Intervention de Gérard Leseul

Réunion du mercredi 14 avril 2021 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul :

Nous sommes exposés chaque jour à des centaines de messages publicitaires, à travers la radio, la presse, la télévision, les applications mobiles, le téléphone portable, notre boîte à lettres, mais aussi dans les transports en commun et sur la voie publique. La célèbre phrase de l'ancien PDG de TF1 Patrick Le Lay, selon laquelle il vendait aux publicitaires du temps de cerveau disponible, le rappelle bien. La publicité a une fonction structurante sur nos vies et elle influence nos choix, bien souvent au détriment d'un mode de consommation raisonné et responsable.

Comme vous le notez dans votre rapport, le dernier bilan « Publicité et environnement » de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité, publié en septembre 2019, fait état d'un taux de non-conformité des publicités environnementales aux règles déontologiques de 11,6 % : c'est le ratio le plus élevé depuis 2011 et il est presque deux fois plus important que celui constaté lors du précédent bilan, soit 6,4 %. Cela nous amène à penser que la publicité est effectivement un levier qu'il faut actionner pour aller vers une société moins consommatrice, plus responsable et plus durable.

On ne peut, dans ce contexte, que regretter le manque d'ambition du projet de loi « climat et résilience » actuellement en débat. La seule interdiction, à l'article 4, concerne la publicité directe pour les énergies fossiles, par ailleurs très minoritaire, et non la publicité pour les produits qui les utilisent, comme les véhicules SUV, particulièrement polluants. C'est comme si la loi Évin, votée il y a tout juste trente ans, avait interdit la publicité pour les cigarettes tout en autorisant celle en faveur du tabac, ou inversement. C'est d'autant plus regrettable que 65 % des Français seraient favorables à l'interdiction des publicités pour les marques qui contribuent au dérèglement climatique. Au cours de l'examen du projet de loi « climat et résilience », nous avons défendu, avec plusieurs collègues, une proposition claire consistant à interdire la publicité pour les produits et services ayant un impact environnemental excessif sur le climat. De même, nous avons proposé de mettre fin à la promotion des modèles SUV, souvent lourds et très émetteurs : cette proposition, hélas, n'a pas été retenue.

Madame la rapporteure, je partage votre objectif de mieux réguler la publicité qui porte atteinte à l'environnement. J'ai toutefois des réserves sur deux dispositions : l'interdiction de toute publicité pour les téléphones portables d'une part, et pour les vols entre deux villes métropolitaines d'autre part. À titre personnel, je ne serais pas opposé à une publicité pour un vol entre Brest et Nice, dans la mesure où il n'y a pas de solution alternative.

Le constat de l'échec de l'autorégulation du secteur de la publicité est sans appel et il importe de faire évoluer les choses. Il est urgent que les pouvoirs publics inventent un nouveau modèle de régulation, efficace et juste. Il pourrait passer, à court terme, par la redéfinition du rôle des administrations existantes et par la création d'une autorité administrative indépendante, ce qui, à moyen terme, permettrait d'établir un corpus de règles et d'organiser leur mise en œuvre. La saturation de l'espace public et numérique appauvrit nos imaginaires, particulièrement chez les enfants : l'Organisation mondiale de la santé recommande d'ailleurs d'éviter les écrans avant l'âge de 5 ans.

Vous l'aurez compris, je partage l'objectif de cette proposition de loi, qui consiste à réguler plus fortement la publicité.

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