Ce sont effectivement deux articles, les articles 26 et 27, qui concernent l'ANSM dans ce projet de loi. Dans les deux cas, il s'agit d'encadrer des pratiques innovantes, des pratiques en développement. J'insiste sur ce point : il s'agit avant tout à la fois d'assurer l'accès à des thérapeutiques nouvelles et de les encadrer, afin de garantir la sécurité des pratiques. Il s'agit bien d'accompagner ces thérapeutiques innovantes et pas du tout de les freiner.
Pour ce qui est de l'encadrement de la collecte des selles utilisées à des fins thérapeutiques, ce que l'on appelle les transplantations du microbiote fécal, le microbiote est la colonie de micro-organismes que nous abritons dans les intestins. Elle est d'ailleurs assez spécifique à chaque personne et des travaux de recherche ont montré qu'il y avait des liens très étroits entre ce microbiote et le fonctionnement du corps, y compris du système nerveux central. Des recherches sont en cours sur ce terrain.
Depuis 2014, l'ANSM accompagne les chercheurs et les professionnels de santé dans le développement de ces transplantations de microbiote fécal, dans un premier temps pour traiter des pathologies infectieuses, notamment résistantes à certains antibiotiques, dont le clostridium difficile qui est difficile à traiter, mais également pour des indications plus larges comme des maladies des intestins d'origine immunologique de type inflammatoire (MICI), telle la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique. Au-delà, des perspectives sont ouvertes sur d'autres thérapeutiques, qui restent à ce jour du domaine de la recherche.
Après un travail important conduit avec les experts depuis 2014, il est apparu opportun d'encadrer ces pratiques, notamment le prélèvement de ce microbiote chez une personne saine en vue de transplantation chez une personne ayant une pathologie. Aujourd'hui, nous sommes dans le domaine des essais cliniques et les premiers résultats montrent que cela peut être utile dans certaines pathologies et changer le devenir de la pathologie de manière parfois très efficace.
Évidemment, l'encadrement porte principalement sur le prélèvement. Il s'agit de travailler sur la base d'une déclaration des centres dans lesquels ces prélèvements pourront être réalisés et d'un encadrement par des bonnes pratiques, notamment sur la sélection des donneurs, de façon à s'assurer que le microbiote qui sera prélevé ne présente pas de risque pour le receveur. Vous avez sans doute vu qu'assez récemment, il y a eu un accident aux États-Unis. L'idée est bien entendu de réduire autant que possible les risques par une sélection à la fois clinique et biologique des donneurs et un encadrement portant également sur le transport, la conservation et la traçabilité du microbiote. C'est très important.
Le deuxième article porte sur les médicaments de thérapie innovante (MTI), que l'on appelle MTI-PP, avec des préparations spécifiques. Il s'agit de prélever des cellules ou des tissus, de les transformer et de les utiliser comme médicaments. Cela peut se faire soit de manière industrielle, soit de manière individualisée, dans des situations spécifiques. Ces pratiques existent et aujourd'hui, elles sont déjà encadrées par les textes, dans des centres autorisés par l'ANSM travaillant sur la base de bonnes pratiques de préparation. L'article 27 permet d'étendre cette pratique au lit du malade. Les cliniciens nous disent que dans certaines situations, en particulier en orthopédie, il peut y avoir intérêt à pratiquer à la fois le prélèvement et l'administration sur le patient, quasiment au même moment, et de le faire dans le cadre d'une seule intervention médicale. La question se pose de savoir comment encadrer ce type de pratique qui intervient dans des blocs chirurgicaux des établissements de santé.
Il est proposé que ces blocs puissent réaliser ce type d'intervention : prélèvement, transformation et réimplantation sur le même patient, à savoir une implantation autologue, et que cela puisse se faire sous la responsabilité d'un centre autorisé qui passera convention avec l'établissement de santé et fera l'objet d'un contrôle. C'est le centre d'ores et déjà autorisé qui fera l'objet d'un contrôle par l'ANSM, y compris dans sa pratique de « sous-traitance » auprès d'établissements de santé dans ces situations spécifiques.
Il s'agit de situations très spécifiques, nécessitant qu'il n'y ait pas de modification substantielle des éléments prélevés qui nécessiterait des technologies non disponibles dans les blocs opératoires. Là encore, il s'agit de faciliter la pratique dans le cadre de certaines interventions, en particulier en orthopédie, tout en assurant leur encadrement et donc leur sécurité.
J'insiste sur ce point : il s'agit vraiment d'accompagner des évolutions thérapeutiques importantes et très particulières.