Intervention de Barbara Pompili

Réunion du mercredi 21 octobre 2020 à 14h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Barbara Pompili, ministre de la transition écologique :

Mesdames, messieurs les députés, chers anciens collègues, je suis très heureuse de revenir dans cette salle dans laquelle nous avons tant de souvenirs – et tant d'avenir –, en cette occasion spéciale qu'est l'examen du budget – voter le budget est bien la première raison d'être du Parlement. À l'heure où notre pays traverse une crise inédite, sanitaire, économique, sociale et écologique, ce grand moment démocratique est plus que jamais essentiel. Je suis donc très heureuse de répondre à votre invitation pour vous présenter les grandes lignes du budget de mon ministère pour 2021, un budget de combat, pour répondre à toutes les urgences écologiques de notre époque.

L'écologie a – enfin ! – largement dépassé les portes de mon ministère. Elle irrigue aujourd'hui l'ensemble de l'action publique, et d'abord à travers la méthode du green budgeting (budget vert).

Si, pendant des années, l'écologie a été la variable d'ajustement du budget, aujourd'hui, un nouvel impératif des finances publiques voit le jour : réduire le déficit écologique. Le budget vert n'est pas seulement une revue du budget de l'État à l'aune du développement durable, c'est un outil de transformation systémique de l'action publique, qui permet de mesurer l'impact environnemental de nos décisions budgétaires et d'évaluer la compatibilité du budget de la France avec les engagements de notre pays. C'est donc aussi pour la représentation nationale que nous avons réalisé ce budget vert, et je ne doute pas que vous allez vous en saisir. Je sais que cela a déjà commencé, et c'est tant mieux ! Jamais aucun pays ne s'est engagé avec autant de force dans cette démarche. Elle n'en est certes qu'à ses débuts et devra s'améliorer dans le temps, mais nous pouvons déjà être fiers de cette première mondiale.

L'écologie a également dépassé les portes de mon ministère à travers le plan de relance. Là encore, c'est une première. Jamais un gouvernement n'avait autant misé sur la transition écologique pour sortir d'une crise ; jamais un plan de relance n'avait autant été au rendez‑vous de l'urgence écologique et économique. Nous ne pouvons plus séparer les enjeux. Il n'y a pas, d'un côté, l'économie, l'activité et l'emploi, et, de l'autre, la biodiversité et le climat ; c'est le même combat. Avec ce plan de relance, nous avons un objectif simple : redémarrer le pays et changer l'ADN de notre économie. Pour l'atteindre, nous mettons 100 milliards d'euros sur la table, dont 30 milliards spécifiquement dédiés à la transition écologique. C'est sans précédent ! Ce sont 30 milliards d'euros sur deux ans pour agir sur tous les leviers, pour mobiliser les financements qui manquaient, comme nous le disaient des experts d'I4CE, l'Institut de l'économie pour le climat, bref, pour mettre enfin notre pays sur la trajectoire de la neutralité carbone.

Vous connaissez maintenant le détail du plan de relance, qui a fait l'objet de notre rendez‑vous en septembre. Aussi vous redirai-je seulement cet après‑midi qu'avec France Relance, nous accélérons la lutte contre l'artificialisation qui détruit la biodiversité et le lien social. Dans notre pays, 20 000 à 30 000 hectares d'espaces naturels ou agricoles disparaissent chaque année. Notre objectif, ambitieux mais nécessaire, est de diviser par deux ce rythme d'ici à la fin de la décennie. Nous y consacrons 300 millions d'euros pour un fonds de recyclage des friches et 350 millions pour aider à la densification des villes et au renouvellement urbain, avec le moratoire que nous avons annoncé sur l'installation de nouvelles zones commerciales sur des terrains non encore artificialisés.

Avec France Relance, nous donnons également un coup d'accélérateur inédit à la rénovation des logements et des bâtiments. Ce sont près de 7 milliards d'euros qui seront déployés pour rénover l'habitat privé et les bâtiments publics, pour accélérer la rénovation globale – non plus une fenêtre ou une chaudière, mais une rénovation de fond en comble –, pour ouvrir le dispositif MaPrimeRenov' à tous les Français sans conditions de ressources, avec des aides ajustées aux besoins, pour en faire une aide plus simple, plus juste et, donc, plus efficace.

Avec France Relance, nous mettons aussi « le paquet » sur les transports. Ce sont près de 11 milliards d'euros mobilisés, dont la moitié pour le ferroviaire. Petites lignes, fret, transports en commun, mobilité douce du quotidien, vélo et aide au rachat de véhicules moins polluants, déploiement de bornes de recharge, R&D dans l'automobile et l'aérien, nous nous donnons les moyens de bâtir les mobilités de demain.

France Relance, ce sont aussi 7 milliards d'euros pour réussir la grande révolution de l'hydrogène, dont 1,2 milliard d'euros pour décarboner nos industries, 1,2 milliard d'euros pour accélérer le développement de l'économie circulaire. Et je pourrais poursuivre la liste longtemps.

Bref, avec France Relance, nous accélérons la transformation écologique de notre pays, la transformation de tous les secteurs, au-delà du seul budget que pilote mon ministère. C'est l'écologie à laquelle je crois : une écologie de terrain, en métropole comme en outre‑mer, qui invente des solutions avec et dans les territoires ; qui avance, qui change la vie quotidienne des Françaises et des Français.

