Intervention de Aude Luquet

Réunion du mardi 3 novembre 2020 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Luquet, rapporteure pour avis des crédits du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » :

Vous avez été destinataires de mon projet d'avis, je ne reviendrai donc ici que sur les éléments les plus importants de mon analyse des crédits du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables ».

Je salue l'augmentation globale des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Notre pays est résolument engagé dans la transition écologique et la mise en œuvre d'un aménagement durable des territoires ; ce budget en traduit, cette année encore, la concrétisation. C'est d'autant plus le cas cette année que la mission « Plan de relance » porte également une ambition écologique très forte : la relance sera verte, avec plus de 30 milliards d'euros destinés à la transition écologique.

Concernant le programme 217, j'évoquerai mes satisfactions, mais également des points de vigilance. Je m'arrêterai ensuite sur les deux thèmes que j'ai souhaité approfondir : les moyens informatiques et les écoles d'ingénieurs inscrites au programme.

Le programme 217 est le programme support de la mise en œuvre des politiques publiques de trois ministères : le ministère de la transition écologique, le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et le ministère de la mer.

À quelques exceptions près, il porte l'essentiel des effectifs de ces trois ministères, hors opérateurs. C'est très important, j'y reviendrai. Il assure également le financement des activités transverses – fonctions juridiques, moyens de fonctionnement et numériques, ou encore politique immobilière.

Il finance également trois autorités administratives indépendantes (AAI) : la Commission nationale du débat public (CNDP), l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) et la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Mon avis dresse la situation de ces trois AAI, avec une inquiétude particulière pour la CNDP.

Enfin, le programme 217 assure une partie du financement de deux opérateurs – deux écoles d'ingénieurs –, sur lesquels je reviens longuement dans l'avis : l'École nationale des ponts et chaussées (ENPC), dans laquelle j'ai pu me rendre, et l'École nationale des travaux publics de l'État (ENTPE), que la situation sanitaire ne m'a pas permis de visiter mais dont j'ai pu auditionner à distance la direction, des chercheurs et des étudiants.

Je reviens sur un point essentiel : ce programme ne finance donc pas une politique en particulier, mais bien l'ensemble des moyens, notamment humains, nécessaires à la réalisation de toutes les politiques environnementales. En conséquence, les autres programmes, déjà présentés à notre commission ou qui vont l'être, relèvent du programme 217 pour leurs effectifs.

La diminution annuelle des crédits du programme 217 signifie donc que les effectifs des trois ministères, et donc ceux consacrés à la mise en œuvre de politiques publiques dont les moyens augmentent, baissent. En 2021, et pour la treizième année consécutive, le schéma d'emplois des effectifs du programme sera négatif, à –780 équivalents temps plein (ETP).

Il faut s'interroger sur l'effet du cumul de ces suppressions d'effectifs qui inquiète aussi bien les représentants syndicaux que le secrétariat général. Je vous proposerai tout à l'heure un amendement pour envoyer un signal au Gouvernement.

Je l'indique dans mon avis : il semble contradictoire de renforcer chaque année les exigences environnementales et les politiques publiques dans le champ du développement durable, tout en poursuivant de telles suppressions d'effectifs.

Cette évidence s'applique également à la Commission nationale du débat public (CNDP) : la participation citoyenne est partout mise en avant mais, en 2021, la CNDP risque de perdre un ETP, alors qu'elle a déjà de grandes difficultés à assurer ses missions. Là encore, je vous proposerai un amendement.

Toutefois, le ministère semble avoir largement pris conscience de ces difficultés : lors de son audition, la secrétaire générale du pôle ministériel m'a indiqué qu'une « revue des missions » serait engagée dès 2021 pour réfléchir à ce que devra être le ministère demain, aux métiers et politiques prioritaires, aux missions et aux compétences. Je salue cet élément de concertation positif ajouté à l'agenda social du ministère.

