Intervention de Elisabeth Morano

Réunion du mardi 22 septembre 2020 à 17h25
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Elisabeth Morano, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances :

Je tiens à vous remercier pour votre invitation. Être face à vous aujourd'hui, ici à l'Assemblée nationale, le cœur battant de notre République, constitue pour moi un moment fort et tout à fait singulier. Je sais par ailleurs l'importance de votre engagement et les travaux menés par cette Délégation au sujet du droit des femmes.

Sur les enjeux importants qui sont les nôtres, je considère qu'il est essentiel que le Parlement et le Gouvernement travaillent main dans la main, en bonne intelligence, en ayant un dialogue franc et toujours constructif. C'est la clef de notre réussite collective et c'est l'idée que je me fais de la conduite de ma mission.

Au cours de mon propos liminaire, je dresserai tout d'abord un bilan en forme de point d'étape de ce qui a été accompli par le Gouvernement depuis 2017 et vous exposerai en parallèle ma feuille de route et celle de ce ministère pour les mois qui viennent. Permettez‑moi de commencer par les violences sexistes et sexuelles et d'évoquer quelques chiffres qui sont, comme vous l'avez dit, glaçants.

En 2019, 146 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire de vie. 219 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part d'un conjoint ou d'un ex-conjoint. Hélas, ces chiffres ne fléchissent pas. Nous avons, en tant que responsables politiques, une double obligation d'action et de résultats.

Mon approche et ma vision pour enrayer ce fléau consistent à mettre la victime au cœur de nos politiques publiques. Lorsque la parole se libère, lorsque la loi du silence se brise, les victimes ont, avant toute chose, besoin d'être entendues et d'être crues. Elles ont ensuite besoin d'être protégées, puis d'accéder à des soins pour pouvoir se reconstruire et, enfin, pour retrouver leur indépendance, elles doivent pouvoir reprendre leur vie en main.

C'est en partant de leur point de vue, de celui des femmes victimes, que nous devons construire notre action publique, avec l'ensemble des acteurs concernés : les associations, les forces de l'ordre, les professionnels de santé ou les magistrats.

En France, en 2019, tous les deux jours, une femme est morte sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint. Toutes les sept minutes, une femme était violée. 60 % des emplois sous-qualifiés étaient occupés par des femmes. 70 % des tâches domestiques étaient exercées par les femmes et je ne parle pas que de la période de confinement. 96 % des congés parentaux étaient pris par les mères. Ces chiffres nous obligent et c'est très certainement pour cela que le Président de la République a érigé l'égalité entre les femmes et les hommes en grande cause du quinquennat.

Bien que notre Constitution stipule que tous les citoyens « naissent et demeurent libres et égaux en droits », force est de constater que les femmes continuent de subir des discriminations qui creusent toujours plus les inégalités. C'est pourquoi, depuis trois ans, l'ensemble du Gouvernement est mobilisé à travers une stratégie interministérielle forte et ambitieuse. Cet engagement sans précédent s'est matérialisé notamment par : la tenue du comité interministériel à l'égalité entre les femmes et les hommes le 8 mars 2018 ; le vote de trois lois ; la tenue du Grenelle contre les violences conjugales lancé par le Premier ministre Édouard Philippe et Marlène Schiappa le 3 septembre 2019 en présence de 15 ministres.

C'est, je crois, notre responsabilité et j'aimerais revenir sur l'esprit qui a animé le Grenelle contre les violences conjugales. Ce Grenelle a été le fruit d'un travail inédit de concertation des principaux acteurs concernés : les associations, les élus, les experts ou encore les familles de victimes. Ce travail a permis de mettre la lumière sur un sujet trop longtemps resté dans l'ombre et, à son issue, 46 mesures ont été annoncées. Ce sont des mesures fortes et concrètes pour faire diminuer le nombre de féminicides et lutter plus contre les violences faites aux femmes.

