Intervention de Philippe Nugues

Réunion du mardi 5 janvier 2021 à 8h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Philippe Nugues, avocat et membre de la Grande Loge de France :

Je laisserai au Grand Maître Pierre-Marie Adam le soin de répondre aux questions relatives à l'engagement républicain et à l'instruction.

En tant que juriste, monsieur de Courson, je m'interroge effectivement sur la compatibilité de l'article 21 avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), qui donne un certain nombre de droits aux familles et qui permet notamment que leurs enfants soient instruits en fonction de leurs convictions religieuses.

Mon sentiment, c'est qu'il ne faut toucher à cette réalité vieille de plus d'un siècle qu'avec la plus grande prudence. On a coutume de distinguer entre associations cultuelles et associations culturelles. S'agissant des associations cultuelles, il faudrait toujours garder en tête l'avis du Conseil d'État du 24 octobre 1997 sur ce qu'est l'exercice d'un culte : « la célébration de cérémonies organisées en vue de l'accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou de certaines pratiques ». Il existe donc une définition jurisprudentielle de ce qu'est une association cultuelle. Ce qui importe, c'est de contrôler tout ce qui entoure ces associations : le culturel, les fonds de dotation et les différents moyens de financement utilisés. Or, sur ces questions, le projet de loi manque parfois de clarté.

Je prendrai deux exemples. L'article 43 interdit à une personne condamnée pour faits de terrorisme de diriger une association cultuelle ; or la logique voudrait que cette disposition soit étendue aux associations culturelles. L'autre exemple concerne les fonds de dotation. Si je veux la liste des dirigeants d'une association de type loi de 1901, je peux aller la demander en préfecture mais je ne peux pas, en tant que citoyen, connaître l'identité des membres d'un fonds de dotation.

Dans un même souci de pragmatisme, il me semblerait utile d'ajouter des dispositions relatives aux personnes qui concourent au service public, notamment dans le domaine de l'éducation. Les agents du service public sont tenus à la neutralité, les usagers font ce qu'ils veulent, mais qu'en est-il de toutes les personnes qui sont dans une situation intermédiaire ? Les délégataires de service public sont soumis, avec ce projet de loi, à davantage d'obligations. Mais quand on concourt au service public de l'éducation, on doit également adhérer à ses principes. La question se pose donc d'un meilleur encadrement de ces personnes.

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