Intervention de Gérard Leseul

Réunion du mercredi 18 novembre 2020 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul :

La création du Parquet européen s'inscrit dans la perspective de la construction d'un espace européen de liberté, de sécurité et de justice ; pour respecter la souveraineté des États en matière judiciaire, son organisation est décentralisée. Il s'agit d'une coopération renforcée, procédure qu'il faudrait davantage promouvoir au niveau européen.

Ce texte prévoit la création, dans le ressort de chaque cour d'appel, d'un pôle régional spécialisé en matière d'atteintes à l'environnement. La compétence territoriale d'un tribunal judiciaire serait ainsi étendue au ressort de la cour d'appel pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des délits prévus par le code de l'environnement. Malheureusement, le texte exclut les délits prévus par le code minier, le code forestier, le code rural ou encore le code de l'urbanisme. Il se prive aussi de compétences civiles, alors que la double compétence se justifiait pourtant et aurait pu s'étendre au contentieux civil relatif à la prévention et à la réparation du préjudice écologique et au devoir de vigilance en matière environnementale.

Le projet de loi prévoit aussi de créer une CJIP en matière environnementale, qui permet aux signataires d'éviter les poursuites. En pratique, cette justice négociée permet aux entreprises de s'assurer une impunité à faible coût : pas d'inscription au casier judiciaire, pas de déclaration de culpabilité. Dans le cadre d'un droit en construction comme celui de l'environnement et même s'il est proposé d'augmenter le quantum des amendes, il ne nous semblait pas souhaitable d'étendre la CJIP à la matière environnementale ; à tout le moins aurait-on pu en aménager la procédure afin que tous les droits des parties civiles soient respectés. Si la création de cette CJIP devait être entérinée, il faudrait renforcer les moyens afin de contrôler les mises en conformité décidées à l'issue d'une CJIP.

Légiférer sur la justice environnementale doit être l'occasion de pallier les lacunes, notamment l'absence, dans le code pénal, de délit général d'atteinte ou de mise en danger de l'environnement. Mon prédécesseur, M. Christophe Bouillon, avait beaucoup travaillé sur le sujet l'année dernière et défendu une proposition de loi sur la reconnaissance de l'écocide en droit français. Malheureusement, cette idée a été balayée d'un revers de la main par la majorité… avant de revenir sur le devant de la scène au printemps, portée par la prise de conscience citoyenne sur le climat.

Citer l'écocide dans les débats sur ce texte permettrait de renforcer un message politique puissant : il faut protéger l'environnement au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la nation et répondre à l'attente exprimée directement par nos concitoyens. Si ce texte est intéressant, le groupe Socialiste et apparentés sera très vigilant tout au long de son examen.

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