Intervention de Myriam Szejer

Réunion du jeudi 5 septembre 2019 à 11h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Myriam Szejer, pédopsychiatre psychanalyste, attachée à la maternité et au centre de PMA de l'hôpital Foch de Suresnes :

L'une des questions posées portait sur l'accès aux origines en fonction de la maturité de l'enfant. Les organismes qui délivrent aux parents l'agrément pour l'adoption leur conseillent, depuis le travail de Françoise Dolto, de dire aux enfants dès le début qu'ils sont adoptés. Je ne vois pas pourquoi il y aurait deux poids deux mesures et que l'on ne pourrait pas conseiller aux parents dans l'entretien préconceptionnel d'élever les enfants dans la vérité de ce qu'il s'est passé pour eux. Leur naissance est un peu particulière et si c'est accompagné par les professionnels, ils peuvent tout à fait grandir avec ça et en fonction de leur âge, en intégrer les différents éléments – on ne va pas parler de la même manière à un bébé qu'à un enfant de 8 ans qui est capable de commencer à comprendre ce que c'est qu'un rapport sexuel, des gamètes, etc. Il peut y avoir des étapes, mais ils peuvent grandir là-dedans.

L'accord des parents est important parce que les enfants sont pris dans une loyauté et je ne les vois pas demander qui est le donneur s'ils sentent que ça violente formidablement les parents. Implicitement, ils savent très bien qu'il y a des questions qu'il ne faut pas poser.

C'est justement en raison de cette loyauté que les enfants ne vont pas, dans les associations, exprimer qu'ils ne vont pas bien. S'ils ont un malaise, une souffrance, une fragilité, ils ont aussi une loyauté par rapport à leurs parents qui les empêche de les dire. Je mets donc en doute de cette manière-là les témoignages des enfants vu le contexte dans lequel ils sont placés dans les associations.

Est-ce que les parents homos sont de bons parents ? J'ai envie de dire que ce sont de meilleurs parents que les autres parce que comme ils se sentent extrêmement particuliers dans la manière dont ils se font socialement, ils se donnent beaucoup de mal. Globalement, ce sont des éducateurs formidables. Je vais tout à fait dans le sens de ce qui a été dit par le Dr Lévy-Soussan sur la validité des études, et j'y ajouterai un point : le manque de recul. Toutes les études sont faites sur des enfants jeunes. Pourquoi ? Parce que ces sciences sont jeunes. Or, Freud a expliqué qu'il fallait deux générations pour qu'apparaisse la psychopathologie. Le problème est là : oui, ces parents ont des petits enfants qui vont bien. Qu'est-ce que ça va donner au moment de l'adolescence ? Qu'est-ce que ça va donner quand ces enfants vont avoir des enfants à leur tour ? Qu'est-ce que ça va donner quand ils vont divorcer ? Quand ils vont perdre leurs parents ? On ne peut pas encore le savoir. J'ai moi-même vu des enfants nés des toutes premières GPA qui ont maintenant entre 30 et 40 ans – puisqu'à l'époque cela avait été autorisé provisoirement – et honnêtement, ce n'est pas terrible. Je n'en fais pas une étude, je vous donne simplement un témoignage fondé sur ma patientèle.

Il est inévitable qu'on arrive à légaliser l'accès à la PMA aux couples de femmes, mais j'ai peur qu'on aille inévitablement vers un débat sur la GPA qui sera d'autant plus intense que des couples homosexuels masculins vont revendiquer de pouvoir faire des enfants. Même si la GPA n'est pas à l'ordre du jour aujourd'hui, c'est la conséquence immédiate du changement prévu. Je trouve donc un peu hypocrite de dire qu'on ne la met pas à l'ordre du jour, sachant que les décisions qui vont être prises vont déboucher directement sur cette problématique où la question de la différence des sexes va être au premier plan.

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