Votre Délégation a joué un rôle de premier plan au cours de ce Grenelle. Je pense notamment au Livre blanc sur la lutte contre les violences conjugales conduit par la Présidente Marie-Pierre Rixain et à la proposition de loi portée par Bérangère Couillard et Guillaume Gouffier-Cha votée cet été. L'Assemblée nationale et votre Délégation se sont donc pleinement mobilisées. Je tiens à vous en féliciter chaleureusement.

Le 3 septembre dernier, avec les 11 groupes de travail du Grenelle, j'ai souhaité réaliser un point d'étape, un an après le lancement de ce travail sans précédent. Nous avions plusieurs objectifs : identifier ce qui a bien fonctionné ; voir ce qui restait en cours d'exécution ou de conception ; identifier les points de blocage qui ont pu advenir durant ces douze derniers mois.

Je veux que nous adoptions en la matière une véritable culture du résultat. Nous sommes très attendus sur ce sujet et nous devons être à la hauteur. C'est pourquoi je réunirai toutes les six semaines les 11 groupes de travail afin de faire des points d'étape réguliers et je serai ravie d'y associer les parlementaires qui souhaitent nous rejoindre.

Au total, sur les 46 mesures annoncées à l'issue du Grenelle, 17 ont déjà été réalisées et 23 sont en cours de réalisation. Certaines sont déjà bien avancées. Je pense notamment aux unités médico-judiciaires qui permettent aux femmes de porter plainte directement à l'hôpital. 30 de ces unités sont déjà en place. J'en ai d'ailleurs visité deux, l'une dans le Morbihan en Bretagne-Sud et l'autre plus récemment à Saint-Denis avec le Premier ministre. Je veux vous dire que ce dispositif fonctionne ! Enfin, six mesures sont en construction. Au total, à ce jour, 100 % des mesures du Grenelle ont été engagées.

Parmi celles qui restent à déployer, quatre mesures me paraissent particulièrement emblématiques car elles changeront de manière très concrète le quotidien des femmes victimes. Permettez-moi de les énumérer. En premier lieu, l'extension des horaires de la plateforme téléphonique 39 19 permettra une accessibilité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ainsi que pour les femmes en situation de handicap. Ensuite, nous ouvrirons 15 centres de prise en charge et d'accompagnement des auteurs de violence dès cette année. C'était une revendication des victimes et une demande des associations que nous allons concrétiser. Nous créerons également 1 000 places d'hébergement supplémentaires pour les victimes en 2021. C'est un engagement fort que nous portons avec Emmanuelle Wargon. Enfin, la dernière mesure emblématique est le déploiement des bracelets anti-rapprochement. Comme l'a annoncé le Garde des Sceaux, Éric Dupont-Moretti, les 1 000 premiers bracelets seront disponibles très prochainement. Je m'assurerai donc de l'exécution rigoureuse de l'ensemble des mesures du Grenelle.

Par ailleurs, la pandémie liée à la Covid-19 s'est brusquement et un peu brutalement invitée dans nos vies. Elle en a bouleversé bien des aspects. Ce contexte particulier présentait, pour les femmes, un risque redoublé d'exposition à des violences. Dans ce cadre inédit, le Gouvernement a déployé un Plan de lutte contre les violences conjugales le 16 mars dernier. Ce plan a pleinement mobilisé tous les ministères concernés. Il visait à prévenir et signaler les violences à travers : la plateforme de signalement des violences sexistes et sexuelles du ministère de l'Intérieur qui a été, à cette occasion, renforcée par des effectifs supplémentaires ; le 3919 qui est resté opérationnel malgré le confinement ; le 114, numéro d'alerte par SMS pour les personnes malentendantes et pour tous les publics d'ailleurs, qui est resté en fonctionnement depuis le 1er avril 2020.

Par ailleurs, le nombre de téléphones grand danger a fortement augmenté et nous avons créé une plateforme téléphonique dédiée aux auteurs de violences pour prévenir la récidive.

Afin d'accompagner les femmes et les mettre à l'abri, un soutien financier supplémentaire a été apporté aux associations. 500 000 euros ont été consacrés à l'accueil d'urgence des femmes et de leurs enfants. Des points d'accueil et d'écoute ont été déployés dans les centres commerciaux ainsi que dans les pharmacies. Au total, 4 millions d'euros de financements supplémentaires ont été votés en loi de finances rectificative pour soutenir l'ensemble de ces dispositifs. En d'autres termes, l'engagement du Gouvernement et des services de l'État a été total et celui des associations également. Je tiens à les en remercier, ici, devant vous.

