Intervention de Pia de Reilhac

Réunion du mardi 3 septembre 2019 à 17h10
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Pia de Reilhac, présidente de la FNCGM :

Merci beaucoup de nous avoir reçus. Nous sommes des gynécologues que je qualifierais comme étant beaucoup plus « de la base ». Nous suivons des couples sur le terrain. Il s'agit en général de jeunes filles qui ont besoin de contraception, puis éventuellement qui désirent un enfant lorsqu'elles sont en couple. Nous devons les diriger de la façon la plus aisée pour elles, en sachant qu'ensuite, une loi permettra de reconnaître tout ce qu'a évoqué Mme Belaisch-Allart. Nous sommes absolument dans la même démarche. Nous avons d'ailleurs signé avec les autres professionnels concernés par l'AMP la pétition en ligne sur les modifications de la loi de bioéthique.

Nous aimerions que les limites d'âge soient bien posées, pour la femme comme pour l'homme, et que ce soit en définitive une décision médicale. Cette limite doit être déterminée dans la loi par l'ABM, et il faut qu'elle soit précise. Elle peut en effet permettre aux médecins de se protéger face à des demandes abusives – il en existe.

Nous avons trouvé opportun que l'accord du conjoint soit supprimé pour le don de gamètes, et ce pour le don d'ovocytes comme pour le don de sperme. Il faut que ce soit pour les deux. Comme cela vient d'être dit, la conservation des gamètes ne doit pas être réservée aux centres publics avec CECOS : elle doit également être ouverte aux centres privés d'AMP qui ont un agrément et qui savent faire cela. Tout centre ayant un agrément doit pouvoir conserver des gamètes.

Nous nous posons également la question d'une éventuelle pénurie de gamètes. Entre les demandes pour les couples de femmes et les demandes pour les femmes seules, comment allons-nous y arriver ? Le problème risque d'être aggravé par l'anonymat des donneurs levé avec un consentement au moment du don. Dans un certain nombre de pays, la levée de l'anonymat s'est accompagnée d'une diminution des dons de gamètes. Il faut essayer de trouver une parade. Je ne sais pas laquelle. La solution se situerait peut-être au niveau de l'étranger.

Nous sommes tout à fait d'accord pour que la femme puisse utiliser en post mortem les embryons conçus avec son conjoint, attendu que ceux-ci peuvent être donnés à un autre couple ou à une femme seule. Nous ne voyons pas pourquoi la femme qui a fait ce cheminement avec son conjoint n'aurait pas le droit de recevoir cet embryon.

Nous aimerions tout de même que soit précisé ce qui sera pris en charge lors d'une autoconservation ovocytaire sans raison médicale. Il nous est dit que les actes seront pris en charge, mais que la conservation donnera lieu à une location annuelle. J'aimerais avoir quelques précisions à ce propos.

Madame Belaisch-Allart, vous pensez que l'autoconservation ne concernera que des patientes âgées de 32 à 38 ans. Ce serait bien que vous ayez raison. Je n'aimerais pas voir des jeunes de 18 ou 20 ans nous demander une autoconservation. Si la loi le permet, nous aurons du mal à leur signifier qu'elles peuvent attendre, d'autant qu'elles auront la plupart de leurs enfants dans les années qui suivent. Il faut déterminer précisément la limite d'âge inférieure. J'ajoute qu'il faut que les hommes puissent également bénéficier de l'autoconservation des gamètes.

Le projet de loi prévoit qu'il faudra détruire les gamètes actuellement conservés un an après la promulgation de la loi, parce que nous aurons du mal à retrouver le donneur, celui-ci ayant donné anonymement. Il est tout de même un peu regrettable de détruire des gamètes alors que nous risquons d'en manquer.

Un autre point nous a fait réfléchir. Il est question de l'enfant à naître et du droit de l'enfant, mais les parents qui bénéficient d'un don de gamètes ou d'embryons semblent avoir été un peu laissés en dehors du débat. Leurs arguments auraient pourtant été intéressants à entendre, en particulier par rapport à l'anonymat. Vont-ils continuer à demander une AMP, maintenant qu'ils savent ce que l'enfant pourra connaître l'identité du donneur à sa majorité ? Je ne sais pas. C'est une question ouverte.

Nous sommes tous d'accord pour rendre possible le diagnostic d'aneuploïdies dans le cas d'échecs répétés de FIV et d'implantations. Nous éviterions des transferts d'embryons inutiles et des déceptions pour les femmes.

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