Intervention de Jacques Marilossian

Réunion du mardi 27 août 2019 à 18h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Marilossian :

J'ai bien écouté tout ce que vous nous avez dit. Si nous voulons avoir un débat apaisé et fructueux, il serait souhaitable de ne pas trop fantasmer et affoler les Français sur des sujets qui ne sont même pas évoqués par le texte en discussion. Je vais être franc avec vous : je suis marié, père de famille et catholique. Je suis également enfant de divorcés et dans les années soixante, je peux vous dire que ce n'était pas quelque chose de facile. J'ai été élevé par deux femmes, ma mère et ma grand-mère, ce qui n'a pas fait de moi un délinquant. J'ai également connu les difficultés d'un parcours de PMA endogène, heureusement, et je peux vous dire que quelle qu'elle soit, la PMA est un parcours complexe qui procède d'un désir d'enfant et d'un don d'amour. Je crois sincèrement que ce désir d'enfant et ce don d'amour sont les premières garanties du bonheur de l'enfant.

Bien sûr, à titre personnel, en conscience, j'aimerais ne pas avoir à divorcer. J'aimerais que mes enfants n'aient pas à procéder à une PMA ou bien sûr à une interruption volontaire de grossesse. J'aimerais également qu'aucun enfant né dans un couple de parents hétérosexuels, avec un père, une mère n'ait jamais été victime de la moindre violence ou d'inceste. Bien sûr, il y a un monde merveilleux, mais aujourd'hui, je suis un législateur. Ce n'est donc pas au père de famille, pas au catholique, pas à tout ce que je vous ai dit, qu'il convient de conduire une réflexion. Comme l'indique la loi, je dois me préoccuper de l'intérêt général qui m'impose de faire abstraction de mes particularités.

Aujourd'hui, notre société est diverse et multiple. Nous devons donc adapter notre loi aux évolutions de la société. Nous ne devons en rien imposer quoi que ce soit aux couples hétérosexuels, ce n'est pas le sujet. Nous essayons simplement de donner un cadre légal à des enfants, des familles, en permettant à des couples homoparentaux – on me dit qu'ils représentent à peu près 2 000 personnes sur 800 000 – d'accueillir un enfant sans que ce ne soit un cauchemar technique, administratif ou qu'ils soient obligés de partir à l'étranger.

J'ai lu la lettre ouverte de la Manif pour tous au Président de la République concernant l'encadrement de la PMA, voire de la GPA. En page 30, vous reprenez le texte de l'étude du Conseil d'État de juin 2018 sur la révision de la loi bioéthique indiquant que rien n'impose au législateur d'ouvrir aux couples de femmes et femmes seules la possibilité d'accéder aux techniques de la PMA. Le même Conseil d'État a rappelé dans son avis du 19 juillet sur le projet de loi, que ni le principe de précaution ni la notion d'intérêt supérieur de l'enfant ne sont de nature à faire obstacle par eux-mêmes à l'ouverture de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes. Le Conseil d'État reconnaît que c'est bien au législateur d'apprécier les réformes à mener, afin d'obtenir un modèle français équilibré. À ce titre, il précise bien que le droit à l'enfant n'est pas justifiable et que le projet de loi n'ouvre pas l'accès à la GPA.

Ma question est simple. Malgré tout ce que nous venons de vous expliquer, avec les garde-fous techniques, éthiques et constitutionnels, je cherche les arguments fondés sur un plan éthique et non sur un plan idéologique, afin de comprendre comment vous pouvez affirmer qu'un couple de femmes ou une femme seule ne pourraient pas bénéficier d'une procréation par PMA.

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