En outre, des efforts sont réalisés pour ne pas fragiliser outre mesure les politiques portées par le ministère et les suppressions d'effectifs ne se font pas à l'aveugle : les services de l'État au niveau départemental sont relativement préservés, même si je considère qu'ils devraient l'être encore davantage ; certaines politiques – la prévention des risques par exemple – également ; enfin, on s'efforce de préserver l'expertise, en maintenant le niveau des effectifs de catégorie A. Ces efforts sont positifs.

Hormis ce point d'attention, la gestion du pôle ministériel est exemplaire. Malgré l'impact de la crise, la prévision d'exécution 2020 est soutenable, les dépenses atypiques ayant été compensées par des minorations de dépenses. Je salue également une démarche de rationalisation de la dépense publique par des mesures d'organisation, ainsi que la maîtrise des dépenses de fonctionnement et des dépenses immobilières. Voilà des économies qui ne nuisent pas à la qualité de service !

J'en viens maintenant aux deux sujets que j'ai souhaité approfondir. D'abord, les moyens informatiques des trois ministères. Jusqu'en 2020, ils connaissaient globalement une progression annuelle, mais celle-ci demeurait souvent modeste et les agents étaient encore trop souvent dotés d'équipements ou de logiciels vétustes, lorsqu'ils en étaient équipés.

La crise du coronavirus a mis les ministères face à leurs insuffisances sur ce sujet. On nous l'a clairement indiqué : les investissements contraints des années précédentes ont eu un impact sur le taux d'équipement – limité – des agents. Je salue donc le déblocage immédiat de moyens pour équiper les agents : même si tous n'ont pas pu l'être à ce stade, 2,3 millions d'euros ont été mobilisés pour acheter et configurer des postes de travail, des téléphones portables, renforcer la sécurité des accès au réseau, adapter les outils de visioconférence, ou encore mettre à niveau les infrastructures de réseau.

Il faut aller encore plus loin afin que le télétravail monte en puissance de manière pérenne au sein des ministères. Un effort budgétaire conséquent est inscrit au projet de loi de finances pour 2021 en faveur des moyens informatiques ; il faut le soutenir et l'encourager. En outre, la réflexion avec les organisations syndicales sur l'environnement de travail numérique va se poursuivre, permettant, je l'espère, de lever les obstacles culturels au développement du télétravail.

Concernant les écoles – l'ENPC et l'ENTPE – je souhaite partager avec vous mon très grand enthousiasme, mais également quelques inquiétudes. Ces écoles sont fortement engagées dans le développement durable et l'aménagement du territoire : les chercheurs rencontrés et les installations visitées illustrent ce travail permanent pour réduire notre empreinte environnementale et préparer notre adaptation au réchauffement climatique. J'ai souhaité, à chaque fois, échanger avec des étudiants, conscients de leur rôle à venir sur ce sujet.

Mais je m'inquiète car les subventions pour charges de service public (SCSP) des deux écoles diminuent annuellement, tout comme leur plafond d'emplois. Il s'agit, naturellement, d'inciter les écoles à développer leurs ressources propres et à devenir moins dépendantes des subventions ministérielles. Cependant, le maintien d'un plafond d'emplois élevé est une condition sine qua none au développement de ressources propres : seul le recrutement de nouveaux chercheurs permettra en effet l'émergence et le développement de nouveaux partenariats. Je vous proposerai donc par amendement d'augmenter les SCSP des deux écoles du montant équivalent aux cinq ETP qu'il est prévu de supprimer pour 2021, en demandant ensuite au Gouvernement de relever d'autant le plafond d'emplois des deux opérateurs.

Mon principal point d'alerte concerne donc les effectifs. Il faudra absolument tenir compte de cette situation pour les prochains exercices budgétaires, sans quoi la capacité d'agir des ministères pourrait être fragilisée.

Il faut tout de même saluer les efforts faits pour cibler les baisses d'effectifs et maintenir la qualité de service des ministères, ainsi que l'annonce d'une « revue de missions » pour l'an prochain. Au global, la gestion est rigoureuse et rationnelle, et les crédits globaux de la mission témoignent, je le disais en introduction, d'une réelle ambition écologique.

J'émets donc un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

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