Dans ce combat, mon ministère est en première ligne. Pour l'année qui vient, ses moyens sont en hausse de 1,3 milliard d'euros. Cela signifie très concrètement que, sans compter le plan de relance, l'année prochaine, le budget de mon ministère atteint un niveau historique de 48,6 milliards d'euros. Ce budget est à la hauteur des défis qui se présentent devant nous pour l'écologie, pour le climat, pour la biodiversité, pour l'égalité des territoires et pour nos concitoyens.

Le rôle de mon ministère est aussi de mettre le pays en ordre de bataille pour faire face aux effets déjà perceptibles et à venir du changement climatique. Alors que notre pays est encore « sonné » par la tempête Alex qui a ravagé les Alpes‑Maritimes, on le sait, les événements extrêmes, les pluies, les inondations mais aussi les sécheresses, seront de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses. Protéger les Françaises et les Français, nous rendre collectivement plus résilients est la première responsabilité de l'État, et ma première responsabilité de ministre. On ne peut pas se contenter de réagir. Notre rôle est aussi de prévoir, de prévenir, et nous savons que les enjeux sont immenses.

C'est la raison pour laquelle je vous présente aujourd'hui un budget pour la prévention des risques naturels majeurs en forte hausse, de plus de 55 %. Nous signons, là aussi, un progrès démocratique, avec l'intégration du fonds Barnier, dédié à la prévention de ces risques, dans les circuits du budget de l'État. Le Parlement aura à se prononcer sur ces crédits, qui ne seront plus désormais limités par le niveau de contribution des assurances. Ces crédits seront aussi dépensés plus efficacement pour des effets rapides et tangibles sur nos territoires.

Avec ce PLF, nous nous donnons aussi les moyens de mieux protéger l'extraordinaire biodiversité qu'abrite notre pays. On l'ignore souvent, mais 10 % des espèces connues vivent en France, en particulier dans nos outre-mer. Ce patrimoine vivant est une chance, une richesse, mais à l'heure de la sixième extinction de masse, il est surtout une responsabilité. En 2021, les budgets dédiés à la biodiversité que pilote mon ministère augmentent, qu'il s'agisse des aires protégées des parcs nationaux – plus 13 millions d'euros –, des moyens du jeune Office français de la biodiversité – plus 10 millions d'euros – ou encore des moyens de l'Office national des forêts – plus 7 millions d'euros.

Ce budget est à la hauteur pour accélérer le développement des énergies renouvelables, avec des moyens inédits, en hausse de 25 %, soit plus 1,3 milliard d'euros.

Ce budget de combat est aussi à la hauteur du quotidien de nos concitoyens, trop souvent exposés à un air pollué. Cette exposition chronique serait responsable en moyenne de 48 000 décès prématurés chaque année dans notre pays. Notre responsabilité devant la nation est de tout faire pour réduire ces conséquences, pour répondre à l'urgence sanitaire, environnementale et sociale. Avec ce PLF, nous renforçons nos actions en la matière, notamment en dotant de 15 millions d'euros supplémentaires les associations de surveillance et les contrôles et études de plus 3 millions d'euros.

Jean‑Baptiste Djebbari vous parlera dans quelques instants du budget des transports. Je souhaitais toutefois souligner en quelques mots que ce budget est, là encore, au rendez‑vous des défis immenses que nous avons à relever en soutenant massivement le développement du fret ferroviaire. Une tonne de marchandises transportées en train plutôt que par camion émet neuf fois moins de tonnes de CO2, mais aujourd'hui, le fret ferroviaire ne représente que 9 % à peine du trafic de marchandises. Nous allons donc réduire les péages ferroviaires, aider au transport combiné, renforcer nos autoroutes ferroviaires, dont l'écologie et l'économie ont besoin.

Enfin, alors que l'hiver approche, je voudrais souligner que le budget de 2021 de mon ministère est au rendez-vous de la solidarité. Pour l'hébergement d'urgence et l'accès au logement des personnes sans domicile fixe, 200 millions supplémentaires seront déployés. Cette solidarité est un principe intangible, une valeur républicaine que nous partageons toutes et tous. Je suis fière qu'elle soit aussi au cœur de l'action de ce beau ministère de la transition écologique dont j'ai la charge.

Il reste, je le sais, des sujets qui peuvent susciter des débats tout à fait légitimes. Je pense à la réduction des effectifs, qui se poursuivra en 2021. Dans un contexte d'extrême tension sur les finances publiques, nous mettrons en œuvre la baisse de 2 % qui nous est demandée afin de contribuer à l'effort collectif. Mais il est certain qu'une revue des missions sera indispensable si les efforts sur les effectifs devaient se poursuivre à ce rythme au cours des prochaines années. Je n'en dirai pas plus.

Mesdames, messieurs les députés, comme vous le voyez, l'écologie est au cœur de l'action de l'État, au cœur de ses moyens et au cœur du budget de 2021, parce qu'il s'agit d'agir sur tous les leviers pour relever le grand défi de notre siècle, pour être à la hauteur de ce moment historique où nous pouvons décider du chemin que nous emprunterons collectivement, pour accélérer le combat écologique, changer la vie des Françaises et des Français, et protéger notre biodiversité, notre air, notre eau. J'y suis totalement déterminée.

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