À quel prix notre système de santé a-t-il tenu ? La question est effectivement fondamentale s'agissant tant de la déprogrammation que de la reprogrammation. Les deux mécanismes ont pâti, parce que nous avons été pris de court, du manque de concertation avec les sociétés de chirurgie et d'endoscopie. Avant traitement, le cancer avéré doit être détecté. N'aurait-on pas dû maintenir en particulier les endoscopies digestives ?
En sortie de crise aiguë, il s'est en outre avéré difficile, du fait de conflits entre les spécialités concernées, de reprogrammer les interventions chirurgicales. Certaines de ces sociétés ont cependant joué le jeu en distinguant bien ce qui était urgent, ce qui pouvait être différé et ce qui pouvait possiblement se faire plus tard.
Il faudra en tout cas répondre à cette question du prix à payer, que le Dr Patrick Pelloux a également soulevée.
La Société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR), qui a une position différente de celle de la Société de réanimation de langue française (SRLF) a, en plein pic épidémique, travaillé avec le Service de santé des armées (SSA) afin de prioriser les traitements de réanimation pour les patients se trouvant dans un état critique. Nous souhaitions ainsi anticiper un dépassement de tous les systèmes. Nous ne voulions pas nous en remettre au hasard ni appliquer une logique de premier arrivé, premier servi.
La SFAR a donc produit un écrit, que je transmettrai à la mission d'information, à ce sujet : s'il ne constitue pas un critère unique, l'âge, compte tenu du fait que les patients âgés ont les comorbidités les plus importantes, a nécessairement un lien avec le pronostic ainsi qu'avec le traitement ou non en réanimation. Les ressources rares doivent être allouées sans discrimination liée à l'âge, à l'origine géographique, à la position sociale ou à la situation économique. Le premier est bien entendu, comme l'existence d'un handicap, intégré à une réflexion sur le pronostic.
Le 28 avril, Dominique Vidal s'est étonné dans Mediapart de ces préconisations relatives à la priorisation des traitements – auxquelles nous n'avons pas eu heureusement à recourir. Or une telle priorisation fait depuis très longtemps partie de notre nature : les femmes et les enfants d'abord ! Personne ne le conteste.
L'entrée d'un patient dans un service de réanimation doit obéir, non pas au hasard, mais à des règles à peu près communes.