En tant que chef de service du SAMU du Gard et président de la commission médicale d'établissement (CME) du CHU de Nîmes, j'étais directeur médical de crise du département du Gard pour les établissements de santé.
Dans notre département, l'entraide avec les établissements privés a été immédiate. Une cellule de crise commune se réunissait chaque jour en visioconférence et, dans le cadre de la coopération mise en place, les établissements privés nous ont prêté deux respirateurs ; nous avions anticipé nos besoins en commandant des respirateurs à Air Liquide mais, compte tenu de la situation, une grande partie de notre commande a été orientée vers le Grand Est.
Nous avions initialement décidé ensemble que les malades à haute densité virale nécessitant d'être placés en réanimation, seraient pris en charge par les CHU, tandis que les malades à basse densité virale, c'est-à-dire ceux n'ayant pas le covid-19, seraient pris en charge par les hôpitaux et les cliniques privées. Afin de faire de la place, nous avons donc effectué des transferts vers les services de réanimation du secteur privé. Par ailleurs, avec l'aide de l'ARS, qui a donné des autorisations temporaires, nous avons upgradé des lits de soins intensifs en lits de réanimation dans les cliniques, et nous avons fait la même chose à l'hôpital à partir de lits de surveillance continue – mais nous n'avons heureusement pas eu à les utiliser.
Cependant, quand les choses se sont accélérées et que l'on a eu besoin d'encore plus de lits de réanimation, les établissements privés ont eux aussi mis en place des secteurs dédiés aux patients à haute densité virale et, lorsqu'il a fallu accueillir des malades provenant du Grand Est, ils ont été répartis à parts égales entre le public et le privé.
Pour ce qui est de la médecine de ville, je suis vraiment étonné par ce que vous dites, qui ne correspond pas à ce qui s'est passé dans le Gard. En effet, le département universitaire de médecine générale a pris les choses en main en créant treize maisons médicales covid, parfaitement réparties sur l'ensemble du territoire. Nous avons mis en place, avec notre service de maladies infectieuses, un dispositif de suivi des malades par SMS, et il n'y a eu aucun problème avec les médecins généralistes. Nous avons été plus qu'aidés par les médecins de ville durant la crise, et nous sommes toujours en relation avec eux, notamment pour le suivi de la situation, car nous sommes encore très inquiets. Actuellement, nos indicateurs d'appels de type covid au 15 sont extrêmement stables, mais il ne faut pas oublier que ces indicateurs ont toujours quelques jours de retard. J'en ai discuté vendredi avec le patron du département universitaire de médecine générale, qui m'a confirmé que, si l'on peut avoir l'impression d'avoir encore beaucoup de cas, tous ceux que l'on fait tester sont négatifs au covid : il s'agit en fait d'autres viroses.
Je tiens à souligner notre excellente entente avec les médecins libéraux qui sont sur le terrain, c'est-à-dire ceux qui appartiennent au département universitaire de médecine générale et les médecins généralistes faisant partie du dispositif d'aide mis en place par le conseil départemental de l'ordre des médecins (CDOM). Si je peux, moi aussi, écrire une petite lettre au père Noël, je crois qu'il faut confier davantage de pouvoir aux CDOM pour redonner un peu de sens à la permanence de soins ambulatoires, notamment nocturne. Il me semble que les choses seraient plus simples et fonctionneraient beaucoup mieux entre les médecins si le conseil départemental de l'Ordre, qui est quand même une structure importante, se voyait confier un vrai rôle.