Intervention de Cécile Martinat

Réunion du mercredi 4 septembre 2019 à 9h35
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Cécile Martinat, présidente de la Société française de recherche sur les cellules souches, directrice de l'I-Stem (Institut des cellules souches pour le traitement et l'étude des maladies monogéniques), directrice de recherche à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) :

La compétition internationale existe, nous n'allons pas nous mentir. C'est à nous de voir quelles sont les limites à ne pas franchir. Si je reprends l'exemple des bébés CRISPR qui a été annoncé au cours d'une conférence internationale, le scientifique croyait faire un éclat et montrer toute la pertinence de son travail, mais nous sommes tous intervenus afin de dénoncer cela. Nous appliquons une forme d'auto-régulation, par notre formation et le fait de se demander quelles sont les limites à ne pas dépasser.

Je voudrais revenir sur la distinction juridique entre embryon et cellules souches embryonnaires humaines. Il est vrai que les cellules souches embryonnaires humaines sont porteuses d'espoir en thérapeutique. Maintenant, elles ne sont d'ailleurs plus seulement porteuses, puisque nous arrivons à démontrer qu'elles peuvent vraiment constituer une source de matériel pour des applications thérapeutiques. Leur usage doit tout de même être différencié de la recherche sur l'embryon. Pour nous, ces cellules n'ont plus rien à voir avec un embryon. Nous avons parlé du principe de la dérivation et il faut savoir qu'à partir du moment où nous dérivons une lignée, elle est utilisable pendant un certain temps. Certes, nous continuons et continuerons dans le futur à devoir dériver des lignées, mais les dérivations ne se font pas de façon fréquente. À ma connaissance, en France, depuis cinq ans, il n'y a pas eu de dérivation indépendante d'un diagnostic préimplantatoire. Il ne faut donc pas forcément restreindre l'utilisation de ces cellules.

Je suis moi aussi un peu émue par votre question, parce que vous êtes en train de nous dire que les cellules souches embryonnaires humaines ont un énorme potentiel en thérapeutique ou en application biomédicale et qu'il faut donc tout de suite bien encadrer tout cela. J'ai tendance à me dire qu'il faut peut-être justement faire l'inverse. Nous sommes en train de démontrer qu'elles ont des applications en thérapeutique et que nous sommes vraiment au seuil de nouveaux usages, et il ne faudrait plus être bloqué par rapport à cela. Si je reçois d'un seul coup un arrêt de la cour de Versailles me disant qu'il faut tout arrêter, que vais-je faire ? Nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir cette épée de Damoclès en permanence sur notre tête. Il faut vraiment distinguer la recherche sur l'embryon et la recherche fondamentale et biomédicale sur les cellules souches embryonnaires humaines.

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