Il est important de garder à l'esprit que les personnes qui travaillent actuellement dans les CECOS n'ont plus rien à voir avec celles qui y travaillaient à leurs débuts. Vous nous interrogez sur des modes de fonctionnement historiques pour lesquels nous n'avons pas forcément tous les éléments de réponse. Avant 1994, les fonctionnements étaient peut-être différents, l'identité du donneur pouvait être recueillie ou pas. Pour chaque donneur, même anonymisé, nous avons les indications sur le nombre de naissances, mais nous ne pouvons pas forcément « associer » des enfants précis à un donneur précis si dans le centre concerné, l'anonymisation était complète avant 1994 et que ni l'identité du donneur ni ses données n'étaient conservées, ce que nous ne pouvons pas écarter. Il n'existait à l'époque aucun cadre législatif.
J'insiste sur le fait qu'une loi rétroactive remettrait en question un consentement signé dans un cadre donné. Recontacter un donneur revient à remettre en question le consentement signé. Nous lui demanderions s'il est d'accord de transmettre son identité, mais nous ne pourrions pas lui indiquer le nombre d'enfants conçus à partir de son don puisque la loi ne le permettait pas. La loi ne pourra être rétroactive sur tous ces points. Nous l'interrogerons donc, mais il n'aura aucune possibilité d'avoir des informations en dehors d'éléments médicaux particuliers. Par ailleurs, nous ne pouvons pas accéder à des adresses qui ne correspondraient plus à celles qui sont indiquées dans nos dossiers. Il ne faut pas laisser supposer que c'est faisable, ce qui donnerait de faux espoirs.
Les pratiques actuelles d'appariement sont relativement anodines ; nous entendons des propos très variés à ce sujet. Ces pratiques ont pour but de maintenir le secret. Je reviens donc sur la notion de maintien du secret. Au début de l'assistance médicale à la procréation, la société était très différente, notamment dans sa façon d'appréhender l'infertilité – masculine plus que féminine – et dans le regard qu'elle posait sur l'homme infertile. Je vous rappelle que chaque praticien a la responsabilité de gérer, en toute autonomie, la prise en charge médicale selon le code de déontologie médicale. Nous ne pouvons donc pas donner de réponse pour l'ensemble des praticiens. J'exerce ma profession depuis la promulgation de la première loi de bioéthique en 1994 et je n'avais aucun élément d'information spécifique autour du don à ce moment-là. Les travaux et les échanges que nous avons au sein de la Fédération des CECOS, sans parti pris, ont toujours été dans le sens de l'information de l'enfant sur son mode de conception. Depuis 1994, nous incitons les parents à informer l'enfant sur son mode de conception, mais nous ne pouvons le faire nous-mêmes ni le vérifier.
Une étude achevée en juin dernier portant sur les pays tels que la Suède qui ont été les premiers à lever l'anonymat montre que l'on ne peut connaître le pourcentage d'enfants réellement informés, car personne n'a convoqué les enfants en leur demandant si oui ou non ils avaient été informés d'avoir été conçus par don. Ce n'est pas possible. Des études déjà menées ou en cours, analysent l'intention des parents d'informer, mais en aucun cas ne traitent de l'information effective de l'enfant.
L'appariement se basera sur un principe d'origine géographique – pour éviter de dire « ethnique ». Un donneur est de type européen, né sur le territoire français, a des parents de type européen, etc. Un donneur de ce type sera attribué à un couple qui est lui-même dans cette situation. Si des spécificités d'origine géographique apparaissaient – un couple d'origine d'Afrique noire, un couple d'origine du Maghreb ou un couple d'origine asiatique – nous essaierions d'attribuer un donneur de cette origine sachant que nous avons de grandes difficultés à répondre à ces situations particulières parce que nous avons peu de candidats au don et de donneurs qui acceptent.
Concernant les autres critères, quand dans un couple, l'homme a les yeux marron, les cheveux châtain et la peau claire, nous essayons d'attribuer un donneur avec les cheveux châtain, les yeux marron et la peau claire ; on peut sélectionner 100 personnes avec ces simples éléments, toutes seront certainement très différentes.