Pour répondre à la question de M. Bazin, il est vrai que disposer de chiffres donne toujours plus de poids à un propos, mais en l'espèce, la question n'est pas là. Cela me permet également de répondre à Mme Bergé : la question est vraiment de savoir à quoi sert le droit. Il sert en partie à ordonner le réel et à porter des valeurs et des symboles. Ici, il faut juste laisser ouverte la possibilité d'accouchement sous X, quand bien même elle ne serait jamais utilisée. Si on commence, dans une situation particulière, à interdire à une femme de demander le secret de l'accouchement, on entrouvre une porte qui peut être dangereuse pour toutes les autres femmes.
De la même manière, le projet de loi ouvre l'accès à la PMA à toutes les femmes et permet aux couples lesbiens de former famille avec l'aide du service public et de la médecine reproductive, ce qui est une avancée extrêmement importante. La difficulté avec la DAV n'est pas qu'elle crée des droits différents en matière de filiation, puisque la filiation est identique, mais qu'elle crée une distinction en droit en instaurant un mode d'établissement de la filiation particulier, spécifique et dérogatoire, uniquement pour les couples lesbiens.
Il existe deux filiations : celle du titre VII « De la filiation », sans adjectif qualificatif, et celle du titre VIII « De la filiation adoptive ». La DAV permet de laisser le titre VII inchangé et d'en réserver le bénéfice aux seuls couples hétérosexuels. Cela conduit à instituer une hiérarchie entre les couples hétérosexuels, pour qui il existe une filiation, et les couples lesbiens, pour qui s'applique la déclaration anticipée de volonté. C'est une mesure d'ordre symbolique, mais au moment où le Gouvernement veut reconnaître la diversité des familles et où le caractère homophobe de certains actes constitue une circonstance aggravante, il est important d'envoyer à nos concitoyens des messages forts sur l'égalité dont il est question.