Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre… Le dialogue auquel on nous a conviés se déroule surtout au sein de la majorité. C'est bien dommage car nous défendons une position qu'un libéral comme vous devrait partager : la liberté consiste à pouvoir l'exercer ; l'État se donne les moyens d'en contrôler l'abus. Vous l'avez dit, lorsque les parents, dont le rôle est d'élever leurs enfants, sont défaillants, l'État peut intervenir. Mais je conçois mal ce que peut signifier une autorisation a priori.
L'État peut lui aussi être défaillant lorsqu'il exerce le contrôle de cette liberté. Nous avons déjà évoqué l'absence de dialogue avec les élus locaux – alors que le maire est censé contrôler les conditions matérielles et l'Éducation nationale le contenu pédagogique – des contrôles trop tardifs et trop rares, des contrôles réalisés par des agents dont ce n'est pas la spécialité – ne faudrait-il pas à cet égard un corps spécifique ? Il est vrai que l'État communique difficilement les chiffres, mais je peux vous dire que, dans ma commune, le nombre d'enfants concernés par l'instruction en famille est passé de 27 à 47 en cinq ans. L'évolution est inquiétante, mais aucun moyen supplémentaire n'a été donné pour augmenter les contrôles !
Je ne cherche pas la controverse idéologique, mais j'en ai assez des politiques déclamatoires sans effet sur le terrain. Je propose de maintenir le système déclaratif, considérant que la liberté est la règle et que l'État n'intervient qu'en cas de défaillance, comme lors de maltraitances – et priver un enfant d'instruction est une maltraitance. Je propose donc, à l'amendement CS1610, de conserver une déclaration simple, mais de prévoir que dans le mois suivant sa réception, l'autorité compétente effectue un contrôle des conditions de réalisation de l'instruction. Je poursuis le même objectif, mais j'inverse la logique : il faut lutter contre ceux qui abusent, tout en permettant aux autres d'exercer leur liberté.
En outre, les parents doivent pouvoir être accompagnés par l'État, qui ne serait plus seulement censeur, mais aussi conseiller. Je propose à l'amendement CS1611 que les familles puissent demander avis et conseil à l'autorité compétente en matière d'éducation pour l'élaboration de leur projet pédagogique. J'ai dit tout à l'heure que les enfants qui ne sont pas accueillis par l'Éducation nationale dans des conditions satisfaisantes devraient se voir offrir des alternatives. J'ai rencontré de nombreuses familles, dont des parents d'enfants précoces en Seine-Saint-Denis, en demande d'aide. Mais l'éducation nationale n'est pas en capacité de faire du sur-mesure. Je ne parle évidemment pas des familles dont les enfants seraient sans doute renvoyés à l'école si elles étaient contrôlées – je suis même favorable à ce que le droit à l'instruction en famille soit dénié aux personnes figurant dans un fichier de radicalisation.
Je ne doute pas que nous trouverons, dans l'hémicycle peut-être, un équilibre grâce auquel des familles pourront jouir de cette possibilité, dans l'intérêt de leur enfant.