Intervention de Barbara Pompili

Réunion du jeudi 7 octobre 2021 à 10h10
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Barbara Pompili, ministre :

Monsieur le député, nous avons décidé d'aider nos concitoyens qui auront le plus de mal à franchir cette étape. Nous l'assumons entièrement. C'est une vision de justice sociale.

Par ailleurs, comme le Premier ministre l'a annoncé, nous allons déployer un bouclier tarifaire pour protéger tous les Français. Nous bloquons les prix du gaz tout l'hiver au niveau d'octobre 2021. Sans cela, les Français auraient dû payer 30 % plus cher leur facture à la fin de l'année.

Nous proposerons au Parlement d'ajuster la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) pour atteindre l'objectif de limiter à 4 % la hausse de l'électricité, soit environ 5 euros par mois pour un Français qui se chauffe à l'électricité. Si nous ne le faisions pas, la hausse serait de 11 à 12 %.

Nous sommes responsables et faisons preuve de transparence puisque quand les prix du gaz baisseront, sans doute à partir du printemps, nous diminuerons un peu plus lentement les tarifs pour revenir à la normale. S'agissant de l'électricité, toute baisse éventuelle de fiscalité sera financée par les recettes exceptionnelles tirées de la vente de l'électricité française.

Le nombre de catastrophes naturelles (inondations et incendie) s'accroît. Je rappelle que l'inondation est le premier risque naturel en France par l'importance des dommages qu'il provoque. Depuis 1982, 57 % des indemnisations au titre des catastrophes naturelles font suite à des inondations, lesquelles se chiffrent en moyenne à 570 millions d'euros par an. D'ici à 2050, ces montants pourraient être multipliés par 1,5 en raison de l'influence du changement climatique sur la fréquence et l'intensité des phénomènes. Au-delà des indemnisations, nous devons mener des politiques de prévention efficaces. Plusieurs leviers se combinent : la connaissance des aléas, la prévision des crues, l'information de nos concitoyens et des professionnels, sans oublier les aménagements visant à réduire la vulnérabilité de nos territoires. Nous devons mobiliser tous les acteurs pour assurer une action cohérente de l'État et des collectivités territoriales.

Pour la diffusion de l'information préventive, une appropriation collective du risque est nécessaire. Nous lançons tous les ans, depuis six ans, une campagne de communication « pluie et inondation » ciblée sur l'arc méditerranéen, particulièrement touché par des phénomènes de pluies intenses, notamment cévenoles. Le fonds de prévention des risques naturels majeurs est la principale source nationale de financement des actions permettant de réduire la vulnérabilité du territoire. Au 1er janvier 2021, il a été budgétisé à hauteur de 205 millions d'euros, soit une hausse de 56 % par rapport à 2020. Il est porté à 235 millions dans le PLF pour 2022.

Pour ce qui est des risques technologiques, la création du bureau d'enquêtes et d'analyses sur les risques industriels (BEA-RI) représente une avancée historique.

Nous pouvons envisager le principe de dispositifs fiscaux en faveur de l'aviation propre pour les quelques années à venir, mais nous n'avons pas encore de solution décarbonée utilisable à grande échelle.

Tous les carburants mis à la consommation contiennent des biocarburants. En 2020, un peu plus de 8 % de l'énergie utilisée dans le transport routier provenaient des biocarburants. La politique d'incorporation de biocarburants tient compte de l'effet de ces produits sur l'environnement. L'utilisation de carburants produits à partir de matières premières en concurrence alimentaire est limitée à 7 %, car nous avons besoin de nos terres pour cultiver des plantes comestibles. Cette mesure a été prise en concertation avec le niveau européen. L'utilisation de la deuxième génération de biocarburants ou avancés, produits à partir de résidus, n'est pas plafonnée et bénéficie d'un soutien deux fois plus important.

La décarbonation du secteur aérien est un enjeu majeur. Les biocarburants sont la seule technologie mature capable de l'engager. D'autres solutions à base d'hydrogène ou de carburants liquides produits à partir de l'électricité en sont au stade de la recherche. Une feuille de route française pour les carburants aéronautiques vise pour 2022, un objectif de 0,5 % d'incorporation, le surcoût pour chaque trajet étant compris entre 0,3 et 0,35 % ; pour 2025, un objectif de 2 % pour un surcoût compris entre 1,15 et 1,4 % et, en 2030, un objectif de 5 % d'incorporation, pour un surcoût estimé entre 2,9 et 3,5 %.

Les coûts à l'horizon 2030 vont dépendre des progrès technologiques et des évolutions du marché international. Ils seront revus au fur et à mesure.

En France, la taxe incitative relative à l'incorporation d'énergie renouvelable sera élargie à l'aérien à compter du 1er janvier 2022.

Monsieur Patrice Perrot, bravo pour le beau travail que vous avez fait avec Mme Nadia Essayan : il était nécessaire de mesurer ces interactions au regard du changement climatique.

Les dépenses pour la lutte contre les espèces exotiques envahissantes s'établissaient, en 2020, à 1,24 million d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,04 million en crédits de paiement (CP) sur le budget du ministère de la transition écologique. En 2021 et 2022, elles se chiffrent à 1,20 million en AE et CP, sans compter les financements des agences de l'eau, des collectivités locales et les financements européens, à travers le Fonds européen de développement régional (FEDER) et le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), lequel s'élève à 3 millions d'euros par an pour La Réunion. Dans le cadre du programme Life, cinq projets sont en cours pour 11,3 millions d'euros par an. Il ne faut pas considérer l'action contre les espèces exotiques envahissantes à travers le seul budget du ministère, mais prendre en compte les financements cumulés. Au-delà de l'angle purement financier, cette question mériterait un coup de projecteur.

