Intervention de Huguette Mauss

Réunion du mardi 27 août 2019 à 11h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Huguette Mauss, présidente du Conseil national de l'accès aux origines personnelles (CNAOP) :

Effectivement, ce sont des questions très sensibles et complexes. Il n'y a pas une réponse. En ce qui concerne le problème de l'information sur les couples homosexuels, le problème, c'est que s'il y a une mention dans l'état civil pour les enfants nés d'un don avec tiers donneur, c'est un dispositif qui est très particulier et nouveau dans la législation française. On pose un cadre pour l'avenir, on ne rétroagit pas.

S'agissant des enfants nés dans le secret, les questions que vous posez, nous ne pouvons les poser que pour l'avenir. Il n'est pas question de revenir sur la situation des enfants qui ont été abandonnés, jusqu'en 2019, dans les conditions prévues par la loi.

Vous posez la question de savoir si on peut considérer qu'un enfant né dans le secret, c'est subi ou c'est un don. Effectivement, nous nous sommes déjà posé la question, parce que certaines femmes disent : « J'ai accouché dans le secret. J'ai fait don de mon enfant. » Mais cette parole n'est pas tenue par toutes les femmes. Elle est tenue par quelques femmes qui ont relu leur histoire dans un autre contexte. Je laisse à ces personnes le soin effectivement de qualifier cet acte de « don ». C'est tout à fait respectueux.

Mais, dans la majorité des cas, les naissances dans le secret, correspondent à des situations de détresse. Ce sont des détresses sur lesquelles les femmes ne veulent pas revenir. Nous-mêmes, lorsque l'on vient les voir, 18 ou 40 ans après, pour leur dire : « On veut rediscuter avec vous. Vous avez laissé passer un événement important. » Quand une femme sur deux nous dit : « Je ne veux pas en entendre parler », c'est important de l'entendre. On ne peut pas dire que c'est un don. C'est quelque chose de subi, de réfléchi, y compris longtemps après. Protégeons aussi la parole des gens qui disent non.

Légiférer dans un cadre général, c'est aussi discuter de ce que nous faisons de tous ceux et toutes celles qui disent : « Il s'est passé quelque chose à un moment donné, je maintiens ma position. » Il faut laisser aussi la porte ouverte. C'est ce que nous essayons de faire au niveau du CNAOP, quand bien même nous les avons en ligne, que nous discutons avec elles, parce que cela peut prendre des mois, voire des années. Les relations avec les mères, lorsque nous les avons au téléphone, que nous leur expliquons la demande de l'enfant qu'elles ont abandonné, nous leur demandons si leur position est irréversible. Elles disent : « Oui, elle est irréversible. » Quelque temps après, nous posons la deuxième question : « Et après votre décès ? » Certaines disent : « Je ne veux pas que mon identité soit communiquée, y compris après mon décès. » C'est lourd de conséquences, mais nous leur laissons toujours cette possibilité.

Peut-être que la loi et la médiatisation autour de ces informations concernant les problèmes génétiques inciteront des mères, la parentèle, à apporter des éléments au CNAOP pour permettre justement l'exercice des droits des enfants, dans le respect du secret, et en arrivant à un moment de rencontre des volontés entre les mères de naissance et les enfants.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, mais j'essaie de vous montrer que rien n'est jamais complètement fermé. Mais revenir sur la loi de 2002 risquerait de créer plus d'ambiguïté que d'incitation, comme par les démarches que nous faisons actuellement, en laissant toujours la porte ouverte pour tout le monde.

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