L'agence nationale doit être le lieu où seront créées les conditions nécessaires à la concertation, à l'étude puis à la réalisation des propositions, en mettant à la disposition des acteurs locaux toute l'ingénierie publique nécessaire. La mise en oeuvre d'un plan national est peut-être nécessaire, mais la réalisation de projets territoriaux qui seraient l'émanation de la concertation locale est indispensable.
Les projets territoriaux passés au crible d'une agence nationale placée sous l'autorité de l'État ne risquent-t-ils pas de devenir, d'une manière ou d'une autre, des projets de l'État, aux dépens des libertés locales ?
Si une agence nationale pour les territoires s'impose, ne doit-elle pas prendre la forme d'une autorité indépendante, au sein de laquelle, l'État, mais également les régions, les départements, les communes, les EPCI et les partenaires privés seraient équitablement représentés ? La création de cette institution permettrait ainsi aux différents projets d'être conduits à leur terme en toute confiance entre l'État et les collectivités.
Sur le fond, la proposition de loi entend créer un établissement public industriel et commercial. Or, contribuer au développement harmonieux des territoires et accompagner leur transition démographique, numérique et environnementale relève d'une mission d'intérêt général qui ne peut se réduire à une activité industrielle et commerciale.
En s'assurant de la cohésion des territoires, c'est-à-dire de leurs évolutions harmonieuses, équilibrées et complémentaires, l'agence nationale sera garante de la conjugaison de deux principes fondamentaux : la libre administration des collectivités territoriales et l'égalité des territoires.
Le législateur pourrait donc faire beaucoup plus que créer un nouveau guichet, pour lequel il suffirait d'ailleurs d'un simple décret : reconnaître le principe d'interdépendance des territoires. Les territoires de la République partagent un destin commun : aucun ne saurait se développer durablement au détriment d'un voisin. Par exemple, le désenclavement des Hautes-Alpes profite au désengorgement des métropoles voisines.
Concrètement, l'agence nationale pour la cohésion des territoires pourrait assurer l'interconnexion entre les différents projets qui en émaneront. La coordination des différents projets territoriaux, conçus à l'initiative des élus locaux, n'est en effet pas spontanée. Une des missions de l'agence pourrait être de mettre en perspectives les projets, d'anticiper les déséquilibres et d'intervenir en amont de leur réalisation : l'agence nationale pour la cohésion des territoires sera l'agence de la connexion des territoires.
Enfin, matériellement, tous les territoires ne jouissent pas de la même puissance financière. À l'ouverture de la Conférence nationale des territoires, le Président de la République nous a invités à promouvoir l'égalité des chances des territoires. L'agence nationale devra donc également, en toute indépendance, assurer une certaine péréquation financière entre ces derniers.
Si le législateur pouvait confier la garantie du principe de solidarité des territoires à cette agence nationale, nous contribuerions durablement et sûrement à la cohésion de la nation toute entière !