Intervention de Philippe Besset

Réunion du mercredi 29 juillet 2020 à 11h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France :

Nous n'avons jamais été associés à la répartition des masques entre les officines. La dotation en masques FFP2 était très faible. Au moment du pic en matière de dotation, sur 40 millions de masques par semaine, seul un million était des FFP2. Nous n'avons pas de clé de répartition. Le stock aurait forcément été mieux géré si nous avions été associés à sa répartition.

Il y a deux sortes d'aides à domicile : celles qui ont des employeurs publics et celles qui dépendent d'employeurs privés, qui y font appel par le biais de chèques emploi-service. La doctrine a été fluctuante, si bien que pendant une semaine ou deux, nous avons dû fournir toutes les aides à domicile. Nous avons été en contact avec les mairies, mais nous manquions de masques. La collectivité municipale étant capable de s'en occuper d'elle-même, elle n'avait pas vraiment besoin de l'officine, si bien que rapidement nous ne nous sommes plus occupés que des employeurs privés, les communes ayant mis en place leur propre circuit d'approvisionnement.

Dans les pharmacies, il n'y a pas d'acte coté. Nous avons d'ailleurs interpellé le Gouvernement à ce sujet. Il n'y a pas de tarif de remboursement, ni de prix fixe, ce qui pose problème.

Quant à savoir si nous avons été associés à une réflexion sur l'avenir du stock stratégique et du stock tactique, figurez-vous que nous l'avons été… hier ! J'ai été en contact avec la directrice générale de l'organisation des soins, à laquelle j'ai fait part de notre indignation eu égard au fait que nous n'ayons jamais été en contact avec Santé publique France et qu'il serait peut-être temps de nous associer à cette réflexion.

À partir de moment où le décret est publié et où les commandes sont passées, il faut compter trois semaines avant de recevoir les stocks. De la même manière, quand on interrompt la distribution, il reste des stocks dans les tuyaux. Entre le stockage chez le dépositaire pharmaceutique CSP, celui chez les grossistes et ce qui reste dans les officines, on dispose du stock d'amorce pour fournir les professionnels libéraux de ville, autrement dit du stock tactique. Il faut environ trois semaines ou un mois de stock tactique prépositionné chez les professionnels et dans les entreprises, et la même quantité de stock stratégique, ce qui permet de tenir deux mois et d'organiser pendant ce temps la filière et le réapprovisionnement.

S'agissant de la pénurie de médicaments, nous avons tenu de multiples comités. Le 3 ou 4 mars, nous avons d'ailleurs eu une réunion avec le ministère de la santé sur les ruptures de médicaments. Il n'y a pas eu de rupture spécifique au covid‑19 pendant la crise épidémique ; nous avons craint une rupture sur le paracétamol, qui ne s'est pas produite. Il y a eu une rupture de stock concernant les médicaments à base de sartans, qui remonte à un problème industriel survenu en Chine. C'est un sujet complexe, qui appelle une réflexion stratégique sur le repositionnement en Europe ou en France d'une industrie du médicament.

Une précision : nous ne vendons pas de tests, nous les réalisons. Leur quantité est difficile à estimer. Si l'on part du principe que la moitié du réseau en pratique, soit 10 000, à raison d'une dizaine de tests par semaine dans chaque officine, on arrive, très approximativement, à environ 100 000 tests hebdomadaires. Il serait intéressant de faire remonter les données. Si les tests étaient remboursés, nous aurions des chiffres plus précis et pourrions mener une étude publique sur le sujet.

Nous n'avons pas été associés au conseil scientifique, pas plus qu'au conseil de défense. Nos interlocuteurs sont le cabinet du ministre, la DGOS, le DGS et son adjoint. Notre référent quotidien est le directeur de l'assurance maladie – nous sommes d'ailleurs orphelins en ce moment. C'est lui qui organise le système conventionnel et qui est en rapport avec les professionnels de santé de ville. Charge à lui de nous ouvrir les portes du système de santé général. Peut-être faudrait-il que nous participions à ce genre d'instances, mais nous ne pouvons pas être partout non plus…

Les pharmaciens ont des contacts avec les ARS, par le biais des unions régionales des professionnels de santé (URPS). Nos interlocuteurs sont, quant à nous, des interlocuteurs nationaux. Les présidents des URPS ont beaucoup travaillé avec les directeurs des ARS et ont beaucoup œuvré sur le terrain. Les ARS sont à la fois une aide et un problème. Par exemple, s'agissant de la traçabilité, nous n'avons pas été capables, à l'échelle nationale, ni nous, ni l'assurance maladie, de trouver la bonne personne pour organiser et développer un système de traçabilité des masques, alors que l'assurance maladie avait bâti un système d'information sur AMELI. La nature ayant horreur du vide, les ARS et les URPS ont créé des dispositifs régionaux de traçabilité très pertinents – Distrimasques dans le Grand Est, Gomask en PACA, MonPharmacien-idf à Paris –, dont on ne pouvait cependant rien faire, dans la mesure où ils n'étaient pas interopérables et qu'ils ne faisaient pas remonter d'informations. Les ARS sont pertinentes pour apporter des réponses locales, mais sont un problème dès lors que l'on a besoin d'une coordination nationale.

Je ne sais pas si l'on a pu imaginer que l'armée ou les pompiers participent à la distribution des masques. N'oublions pas que, pour la population, il n'y a que deux lieux de santé où l'on peut venir sans rendez-vous : les urgences et la pharmacie d'officine.

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