Concernant la stratégie globale pour l'éolien, vous vous étonnez, monsieur Aubert, que je prône comme vous un développement maîtrisé et responsable. Pourtant, nous devons tous être responsables et attentifs à ce que le développement absolument nécessaire de l'éolien s'accompagne d'un travail sur les territoires. Je vous renvoie aux mesures que nous avons prises. Elles diffèrent de celles de votre proposition de loi qui n'ont pour conséquence directe que d'empêcher le développement de l'éolien, ce qui serait une grave erreur stratégique au regard de nos besoins énergétiques. Plutôt que de prévoir des mesures visant mécaniquement à dégrader nos possibilités de faire de l'éolien, faisons face à nos responsabilités en expliquant à nos concitoyens qu'il faut plus d'énergie renouvelable et donc développer des éoliennes terrestres, mais en le faisant mieux et en évitant les erreurs du passé. C'est une méthode plus efficace, plus responsable, qui nous permettra d'avancer collectivement.

Par conséquent, ne vous étonnez pas si j'émets des avis défavorables à tout ce que vous allez proposer cet après-midi en séance publique.

Il faut être progressiste pour faire face à de lourds enjeux, qui sont aussi de beaux défis à même de développer des filières industrielles, de l'emploi et de redonner des perspectives à nos jeunes.

Il y a deux manières de réduire la gêne lumineuse provoquée par les éoliennes. L'effet « guirlande » est sympathique à Noël, mais moins le reste de l'année... La réorientation des faisceaux vers le ciel, peu coûteuse, sera opérée l'année prochaine sur tous les parcs existants. Placer un simple cache ne nécessite pas un gros investissement. Mais ce n'est pas suffisant. Il faut équiper les parcs de transpondeurs. Cela représente des investissements plus élevés qui seront réalisés à partir de l'année prochaine sur les prochains parcs et, au fil du temps, dans les parcs existants. Mais sans attendre, nous procédons à la réorientation des faisceaux lumineux. Le coût sera pris en charge par la filière.

Puisqu'il faut aussi équiper nos aéronefs, notamment les avions et les hélicoptères de l'armée, nous prendrons en charge cet investissement. La dépense n'est pas énorme.

De même, les filières doivent prendre en charge le coût de démantèlement des éoliennes, comme toute filière, pas seulement celles des énergies renouvelables, doit prendre en charge l'intégralité de ses coûts. Jusqu'à présent, ce ne sont pas ces dernières qui ont coûté le plus cher à l'État en démantèlement.

Ce n'est pas un quart, mais la moitié des consommateurs de gaz qui sont soumis au TRV et ont des tarifs fixes pendant plusieurs années. Il faut les rassurer, ils ne seront pas touchés par la hausse des prix du gaz qui affectera l'autre moitié des consommateurs.

L'évolution du trait de côte est un fait, prévisible, pour lequel nous devons mener des politiques de long terme. Elle ne peut pas être gérée de la même manière que les risques. Cela impose de repenser les financements. Il est déjà possible de mobiliser le cadre contractuel du projet partenarial d'aménagement (PPA) pour obtenir un cofinancement par l'État des projets de recomposition spatiale. Trois territoires sélectionnés par appels à manifestation d'intérêt se sont engagés dans cette démarche : la communauté de communes de Coutances, mer et bocage, la communauté de communes Médoc Atlantique, pour le site de Lacanau Océan, et la communauté d'agglomération du Pays basque, pour le site de Saint‑Jean-de-Luz. Ces trois PPA permettront d'expérimenter les opérations de relocalisation d'activités et de biens. Ces projets pourraient être les premiers à bénéficier des outils juridiques créés par la loi « climat et résilience ». C'est une création historique. Pour répondre à cette question qui pose des problèmes dans de nombreux territoires, nous modifions profondément le droit de la propriété. Certains n'ont pas pris la mesure des dispositions votées dans cette loi. Je me réjouis que l'on voie concrètement ce qu'elle nous permet.

Le plan de relance 2021-2023 prévoit une enveloppe de 10 millions d'euros pour les PPA. L'année 2021 a été consacrée à l'élaboration des contrats, en étroite collaboration avec les collectivités et les services déconcentrés de l'État. Ils devraient être signés avant le 31 octobre 2021. Le soutien financier de l'État sera engagé dans la foulée pour un montant estimé à 8,7 millions d'euros. Une avance de 30 % sera versée à chaque projet. L'année 2022 sera consacrée au lancement des premières actions, consistant essentiellement en la réalisation d'études pré-opérationnelles, préalables à la réalisation des travaux de relocalisation. Parallèlement, un nouvel appel à manifestation d'intérêt pour des PPA « trait de côte » sera lancé dans le but d'engager d'autres territoires. À cela s'ajoutent les 2 millions d'euros inscrits au PLF pour 2022 pour aider les communes à mieux cartographier le territoire et 5 millions d'euros pour financer des ouvrages de renforcement contre le recul du trait de côte.

Enfin, la proposition d'une mesure de financement basée sur les DMTO est intéressante. Nous devons continuer à y travailler. Elle est d'ailleurs évoquée dans le rapport de M. Stéphane Buchou mais, à ce stade, nous devons nous accorder sur l'idée de ne pas créer de taxe ou d'impôt supplémentaire dans le PLF. Je ne ferme pas la porte à une réflexion sur les financements mais, dans ce budget, on ne crée pas de nouvelle taxe ou de nouvel impôt.

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