Malheureusement, comme vous le savez, les violences à l'égard des femmes ne s'exercent pas uniquement au sein de leur foyer. C'est pourquoi nous devons lutter contre toutes leurs dimensions et contre l'ensemble des violences physiques, sexuelles, psychologiques, économiques ou sociales. La France a ainsi été le premier pays au monde à légiférer contre le harcèlement de rue en créant une nouvelle infraction pour « outrage sexiste ». C'est une avancée significative qui redonne le droit aux femmes d'être en sécurité dans l'espace public. Cette loi va au-delà du harcèlement de rue. Je ne reviendrai pas sur toutes les dispositions adoptées, mais je voudrais simplement en souligner trois : elle a permis d'allonger le délai de prescription pour les crimes sexuels commis sur mineurs de 20 à 30 ans ; elle a élargi la définition du harcèlement en ligne ; elle a renforcé les dispositions du code pénal pour réprimer les infractions sexuelles sur les mineurs.

Je voudrais rappeler qu'elle a été votée à l'unanimité par le Parlement, signe que de telles causes peuvent dépasser nos clivages et peuvent nous rassembler.

Le Gouvernement a également agi pour lutter contre les autres formes de violences à l'égard des femmes. Je pense par exemple à la lutte contre le système prostitutionnel. Je compte relancer le comité interministériel de suivi de la loi de 2016, l'objectif étant de créer davantage de commissions départementales de lutte contre la prostitution pour renforcer les 75 existantes sur notre territoire.

Par ailleurs, je souhaite poursuivre le travail engagé par ma prédécesseure dans la lutte contre les mutilations sexuelles féminines. On estime à près de 60 000 le nombre de femmes qui vivent excisées aujourd'hui dans notre pays. Il s'agit d'une atteinte inadmissible à l'intégrité et à la dignité des femmes et des petites filles. Nous sommes résolus à lutter contre ces pratiques de plusieurs manières, tout d'abord en soutenant les associations qui les combattent, ensuite en sensibilisant davantage les professionnels de santé et enfin en veillant à l'amélioration de la santé des femmes qui en sont victimes.

La lutte contre les violences sexistes et sexuelles constitue donc l'une des priorités de notre gouvernement, une priorité assortie d'un niveau d'exigence et d'ambition très élevé. C'est une priorité parce que des vies humaines sont en jeu, une priorité parce que l'État, en synergie avec les associations, avec l'ensemble des élus et également les forces de l'ordre, les entreprises et les partenaires sociaux, a les moyens d'agir et se doit d'être au rendez-vous.

La honte doit changer de camp. Pour reprendre les mots du Président de la République, « la France ne doit plus être un pays où les femmes ont peur ». Depuis trois ans, nous avons ainsi été pleinement mobilisés et nous le resterons plus que jamais jusqu'à la fin du quinquennat.

Pour agir et pour conduire cette politique publique, il nous faut bien sûr des moyens. J'en viens donc à la question du budget alloué à l'égalité entre les femmes et les hommes. C'est une question centrale qui, je le sais, suscite parfois des interrogations ou cristallise les critiques. Ces interrogations et ces critiques sont compréhensibles tant les enjeux sont importants. Parce que je sais que votre Délégation est extrêmement vigilante sur cette question, je voudrais vous apporter plusieurs éléments de précision.

Les crédits du programme 137 et plus largement ceux affectés à la lutte contre les violences faites aux femmes sont en nette progression. Il s'agit d'une réalité que nul ne peut contester. Le programme 137, piloté par mon ministère, a atteint en loi de finances initiale la barre des 29,7 millions d'euros dès 2017. En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2021 qui sera débattu dans quelques jours au Parlement, je peux d'ores et déjà vous annoncer qu'il sera en augmentation de 40 %. Il atteindra ainsi en loi de finances initiale 41,5 millions d'euros. Il s'agit de l'un des premiers dossiers dont je me suis emparée lors de ma prise de fonctions. Je crois pouvoir dire qu'il s'agit d'une hausse historique à mettre au crédit de ce Gouvernement.

