Intervention de Florent Boudié

Réunion du lundi 7 juin 2021 à 21h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFlorent Boudié, rapporteur général et rapporteur pour le chapitre Ier du titre II :

Je souhaite que le débat se poursuive dans un climat apaisé, d'autant que nous ne sommes pas très nombreux ce soir. En outre, il ne sert à rien que la majorité se parle à elle-même en permanence. Je suggère qu'elle le fasse à d'autres occasions, par exemple lors des réunions de groupe.

Sur le fond, gardons-nous de faire certaines confusions. Madame Untermaier, vous avez établi un parallèle entre les dispositions que nous voulons supprimer, à savoir l'interdiction des emblèmes nationaux et des emblèmes confessionnels sur les affiches électorales et sur les bulletins de vote, et l'interdiction des réunions politiques et de la propagande électorale dans les lieux de culte. Or il n'y a aucun lien ni aucun rapprochement possible entre les deux ! Du reste, la volonté d'empêcher la propagande électorale dans les lieux de culte remonte à la loi de 1905.

Vous avez établi, monsieur Chouat, un autre parallèle : dès lors que nous allons désormais demander aux élus locaux d'appliquer le principe de neutralité dans l'exercice de leurs fonctions, nous devrions interdire en amont, avant même qu'ils ne soient élus, l'usage des emblèmes nationaux et des emblèmes à caractère confessionnel. Or ce n'est pas tout à fait ce que nous avons écrit : nous demandons que tout membre du conseil municipal applique le principe de neutralité « lorsqu'il exerce des attributions au nom de l'État », considérant qu'il est alors assimilable à un agent de l'État, lequel est tenu à l'obligation de neutralité.

Par ailleurs, notre collègue Charles de Courson a raison : si nous adoptions en l'état les articles 2 quater et 2 quinquies, effectivement issus de deux amendements socialistes votés par le Sénat, nous nous exposerions à l'évidence à une censure du Conseil constitutionnel, au motif qu'ils portent atteinte à la liberté d'expression. C'est une réalité juridique, que nous devons prendre en considération. Nous devons donc faire preuve d'une grande prudence, et non nous contenter d'énoncer des principes au micro en considérant que la censure constitutionnelle est une banalité. Je sais que celle-ci est pratiquée, et parfois provoquée, mais il serait bon que l'on ne s'interdise pas de réfléchir.

J'en termine par l'argument essentiel qui motive ces amendements de suppression – je parle du texte en l'état ; des discussions ne sont évidemment pas exclues d'ici à son examen en séance publique. Je vous rappelle que la laïcité à la française, le principe de laïcité tel que vous le défendez lorsque vous invoquez la loi de 1905, c'est la laïcité de l'État et de ses agents ; ce n'est pas la laïcisation de la société française dans sa totalité, ni même celle des candidats aux élections.

Nous devons savoir que, si nous adoptons ces dispositions, certes respectables en tant que telles, nous franchirons une ligne en donnant une signification nouvelle à la laïcité, qui ne sera alors plus tout à fait celle dont nous avons hérité. Il y a là une question de fond, que nous devons appréhender avec nuance et finesse, en évitant les raccourcis.

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