Intervention de Huguette Mauss

Réunion du mardi 27 août 2019 à 11h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Huguette Mauss, présidente du Conseil national de l'accès aux origines personnelles (CNAOP) :

Effectivement, ce sont des questions très précises, notamment le parallèle avec le don de gamètes. Ce n'est pas tout à fait la même situation, puisque, dans le cas de don de gamètes, il y a un certain nombre d'informations médicales qui sont stockées, notamment dans les centres d'études et de conservation des œufs et du sperme (CECOS). Il y a donc une traçabilité qui peut être obtenue si l'on veut.

Je réponds aux deux questions en même temps. Dans le cadre des informations lors de l'accouchement, il y a effectivement le pli fermé qui peut contenir l'identité de la mère, mais nous sommes aussi très attachés aux informations recueillies lors de l'accouchement, à la fois par le personnel de l'établissement hospitalier et par le correspondant, qui est souvent une correspondante du CNAOP qui rencontre la femme. Il y a un certain nombre d'informations non identifiantes qui sont consignées dans le dossier de l'enfant. Nous y attachons une importance toute particulière.

Rétrospectivement en 2019, je peux vous dire qu'un certain nombre de dossiers qui ont été constitués avant 2002, sans même donner l'identité de la mère, nous permettent d'avoir beaucoup d'informations, notamment sur l'enfant, sur ce qu'a pu dire la mère au moment de la naissance. Cela peut constituer des bribes d'informations que l'on va restituer à l'enfant. C'est important pour nous d'avoir des éléments non identifiants.

Vous posez la question de discrimination en ce qui concerne l'information. On peut se poser la question : doit-on imposer à la mère au moment de la naissance de donner son nom ? La loi de 2002 pose le principe de l'accouchement dans le secret. On incite la mère à donner d'autres informations.

Ce que je n'ai pas dit, j'aurais dû le préciser tout à l'heure, c'est qu'un certain nombre de femmes peuvent lever le secret de leur identité à tout moment, et on le dit. C'est-à-dire qu'au moment de la naissance, au moment de l'accouchement, elles sont très souvent dans une situation de détresse. Elles ne veulent pas en entendre parler, mais il faut aussi leur expliquer qu'à tout moment, elles peuvent donner des informations. Et là, le CNAOP est là pour recevoir ces informations. Nous tenons particulièrement à être disponibles, à créer les conditions de la préservation de ces informations. Mais on ne peut pas aller frapper à la porte de l'enfant qui vient d'être adopté en disant que la mère biologique souhaite apporter des informations. Ce n'est pas dans notre pouvoir. On trahirait finalement la volonté de la mère de l'enfant en allant directement chez l'enfant dans une famille qui est constituée et où il faut accompagner.

Il y a un domaine dont je n'ai pas parlé, c'est le travail d'accompagnement qui est fait par le CNAOP, à la fois par l'équipe à Paris, mais aussi par les correspondants départementaux. Accompagnement au moment de la naissance de la mère biologique, accompagnement au moment où elle veut retrouver son enfant, parce que le circuit actuel ne permet pas à la mère d'aller retrouver son enfant. C'est simplement le CNAOP qui garde les informations.

Peut-on imposer à la mère de venir donner une information sur l'évolution de sa situation sanitaire, lorsqu'elle le découvre au fil du temps ? Le problème, vous venez de l'évoquer, c'est une maladie qu'elle découvre 15 ans après avoir abandonné son enfant. Quelle est l'obligation morale ou législative ? Que peut-on imposer à cette femme ?

Tout à l'heure, je vous ai dit, à propos des femmes que nous contactions, qu'une sur deux refusait de lever le secret actuellement. Même en matière génétique, la personne n'y est pas tenue. Si elle ne veut pas le faire, elle passe par un médecin – si j'ai compris le dispositif en matière de maladies génétiques. On ne peut pas imposer à la mère de naissance de donner ces informations. En revanche, on peut lui demander de passer par écrit, par un médecin, pour que les informations soient données. Actuellement, ce n'est pas le cas. C'est vrai que dans le cadre des maladies génétiques, notre souci est de faire en sorte qu'une information soit donnée.

Actuellement, nous pouvons donc considérer qu'il y a une discrimination, mais je ne suis pas sûre que nous puissions la lever. Je n'arrive pas non plus à cerner tous les cas de discrimination. Parce que, dans le cas d'enfants nés dans le secret, chaque histoire est particulière, singulière. Nous prenons beaucoup de temps avec la mère biologique et avec l'enfant pour les accompagner.

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