Quelques mots sur cet article 26 d'une grande importance, dont je ne crois pas que les parlementaires attachés à la loi de 1905 ne puissent pas l'adopter.
Il y a une difficulté historique. En 1905, la loi de la République a voulu imposer des associations cultuelles, c'est-à-dire dont le but unique est de gérer un culte, puisque le culte est différent des autres activités associatives. Il ne faudrait pas penser que l'Église catholique est très attachée à cette loi de 1905 : ça ne s'est pas tellement vu à l'époque ! Elle a même refusé de l'appliquer, ce qui a donné lieu à la loi de 1907 et aux accords Cerretti-Poincaré. Il y aura à ce propos des amendements sur les associations diocésaines, qui sont évidemment des associations cultuelles. Elles ont été reconnues comme telles et ne relèvent pas de la loi de 1901.
Seuls le culte protestant et, différemment, le culte israélite se sont organisés pleinement dans la loi de 1905. Les cultes musulman, évangélique, bouddhiste se sont surtout servis de la loi de 1901, constituant des associations mixtes dont la philosophie de séparation du public et du culte est pour le coup confuse.
Le Gouvernement aurait souhaité supprimer la possibilité de gérer un culte en loi 1901, mais le Conseil d'État a estimé que ce serait contraire à la liberté de culte. Nous y avons donc renoncé, mais, avec cet article 26 et les amendements que nous allons présenter, nous posons des contraintes supplémentaires pour les associations loi 1901 qui veulent gérer un culte et donnons des avantages supplémentaires à celles qui sont organisées en loi 1905, laquelle est faite pour cela.
Pourquoi ces avantages supplémentaires ? Quand j'étais maire, j'ai reçu une association musulmane sous statut de 1901, qui demandait à la ville une subvention pour payer sa taxe foncière. Sous le statut de la loi de 1905, la même association n'aurait pas eu à payer de taxe foncière. Comme je refusais la subvention, elle a emprunté à l'étranger de l'argent pour payer une taxe foncière qu'elle n'aurait pas dû payer autrement. C'est digne des Shadoks.
La loi de la République protège les cultes. Elle crée des obligations, c'est vrai, mais elle leur donne aussi des avantages. Une association constituée sous le régime de la loi de 1901 ayant une double activité, cultuelle et humanitaire, ne peut pas émettre de reçus fiscaux au titre de la première activité, mais elle peut le faire au titre de la seconde, qui est d'intérêt général. Jusqu'à présent, comme il n'y a pas de différenciation des comptes, l'humanitaire peut financer le culte : la loi de 1905 est donc bafouée.
L'article 26 réaffirme la liberté de culte et rappelle qu'il existe un instrument formidable pour gérer un lieu de culte : la loi de 1905. Celle-ci présente des avantages – non-paiement d'impôt, reçus fiscaux et, peut-être demain, si vous le souhaitez, possibilité de gérer des immeubles de rapport – et des inconvénients – recours à un expert-comptable, déclaration des financements reçus de l'étranger, création d'un bureau, dont les membres ne doivent pas avoir été condamnés pour terrorisme, par exemple. On ne peut plus contourner, grâce au statut de la loi de 1901, les désavantages du statut de 1905 et chercher des modes de financement en dehors de ceux prévus par la loi.
Monsieur le président, je souhaiterais, si vous le permettez, distribuer un tableau récapitulant les avantages des deux statuts – 1901 et 1905 – et indiquant ce qui va changer avec cette loi. Notre devoir républicain est de garantir la liberté de culte dans une association dédiée à cela. Certes, nous introduisons des contrôles – et on peut comprendre que les cultes n'en veuillent pas –, mais nous leur accordons aussi des avantages, de façon à ce que les lieux de culte ne soient plus financés, ni par un subventionnement public, ni par l'étranger. Il n'y a pas plus républicain, au sens de la loi de 1905, que l'article 26.
Je ne reviens pas sur la clause antiputsch, qui est frappée au coin du bon sens.
Madame Ménard, l'article 26 ne remet nullement en cause les associations diocésaines, qui ont été reconnues comme des associations cultuelles par la jurisprudence. Mais il poussera à se déclarer sous le statut de la loi de 1905 toutes les associations qui naïvement, ou par calcul, pour faire du « détournement de fonds publics », violent la loi de 1905. Cet article est très important pour la République. Il est technique, c'est vrai, mais il est extrêmement clair, et je remercie, à cet égard, les services du ministère de l'intérieur et tous ceux qui y ont travaillé. Le législateur de 1905 ne pouvait pas anticiper l'arrivée sur notre territoire des cultes évangélique et musulman, qui impose des ajustements.