Intervention de Patrick Bouet

Réunion du jeudi 16 juillet 2020 à 11h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Patrick Bouet, président du Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) :

Auparavant, les gens entraient en maison de retraite et passaient ensuite dans un système de moyen ou de long séjour à l'hôpital, voire en établissement spécialisé. Désormais, ces établissements accueillent des personnes avec des besoins de santé différents, tout en gardant leur spécificité : ce sont des lieux de vie, dans lesquels il n'y a pas de système de soins permanent. C'est toute la complexité de l'EHPAD, qui a fait sortir le médecin traitant mais essaye de le faire revenir en contractualisant, avec une équipe infirmière que l'on n'arrive pas à employer, et avec une population vieillissante dont les problèmes de santé s'aggravent. Dans le même temps, les EHPAD se sont éloignés des établissements hospitaliers, alors que les maisons de retraite étaient souvent proches des hôpitaux.

La configuration future de l'EHPAD reposera-t-elle sur plusieurs secteurs d'activité ? Certains pourraient n'être qu'un lieu d'hébergement, tandis que d'autres pourraient devenir un lieu de production de soins, dans le cadre d'un parcours de soins coordonnés. Dès lors, faut-il concevoir un EHPAD à formes diverses ? Ce n'est qu'une ébauche de réflexion parce que les EHPAD sont polymorphes : ils peuvent dépendre de municipalités, d'établissements privés… Il est peut-être temps d'encadrer ce dispositif. Au moment où Xavier Bertrand a pris le décret imposant au médecin traitant de contractualiser avec le directeur de l'EHPAD, on n'a pas mesuré que, vingt ans plus tard, seuls 10 % des personnes hébergées auraient encore un médecin traitant extérieur, ni que leurs besoins de suivi médical iraient crescendo.

L'EHPAD a été au cœur des questions soulevées par cette crise épidémique, et qui se poseront encore parce qu'il faudra probablement gérer en même temps le covid-19 et la grippe. Il ne peut pas rester dans cette forme chimérique, dépourvu de moyens de prise en charge en matière de santé. Si le numérique, et notamment la télémédecine, aide énormément, il ne peut pas tout compenser. Depuis la création des EHPAD, les médecins coordonnateurs sont quasiment devenus des chefs de service d'unités de soins, alors que celles-ci n'existent pas en EHPAD ! Nous aimerions qu'avec les médecins traitants, les acteurs de territoire et les hôpitaux locaux de proximité dans un bassin de vie, ils organisent l'intervention dans le cadre du parcours de soins. C'est un autre débat, mais il sera prégnant dans les mois et années qui viennent.

Concernant la vaccination contre la grippe, nous avions pris position il y a quatre ans en faveur d'une obligation pour tous les professionnels de santé – cela avait soulevé un certain émoi mais il n'est pas impossible que les ordres s'expriment à nouveau de la même façon dans les jours qui viennent – et pour toute personne entrant dans un EHPAD, afin de protéger la collectivité.

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