Intervention de Éric Diard

Réunion du lundi 11 janvier 2021 à 10h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Diard :

Monsieur le garde des sceaux, lors de la conférence de presse de présentation du texte, vous aviez déjà expliqué avoir travaillé sur ce projet en réaction à l'ignoble attentat dont a été victime Samuel Paty. C'est notamment le cas de l'article 4, qui aggrave les peines à l'encontre des auteurs de menaces, intimidations et violences à l'encontre des personnes chargées de missions de service public afin d'obtenir un traitement différencié. De fait, Samuel Paty a été décapité pour avoir montré des caricatures de Mahomet au cours d'un débat sur la liberté d'expression.

De même, l'article 18 vise à condamner la mise en danger délibérée d'une personne par la révélation d'informations personnelles, dans le but de porter atteinte à son intégrité physique ou psychique. Or c'est grâce à la révélation sur internet du lieu où enseignait Samuel Paty que le terroriste a pu perpétrer son acte.

S'agissant de la rédaction de l'article 4, les recommandations du Conseil d'État ont été largement suivies, afin de garantir son application dans les meilleures conditions. Toutefois, je m'interroge sur les difficultés que peut poser cet article en matière d'établissement de la preuve, notamment quand la personne faisant l'objet de menaces n'est pas soutenue par son administration. Lundi dernier, par exemple, un professeur lyonnais n'est pas retourné en classe : il a préféré changer de métier après avoir été insulté et menacé par des parents d'élèves mécontents du contenu de ses cours. Sa hiérarchie ne semble pas l'avoir suivi. Cette inertie de certaines administrations pourrait freiner, voire empêcher les actions que le projet de loi souhaite mettre en place. Quels dispositifs vous semble-t-il pertinent de créer pour lutter contre cette tendance, afin d'assurer à tout agent public le respect et la sécurité que sa fonction est censée lui garantir ?

Je relève par ailleurs un manque dans ce texte : les prisons, qui sont pourtant un vecteur de séparatisme. Il n'est qu'à voir, pour s'en convaincre, le nombre de détenus de droit commun qui se radicalisent en prison. Il est anormal que des personnes soient incarcérées pour trafic de drogue ou pour vol et sortent de prison radicalisées, sur le point de commettre des attentats. Quelques membres du personnel de l'administration pénitentiaire – entre quinze et dix-sept – sont même inscrits au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste. Je regrette donc qu'il n'y ait rien dans ce texte concernant les prisons – mais peut‑être est-il prévu de travailler à la question dans un autre projet de loi ?

Enfin, toujours s'agissant des prisons, ne pourrait-on pas aligner le régime des aumôniers qui y officient sur le régime des aumôniers militaires ? Ainsi, c'est le ministère de la justice qui les financerait directement. Certains de nos collègues du groupe La République en Marche, Bruno Questel notamment, évoquent eux aussi cette possibilité.

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