Cette augmentation sera utilisée selon trois finalités. Tout d'abord, il s'agira de financer des dispositifs très attendus que j'ai évoqués tout à l'heure et qui vont concrétiser la pleine mise en œuvre des engagements du Grenelle, à savoir les centres de prise en charge des auteurs de violences et l'extension de la plateforme téléphonique 3919. Ensuite, il s'agira d'accroître les budgets disponibles pour aider les associations. Les femmes s'expriment de plus en plus, elles ont de plus en plus accès à ces associations et il faut donc renforcer leurs moyens financiers. Enfin, nous souhaitons augmenter la part du budget alloué aux actions en faveur de l'égalité professionnelle.

Comme nous le savons tous, le budget consacré aux violences faites aux femmes ne se concentre évidemment pas sur le seul programme 137. Il n'en représente en fait qu'une faible partie. De nombreux autres programmes budgétaires – 19 au total en 2020 – y concourent aussi, parfois très fortement. Je pense notamment aux ministères de l'Intérieur, de l'Éducation nationale, de la Justice, de la Santé ou du Logement qui y consacrent d'importants moyens. En d'autres termes, nous avons développé une architecture institutionnelle afin que les enjeux liés aux violences faites aux femmes et à l'égalité irriguent l'ensemble des politiques publiques.

Depuis 2017, grâce aux travaux interministériels, nous avons réussi à améliorer l'évaluation globale de ces crédits, comme le montre l'augmentation des crédits figurant dans le cadre du document de politique transversal (DPT). Ce document, je le reconnais, a vocation à gagner en rigueur et en méthodologie, notamment pour pouvoir réaliser des comparaisons pertinentes et mieux mettre en lumière la réalité des politiques que nous finançons. Sachez que j'ai demandé à mes services d'y apporter un soin tout particulier.

Par ailleurs, je m'assurerai que le budget du programme 137 soit consommé dans sa globalité en 2020. Le Grenelle sera aussi entièrement financé, c'est un engagement que nous tiendrons. En dégageant les crédits nécessaires, l'État sera au rendez-vous de la grande cause du quinquennat.

J'aimerais maintenant évoquer la question des inégalités dans la vie économique et sociale. Le Gouvernement s'est fixé comme objectif de travailler à la réduction de toutes les formes d'inégalités entre les femmes et les hommes. Cet objectif constitue l'une des priorités de ma feuille de route. C'est donc l'occasion pour moi d'aborder la question des pensions alimentaires.

En France se trouvent aujourd'hui 2,4 millions de familles monoparentales. 85 % de ces familles sont composées d'une femme avec ses enfants et 700 000 d'entre elles vivent sous le seuil de pauvreté. Le non-paiement des pensions alimentaires par les pères assigne donc ces mères et leurs enfants à la précarité. Cette prise en otage financière est totalement inacceptable. C'est pourquoi, en lien avec Olivier Véran, je soutiendrai avec la plus grande vigueur la mise en œuvre dès cet automne du paiement direct des pensions alimentaires par les caisses d'allocations familiales. C'est un enjeu de justice sociale et c'est un enjeu pour lutter contre la pauvreté.

L'allongement du congé paternité est l'un des autres sujets importants qui fait l'actualité. J'y suis, pour ma part, tout à fait favorable. Comme vous avez pu le lire, le rapport Cyrulnik va dans le sens d'un allongement très conséquent, en l'occurrence neuf semaines. Avec Adrien Taquet, nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une mesure essentielle, non seulement dans l'intérêt de l'enfant mais également dans l'intérêt de ses parents. Il s'agit d'une mesure qui permettra de faire évoluer les mentalités et de favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes dans le travail ainsi que dans la famille. C'est, je le crois, une mesure de progrès que nous nous apprêtons à mettre en place.

