Intervention de Pierre-Albert Carli

Réunion du mercredi 15 juillet 2020 à 11h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Pierre-Albert Carli :

Pour l'Île-de-France, j'évoquerai deux points.

D'abord, on a observé durant la crise une mise en commun des ressources que je n'avais jamais vue précédemment. Aidée par l'Assistance publique, l'ARS a mis au point une cellule de régulation des places pour les patients de réanimation, remise à jour de manière instantanée à chaque admission afin que les médecins régulateurs des SAMU voient en temps réel où les patients peuvent être admis. Évidemment, ce dispositif a aussi joué un rôle très important en permettant de constater qu'on s'approchait du seuil de saturation et que le moment était donc venu de déclencher en région Île-de-France, comme cela avait été fait dans le Grand Est, des transports massifs de patients vers d'autres régions de France, moins touchées.

J'ai moi-même été médecin régulateur durant la crise, ce qui a été pour moi l'occasion de découvrir des cliniques privées qui avaient accompli un effort remarquable en réactivant des soins intensifs généralement post-opératoires, avec le concours d'anesthésistes-réanimateurs qui travaillaient habituellement avec des chirurgiens : on a appelé ce type d'organisation la « réanimation néo-covid ». Le répertoire organisationnel des ressources s'en est trouvé complètement chamboulé : rapidement, il a été possible de voir, grâce à des applications informatiques, lequel de ces nouveaux services était le plus proche, ce qui a permis une utilisation optimale des ressources.

Si on a pu dire que ces services de réanimation étaient un peu low cost, il faut savoir que certains patients présentaient un profil convenant parfaitement à une prise en charge par de tels services : il fallait donc effectuer un vrai travail d'orientation et, dans ce domaine, nous avons assisté à une coopération inédite, de nombreux collègues nous téléphonant pour nous dire qu'ils étaient en mesure de prendre des patients. Certes, la mise en place de ce dispositif a nécessité quelques ajustements, mais en tout cas nos collègues ont vraiment joué le jeu et nous ont fourni un appui précieux, notamment en prenant des patients de post-réanimation afin de libérer des places dans les grands services de réanimation des CHU et des centres hospitaliers généraux (CHG).

Le second point que je veux évoquer, c'est la collaboration avec la médecine de ville. Certains d'entre vous ont dressé un tableau apocalyptique de la situation durant la crise, mais je dois dire qu'il ne correspond vraiment pas à ce que j'ai vécu en Île-de-France. D'abord, les patients bénéficient dans notre région d'une permanence des soins H24 : il y a quelques années, l'ARS a en effet mis en place, sur un fonds spécial, un dispositif permettant que des médecins généralistes soient présents en permanence aux côtés des huit SAMU de la région Île-de-France dans la filière de réponse aux appels. Durant la crise, nous avons donc pu être en contact direct avec des médecins qui se trouvaient tantôt au téléphone, à répondre aux appels des patients, tantôt dans leurs cabinets. De même, à Paris et dans d'autres départements d'Île-de-France, nous avons rédigé, avec le Conseil de l'ordre des médecins, des arbres de décision pour l'orientation des patients, diffusés à tous les médecins ; un numéro d'appel spécifique a également été mis en place afin de permettre aux médecins généralistes d'orienter les patients depuis leur cabinet. Le dispositif d'orientation et de prise en charge des patients s'est ensuite considérablement étoffé, notamment grâce à Covidom, une solution mise en place par l'Assistance publique permettant le télésuivi à domicile des patients par leur médecin traitant – ou par d'autres, en fonction des disponibilités.

Ce que nous retenons de l'expérience de la crise, ce n'est pas une faillite de la médecine générale et de la médecine hospitalière, mais au contraire une extraordinaire coopération et une mise en commun des ressources : tous les professionnels de santé n'avaient qu'un seul but, à savoir une prise en charge des patients plus efficace et plus rapide. Cette vision des choses n'est peut-être pas celle de tout le monde, notamment des syndicats, mais elle correspond à ce que nous avons vécu au téléphone et sur le terrain, avec nos équipes de réanimation.

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