Mme Karamanli, vos questions nous invitent à être pragmatiques. Incontestablement, l'Europe souffre d'une absence d'incarnation physique, ce qui ne facilite pas la proximité de l'Europe et du citoyen. La charte interétatique a vocation à réunir les États membres autour un engagement moral commun tout en leur laissant une certaine souplesse dans une démarche volontaire et d'adhésion de leur part. La charte ne va pas définir les modalités des conventions mais plutôt fixer des objectifs, l'objectif principal étant de permettre aux citoyens de s'exprimer, de relancer son engagement et sa participation en faveur de l'Europe. Deux comités seront institués : le premier, au sein de chaque État membre, sera en charge de la phase opérationnelle, c'est-à-dire la mise en place et le suivi des conventions au niveau national, comprendra, outre des représentants des pouvoirs exécutif, législatif, en majorité des membres de la société civile, des représentants associatifs ; le second comité que nous avons appelé comité des sages, institué au niveau européen, regroupera les institutions et organisations européennes et ce pour garantir la neutralité de la restitution et de la diffusion des échanges. Il est en effet important de ne pas exclure les institutions européennes de la mise en place de ces conventions. Afin de garantir leur succès, il est cependant souhaitable qu'elles soient portées par les États membres. Le budget alloué à ces conventions dépendra de la forme et de l'ampleur qu'elles revêtiront. Dans l'idéal, les conventions démocratiques pourraient s'appuyer sur un cofinancement en provenance de chaque État et de l'Union européenne. Il convient également de mobiliser des ressources qui existent d'ores et déjà lors de l'organisation d'événements, de débats… Dans le rapport, nous proposons, par souci de réalisme, de définir le budget après que les conventions auront été mieux définies.
M. Lambert, le mandat de député français nous confère certes une mission bien précise, mais notre légitimité à parler de l'Europe n'en est que plus grande. Soyez certain, M. Anglade, que nous n'entendons en aucune manière discréditer les institutions européennes et les députés européens. Des initiatives ont été mises en oeuvre, elles sont positives mais pas suffisantes. Il s'agit de proposer autre chose pour faire en sorte d'impliquer dans le débat ceux qui se désintéressent de l'Europe. Conscientes d'être un peu éloignées des citoyens, les institutions européennes mettent en place des initiatives pour se rapprocher des citoyens. Le député européen doit pouvoir recréer une telle proximité : les collègues du Parlement européen que nous avons rencontrés souhaitent prendre leur part dans ces conventions démocratiques. Loin de s'inscrire contre les institutions européennes actuelles, la démarche des conventions démocratiques vise bel et bien à inclure toutes les parties prenantes en la matière.
Concernant le calendrier évoqué tant par M. Anglade que Mme Obono, les conventions démocratiques seraient réparties en deux temps : les débats, lancés de manière concomitante dans l'idéal dans l'ensemble des États y participant, se dérouleraient sur une durée de six mois, à compter du 9 mai 2018. En parallèle, seraient organisés des événements culturels dont certains existent d'ores et déjà, telles, par exemple, les journées du patrimoine européen. Ces événements ont d'ailleurs vocation à perdurer au-delà des débats. Il semble difficile de faire démarrer plus tôt les conventions démocratiques compte tenu des calendriers électoraux et institutionnels propres à certains des pays qui souhaitent y participer, et notamment l'Allemagne, l'Italie, la Hongrie.
Je voudrais dire à Mme Obono que l'objectif des conventions démocratiques n'est pas de défendre l'Europe ou de créer l'adhésion à l'Europe. Il s'agit davantage de présenter l'Europe de manière positive, d'en donner une belle image, de mettre en avant ses valeurs, les plus anciennes, mais aussi de nouvelles susceptibles d'être plus parlantes pour les citoyens. L'objectif prioritaire n'est pas d'obtenir une participation électorale plus importante lors du scrutin de 2019, même si une meilleure participation est bien entendu souhaitée. En priorité, il s'agit de déclencher une démarche interétatique et transpartisane pour inviter les citoyens à participer à partir d'un constat partagé : le moment est venu, dans les circonstances actuelles, dans le contexte notamment du Brexit, de s'engager en Europe. Profitons de la vague pour mettre en place et déployer les conventions démocratiques.