Cette mesure favorisera l'émancipation économique des femmes. En effet, dans le monde professionnel, cette asymétrie entraîne des inégalités tout au long de la carrière et jusqu'à la retraite. L'allongement du congé paternité permettra dès lors un meilleur équilibre, au bénéfice de tous. Des concertations avec les partenaires sociaux sont actuellement en cours et je suis convaincue que nous réussirons à faire bouger les lignes très bientôt.

La période de confinement que nous avons traversée a jeté une lumière très crue sur les inégalités entre les femmes et les hommes. Le confinement aurait pu, logiquement, conduire à un rééquilibrage de la répartition du travail domestique mais les enquêtes menées à sa sortie nous ont révélé tout le contraire : 70 % des tâches ménagères ont principalement été assurées par les femmes Or, ces inégalités à l'intérieur du foyer se répercutent également à l'extérieur.

C'est maintenant sur le terrain des inégalités économiques que je voudrais m'arrêter. Parce qu'elles sont un miroir de notre société, les entreprises sont aussi l'un des principaux foyers des inégalités entre les femmes et les hommes. Les chiffres sont à ce sujet éloquents. Les écarts de rémunérations se hissent à des niveaux très élevés en France : 25 % en moyenne et 9 % à compétences et poste équivalents. En 2018, les femmes ne représentaient que 27 % des dirigeants d'entreprise et 30 % des créateurs d'entreprise. La même année, elles étaient 30 % à travailler à temps partiel contre à peine 8 % pour les hommes.

Parce que je viens du monde de l'entreprise, je connais les réalités et la précarité économique qui se cachent derrière ces statistiques. Comme l'ont démontré de nombreuses études, j'ai conscience qu'être une femme constitue le premier facteur discriminant dans le monde du travail mais j'ai l'intime conviction que l'émancipation économique constitue la voie la plus sûre vers l'égalité.

En créant l'Index de l'égalité professionnelle, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel portée par Muriel Pénicaud constitue une véritable avancée en matière d'égalité salariale. Je ne m'attarderai pas sur son contenu que vous connaissez déjà. Néanmoins, je tiens à signaler que, chaque année depuis 2018, les entreprises de toutes tailles progressent sur ce sujet ce qui est très encourageant. Sachez donc que j'aspire à amplifier l'impact positif de cet Index, à travers une communication renforcée et plus détaillée des résultats.

Les inégalités entre les femmes et les hommes se traduisent aussi dans les instances de direction. Si nous pouvons nous réjouir que la France soit championne d'Europe et du monde en termes de féminisation des conseils d'administration de ses grands groupes depuis la loi Copé-Zimmermann portée par votre Délégation, si la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) prévoit un certain nombre de mesures pour renforcer la mixité au sein des organes de direction des entreprises, force est malheureusement de constater que la parité en entreprise, à tous les niveaux et dans tous les secteurs d'activité, fait partie des sujets qui avancent encore beaucoup trop lentement.

Dans l'industrie par exemple, les femmes ne représentent que 20 % des membres des comités exécutifs (COMEX) et, au sein des COMEX du CAC 40, elles n'étaient que 17,6 % en 2019. Dans le numérique, les femmes sont également trop peu présentes et ne représentent que 12 % des créateurs de start-up. Je suis donc résolument favorable à une féminisation accrue des comités de direction, pour mettre l'égalité entre les femmes et les hommes au cœur des processus de décision quotidiens des entreprises.

Parlons maintenant de la fonction publique. Si des progrès doivent être réalisés dans le monde de l'entreprise, l'État et l'ensemble des pouvoirs publics se doivent aussi d'être exemplaires en matière d'égalité salariale et de parité. En effet, un constat s'impose : alors que 62 % des agents de la fonction publique sont des femmes, elles n'occupent que 41 % des emplois de catégorie A+, toutes fonctions publiques confondues. Derrière les grades et les échelons se cachent également des inégalités salariales.

La loi Sauvadet puis la loi Vallaud-Belkacem y ont apporté des corrections et la loi de transformation de la fonction publique portée par le Gouvernement est également une étape supplémentaire vers plus d'égalité dans la fonction publique. Toutefois, là aussi, les progrès restent encore trop timides. Il s'agit pourtant d'une priorité du Président de la République et du Premier ministre Jean Castex.

