Intervention de Hervé Saulignac

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 15h00
Création d'une agence nationale pour la cohésion des territoires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Saulignac :

Il existera toujours des inégalités insurmontables, car il existe des inégalités par nature. Il y a des territoires riches de leurs ressources en eau, en terres fertiles, en plaines facilement aménageables, et où, très tôt, les hommes ont développé leurs activités ; et il y en a d'autres qui doivent surmonter leurs handicaps naturels, leur relief contraint ou leur enclavement.

Il y a ceux qui ont connu l'exode rural et les crises industrielles.

Enfin, il y a ceux qui nourrissent un sentiment d'abandon quand un bureau de poste ferme, quand une cour d'école se tait, quand une maternité laisse la place à un centre de périnatalité, quand un dernier commerce disparaît et que la démographie dégringole.

Ces inégalités, ces déséquilibres, ces ruptures territoriales, quelle qu'en soit l'origine, ont introduit l'idée d'une France à plusieurs vitesses. Là est le vrai sujet. Quels sont ces territoires qui décrochent et qui pourraient, plus tôt qu'on ne le croit, se retourner contre une République qui ne tient plus ses promesses ? Comment réarmer les politiques publiques pour qu'elles démontrent à nouveau leur capacité à produire de la solidarité, notamment avec cette France périphérique ?

Voyez-vous, je suis moins favorable à la cohésion des territoires qu'à leur égalité, entendue comme l'égalité des chances, l'égalité d'accès aux services publics de première nécessité, l'égalité de traitement par les politiques publiques.

De même, je suis moins favorable à une énième agence qu'à des moyens qui font défaut pour mener à bien des politiques de santé, d'éducation, de justice, de service à la population – tout ce qui concourt à réinstaller la République et son action dans les territoires qu'elle a parfois quittés.

Je suis élu d'un département rural, comme l'orateur qui m'a précédé et comme bien d'autres ici. Mon département a besoin, en urgence, de médecins, d'un réseau téléphonique qui fonctionne, d'un internet au bon débit et de routes en bon état. Je peux bien rentrer chez moi demain et dire aux gens que l'on va créer une agence pour améliorer la cohésion avec le territoire d'à côté : cela ne leur offrira ni le médecin, ni le très haut débit.

Commençons par introduire de la cohésion dans les politiques et dans les budgets si l'on veut que les fractures que nous dénonçons cessent de s'aggraver. Commençons par désapprouver ce que sera, dès 2018, le budget du ministère de la cohésion des territoires, qui s'effondre : il diminue de près de 10 % !

Commençons aussi par remettre en débat ce que les derniers gouvernements ont délaissé : la décentralisation, qui a été le plus efficace instrument de cohésion territoriale que l'on ait jamais produit.

Les esprits chagrins et jacobins affirmaient que la décentralisation allait induire un développement rapide des territoires riches et laisser à la traîne les territoires les plus modestes. Il n'en fut rien, et force est de constater que, en trente-cinq ans de décentralisation, les collectivités locales et territoriales ont su résorber de nombreuses fractures. Bref, on voit bien ce que la cohésion territoriale doit à la décentralisation, et ce chantier doit être rouvert.

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