Vous êtes convaincus que beaucoup de vies ont été sauvées lors de cette crise. Les personnes âgées ont payé un très lourd tribut, puisque 93 % des personnes décédées ont plus de 65 ans. La situation des résidents des EHPAD a beaucoup mobilisé notre mission. À ce jour, nous recensons 15 000 morts dans ces établissements. La prise en charge des personnes âgées venant des EHPAD dans les services de réanimation soulève beaucoup de questions.
Vous avez rappelé que les capacités d'admission des services de réanimation étaient le critère essentiel. Sans préjuger des conclusions de nos travaux, nous avons constaté que cette capacité n'a pas été dépassée, mais à un prix très fort. De nombreux actes médicaux hors-covid ont été déprogrammés : la fédération UNICANCER a estimé le nombre de décès supplémentaires liés au report des actes de dépistage entre 5 000 et 10 000, le professeur Khayat a mentionné 30 000 morts, une étude britannique 40 000. Il est impossible d'évaluer précisément ce nombre aujourd'hui, mais ce problème est essentiel pour évaluer les conséquences de cette crise. Les services de réanimation ont tenu, mais tout le secteur médical hors-covid en a subi les conséquences.
Avez-vous eu conscience, lors de la gestion de cette crise, du problème de l'hospitalisation des personnes âgées ? La direction générale de la santé et la direction générale de la cohésion sociale nous ont indiqué que le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans admises en réanimation avait fortement chuté. En moyenne, de 2018 à 2020, elles occupent plus de 75 % des lits de réanimation. En deux à trois semaines, entre la fin du mois de mars et le début d'avril, cette moyenne a chuté brutalement pour passer de 25 % à 13 %, et même 6 % en Île-de-France.Des syndicats et des médecins coordinateurs ont fait état devant cette commission de difficultés d'accès à la réanimation pour les personnes âgées en EHPAD, notamment du fait de la régulation. Les personnes âgées sont restées en EHPAD en recevant des traitements contestables : une quarantaine de personnes sont mortes dans un même établissement de mon département, et le maire de la ville m'a indiqué que le traitement consistait en deux jours de doliprane, puis deux jours de soins palliatifs, sans accès à l'hôpital. Le traitement réservé à nos personnes âgées est une question fondamentale.
À votre connaissance, des éléments ont-ils conduit à faire des choix dans les critères d'hospitalisation ? Ont-ils été définis, ou tout cela s'est-il fait au gré de la montée du nombre de cas, qui nous a dépassés ?