Intervention de Agnès Ricard-Hibon

Réunion du mardi 28 juillet 2020 à 11h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Agnès Ricard-Hibon, présidente de la Société française de médecine d'urgence :

Je vous ai fait part de la réalité vécue dans le département du Val-d'Oise au début de la crise jusqu'au 16 mars, date à laquelle la doctrine a changé. Jusque-là, nous avons dû en effet, dès la fin du mois de février, gérer le cluster de l'Oise avec des ambulanciers ou des services mobiles d'urgence et de réanimation (SMUR). Il faut se rappeler qu'au départ, la crise n'était pas considérée comme grave et les pompiers souhaitaient rester sur leur cœur de métier, à savoir le problème vital. Il y avait un mouvement social portant sur le risque de sursollicitation et l'exercice de missions étrangères aux leurs.

C'est ainsi que les choses se sont passées dans mon département comme en attestent des documents en ma possession – je sais que j'ai prêté serment –, ce qui nous a effectivement contraints à trouver d'autres solutions. Je considère que cette évolution a constitué en définitive un facteur de succès dans la mesure où elle nous a permis de travailler sur le terrain avec d'autres acteurs qui peuvent couvrir le champ médico-social qui ne devrait pas, en effet, être dévolu aux pompiers afin que leurs capacités opérationnelles ne soient pas obérées.

Les ambulanciers privés auxquels on confie les missions de transport sanitaire urgent, ne disposent pas toujours d'une couverture leur permettant de répondre dans des délais raisonnables à des situations médico-sociales ou à celles pour lesquelles il existe un doute sur le caractère vital. Or les acteurs associatifs ont couvert un large champ, en permettant notamment d'évaluer la pertinence d'un maintien à domicile, ce qui ne fait partie ni des missions des ambulanciers ni de celles des pompiers. Si nous avons après le 16 mars très bien fonctionné avec ces derniers, nous avons poursuivi notre collaboration avec la multitude d'acteurs que nous avions contactés auparavant. Ces acteurs associatifs se sont mobilisés et ont été extrêmement précieux pour répondre de façon adaptée aux besoins de la population.

S'agissant du tri ou de la régulation en réanimation, nos procédures n'ont pas changé pendant la crise : elles nous amènent à vérifier l'existence d'un projet de vie compatible, et donc la capacité des résidents en EHPAD à supporter l'intensité des soins. Pose-t-on d'ailleurs réellement la question aux personnes âgées concernées avant de leur imposer un tel marathon, alors que l'on sait pertinemment qu'elles vont s'écrouler dans les premiers kilomètres ?

Si la solution de facilité consiste, hors contexte de crise, à transporter tout le monde aux urgences, est-elle vraiment dans l'intérêt des patients alors qu'ils bénéficieront finalement du même traitement que les soignants qu'ils connaissent pourraient leur dispenser, dans le confort de leurs EHPAD, sans avoir à attendre des heures dans un couloir des urgences sur un brancard ? En période de canicule, est-il nécessaire d'hospitaliser des personnes simplement pour les hydrater ? Pendant la crise, compte tenu du nombre de patients à prendre en charge les résidents des EHPAD auraient inéluctablement fini sur des brancards. Il était donc préférable de mettre en place des systèmes avec les filières gériatriques, avec les médecins traitants et, le cas échéant, les médecins coordonnateurs au sein des EHPAD.

S'agissant des résidents en détresse vitale, nous avons préféré les accompagner au sein de leurs EHPAD ; nous avons pallié le manque d'oxygène, l'anxiété ou la douleur dans des conditions de confort optimisées, plutôt que de les hospitaliser. Le traitement était le même.

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