Intervention de Jacques Krabal

Réunion du lundi 15 février 2021 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Le projet de loi constitutionnelle que nous examinons s'inscrit dans un contexte tout à fait novateur. À l'issue du grand débat national, le Président de la République a pris l'initiative de convoquer une Convention citoyenne pour le climat au mois d'octobre 2019. Cette démarche innovante de démocratie participative est sans précédent. Elle n'enlève rien au rôle du Parlement au sein de l'architecture institutionnelle, au contraire. Pour nous, parlementaires, elle offre l'occasion d'une réforme constitutionnelle qui est un rendez-vous démocratique important.

La modification de l'article 1er de la Constitution est l'une des mesures les plus emblématiques adoptées, le 21 juin 2020, par 81 % des participants à la Convention citoyenne. Ce chiffre montre à quel point l'attente est forte parmi nos concitoyens ; il nous oblige. La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a décidé de se saisir pour avis du projet de loi constitutionnelle. Cette décision nous honore collectivement. Sur ce sujet fondamental, nous devons démontrer notre capacité à dépasser les clivages partisans et à nous rassembler autour d'une expression commune.

Le texte que nous examinons reprend la proposition, sans modification substantielle. Son article unique permettra d'affirmer la nature prioritaire de la cause environnementale, aux côtés des principes fondamentaux de la République. Après la proclamation, en 1789, des droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme, après la reconnaissance, à la Libération, de ses droits économiques et sociaux, l'heure est venue d'inscrire dans la loi fondamentale la dimension écologique de notre contrat social.

La constitutionnalisation progressive des principes environnementaux n'est pas un acte isolé ou marginal. L'excellent rapport de M. Christophe Arend démontre que cette démarche a été entreprise dans d'autres pays. La France a été à l'origine de l'accord de Paris sur le climat, conclu le 12 décembre 2015. Elle doit continuer à être à la pointe de ce combat. Si la Charte de l'environnement a constitué une grande avancée en droit interne, elle est désormais insuffisante. Il est donc temps de sécuriser le rehaussement – je préfère ce mot, que je vous emprunte, Monsieur le ministre, à celui d'« élévation », que j'ai écrit – de la préservation de l'environnement au rang des principes à valeur constitutionnelle.

Le présent projet de révision constitutionnelle nous en donne l'occasion. Il vise à inscrire l'urgence climatique dans la norme fondamentale. Il va plus loin que le droit en vigueur, car il introduit un principe d'action des pouvoirs publics. Une réforme constitutionnelle est tout sauf un acte anodin. Il s'agit d'un acte fondateur, par lequel la Nation affirme sa cohésion et rappelle ce qui est prioritaire à ses yeux, ainsi que d'un exercice exigeant, auquel on ne se livre « que d'une main tremblante », comme le rappelait Montesquieu. Plusieurs interrogations ont été formulées, ainsi que des réserves, notamment sur le principe de précaution, l'utilisation du verbe « garantir » et le principe de non-régression. J'invite tout un chacun à lire le rapport de M. Pieyre-Alexandre Anglade, rédigé à l'issue de nombreuses auditions. Sur chacune de ces questions, il apporte des clarifications précises et rassurantes.

Oui, nous sommes prêts. Faut-il ajouter que 85 % des membres de la Convention citoyenne pour le climat souhaitent l'organisation d'un référendum ? Alors, écoutons-les. « En toute chose il faut considérer la fin », écrit, dans sa fable Le Renard et le Bouc, Jean de La Fontaine, né à Château-Thierry et dont nous fêterons en 2021 le quatre-centième anniversaire de naissance.

Quelle est la finalité ? Ensemble, nous pouvons, d'une part, accélérer la lutte contre le dérèglement climatique et préserver la biodiversité, d'autre part, redonner des couleurs à la démocratie, en donnant la parole au peuple. Cette révision est l'émanation de la volonté du peuple. Les constituants que nous sommes doivent la porter avec conviction. Elle mérite d'être adaptée pour que nous soyons armés face au plus grand défi que nous ayons connu. C'est pourquoi, avec conviction, avec confiance, les députés du groupe La République en Marche soutiendront pleinement ce projet de loi constitutionnelle.

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