américains sont en train de se mettre à la régulation médicale car ils ont désormais conscience de son rôle pour améliorer la qualité de prise en charge des patients.

Le professeur Carli vous en dira plus sur le rebond épidémique, mais après avoir vu sur la Seine, le soir du 13 juillet, des bateaux chargés de centaines de personnes non masquées, je dois dire que je suis particulièrement inquiet.

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