C'est pourquoi, avec Amélie de Montchalin, nous allons travailler pour que la mixité et la diversité soient placées au cœur des politiques de ressources humaines de la fonction publique. Parce qu'elle est au service de tous nos concitoyens, la fonction publique doit ressembler à la France d'aujourd'hui et elle ne peut pas être un lieu d'inégalités. C'est le contraire même de son idéal. Nous y veillerons avec la plus grande attention.

Renforcer la place des femmes dans nos entreprises et dans nos fonctions publiques, c'est renforcer leur visibilité et leur représentativité dans la société. Cela passe aussi par leur place dans les médias. Je profite ainsi de cette audition pour saluer le travail conduit récemment par la députée Céline Calvez et son rapport consacré à la place des femmes dans les médias en période de crise.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. En 2019, la part des femmes présentes à la télévision et à la radio dépassait à peine la barre des 40 %. En 2018, elles représentaient moins d'un quart des « unes » de la presse écrite. C'est un chiffre qui en dit long. À l'épreuve du confinement, ces statistiques ont encore chuté. Dans ce contexte, le travail d'objectivation conduit par le CSA et par Céline Calvez est donc infiniment précieux.

En effet, parce qu'ils constituent un puissant vecteur d'information et d'influence, les médias se doivent d'être un juste reflet de notre société. Avec Roselyne Bachelot, nous réfléchirons à y rendre les femmes beaucoup plus visibles. C'est, là encore, un enjeu d'équité et de justice.

Mesdames et messieurs les députés, je voudrais également rappeler l'action internationale de la France en matière d'égalité femmes-hommes menée depuis trois ans par le Gouvernement, sous l'impulsion du Président de la République.

Emmanuel Macron a en effet souhaité faire de l'égalité entre les femmes et les hommes non seulement une grande cause du quinquennat au niveau national mais également une grande cause au niveau international. L'ambition de cette diplomatie féministe s'est traduite en particulier par la mise en place du partenariat de Biarritz pour l'égalité femmes‑hommes lors de la présidence française du G7 l'an dernier.

À l'échelle européenne, le Gouvernement s'est également beaucoup mobilisé pour que l'ensemble des pays du Conseil de l'Europe, ainsi que des États non-membres, ratifient la Convention d'Istanbul. L'exemple de la Pologne nous montre toutefois qu'il s'agit d'un combat difficile au sein même de l'Union européenne et je me réjouis qu'Ursula von der Leyen l'ait évoqué lors de son discours sur l'état de l'Union. Avec Clément Beaune, nous mènerons ce combat avec la plus grande détermination.

En effet, en lien avec la Commissaire européenne Helena Dalli, la France sera force de proposition sur les sujets d'égalité professionnelle et de respect des droits fondamentaux. Je considère que l'Union européenne se doit d'être précurseur pour l'égalité entre les femmes et les hommes ainsi que pour l'égalité des droits pour les personnes lesbiennes, gay, bi et trans.

En outre, la France accueillera l'an prochain le Forum Génération Égalité à Paris sous l'égide d'ONU Femmes et avec le Mexique. Ce Forum, organisé à l'occasion des 25 ans de la quatrième conférence mondiale de Pékin, sera un moment important. Il permettra à la France de continuer à faire avancer la cause de l'égalité entre les femmes et les hommes sur la scène internationale en mobilisant les grands acteurs internationaux. Notre pays y mettra une grande détermination.

L'exécution rigoureuse de cette feuille de route nous permettra, je le souhaite, de faire avancer de manière significative l'égalité entre les femmes et les hommes dans notre pays.

Je voudrais maintenant aborder une autre mission essentielle de mon ministère : l'égalité des droits en faveur des personnes lesbiennes, gay, bi et trans. Derrière l'égalité des droits, c'est l'égalité effective et concrète que je veux porter. Depuis la dépénalisation de l'homosexualité en 1982, l'adoption du pacte civil de solidarité (PACS) ou l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe, nous avons avancé pour permettre aux lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, etc.

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