Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 9h30
Dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, chers collègues, voilà une bonne initiative, une de celles que l'on est heureux de voter, de soutenir et de défendre haut et fort !

Une de celles dont on se réjouit qu'elle soit portée par des députés de différentes tendances ; une de celles qui va dans le bon sens, qui colle à la réalité et qui répond aux besoins des Français.

En effet, comme cela a été rappelé à juste raison, notre population vieillit : si 15 millions de Français ont aujourd'hui plus de soixante ans, ils seront 20 millions en 2030 et 24 millions en 2060. Il est donc urgent d'apporter des réponses concrètes pour préparer leur futur, notre futur.

Les aidants actifs accompagnent généreusement des personnes qui sont, pour beaucoup, en situation de grande dépendance. Ces personnes courageuses représentent en moyenne, dans les entreprises, un salarié sur six. Ce phénomène devrait s'amplifier : selon les projections démographiques, ils représenteront dans dix ans un salarié sur quatre.

Du point de vue de l'entreprise, cela n'est pas sans conséquence. Les responsables des ressources humaines le constatent quotidiennement : absentéisme, baisse de performance et santé fragilisée sont malheureusement les conséquences d'une organisation du travail encore inadaptée aux aidants actifs.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : à titre d'exemple, un aidant actif s'absente en moyenne seize jours de plus qu'un autre salarié et, selon une étude réalisée par l'association France Alzheimer, 79 % des salariés aidants se plaignent d'une grande difficulté à conjuguer leur vie professionnelle et leur engagement quotidien auprès de leurs familles.

Et ce n'est pas tout : plus de 90 % de ces salariés expliquent qu'ils sont sujets à un fort taux de stress, à de l'anxiété, de la fatigue ainsi qu'à des troubles psychologiques.

Par le passé, notre assemblée s'est longtemps montrée sourde à l'écoute de ces aidants actifs. Avant 2015, le congé de soutien familial leur permettait d'arrêter de travailler – sans solde – pendant une période de trois mois, renouvelable pendant un an.

La loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, qui a ensuite été assouplie par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi travail, a marqué une nouvelle avancée.

En 2017, un nouveau pas a été fait avec l'entrée en vigueur du congé de proche aidant. Autant de mesures qui devaient permettre à tous ceux qui le souhaitent de pouvoir venir en aide à leur père, leur mère, leur fils, leur fille, leur femme ou leur mari.

Et pourtant, seuls 2 % des salariés aidants se sentent accompagnés par leur entreprise. Parfois même, ils se sentent victimes d'une certaine forme de discrimination.

Aujourd'hui, il est possible d'aller plus loin, et c'est une bonne chose, car je crois, comme le disait le professeur Jérôme Lejeune, que « la dignité d'une civilisation se mesure au respect qu'elle porte aux plus faibles de ses membres ».

Pour venir en aide aux personnes les plus faibles, il convient naturellement de commencer par ceux qui les soutiennent au quotidien et qui sont des exemples pour chacun d'entre nous.

II y a quelques jours, nous légiférions, dans le cadre du projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi no 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre les mesures pour le renforcement du dialogue social, sur le télétravail. Je regrette à ce sujet que la majorité ait été sourde aux améliorations proposées par un certain nombre d'entre nous.

Avec mon collègue Michel Castellani, nous avons tenté, à cette occasion, de faire entendre combien il était important que les personnes ayant recours au télétravail bénéficient des mêmes conditions de travail que les autres salariés.

Nos propositions ont malheureusement été balayées par le Gouvernement, alors même qu'elles auraient été sacrément utiles aux aidants actifs que nous défendons aujourd'hui.

Un bémol néanmoins. En étendant le dispositif de dons de jours de congé aux aidants ayant à leur charge une personne âgée, cette proposition de loi va, je le répète, dans le bon sens.

Reste que nous ne pourrons pas faire l'impasse sur une véritable réflexion sur le vieillissement de la population. Tous les gouvernements qui se sont succédé ont promis de le faire, mais ils se sont chaque fois heurtés à la réalité économique et n'ont pris que des mesures au coup par coup.

Il faudra bien un jour regarder cette réalité en face, même si, je vous le concède, c'est plus facile à dire qu'à faire. Reste l'essentiel : cette proposition de loi, dont je vous remercie, monsieur le rapporteur, constitue un vrai progrès.

Bien évidemment, je la voterai.

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