Intervention de Corinne le Quéré

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 9h30
Commission des affaires économiques

Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat :

Le HCC préconise au Gouvernement d'assortir ses mesures des évaluations appropriées en se référant à la stratégie nationale bas carbone. L'analyse du HCC ne doit pas remplacer l'évaluation que le Gouvernement doit mettre en place pour piloter sa stratégie. Ce pilotage manque actuellement.

Le mix électrique en France est effectivement en grande partie décarboné par l'apport du nucléaire. Le rôle du HCC n'est pas d'évaluer le choix du Gouvernement en faveur du nucléaire ou des énergies renouvelables, mais la manière dont l'approche d'ensemble permet d'atteindre la neutralité carbone. Faute de temps et parce que les émissions diminuent dans le secteur de l'énergie, le HCC n'a pas approfondi davantage les hypothèses. Par ailleurs, de nombreuses études démontrent que la perte de la biodiversité réduit la résilience des écosystèmes.

Le HCC prépare actuellement un rapport sur la rénovation énergétique des bâtiments, intégrant une comparaison avec les autres pays. Investir massivement dans ce secteur pourvoyeur d'emplois soutiendrait à la fois l'emploi et la stratégie bas carbone. Pour comprendre pour quelles raisons les objectifs n'ont pas été atteints, il conviendrait d'étudier les obstacles, notamment la formation et la cohésion des artisans. Des investissements dans l'approvisionnement et la filière forestière sont nécessaires. Il paraît effectivement essentiel de combiner l'efficacité énergétique des bâtiments et le passage au chauffage bas carbone.

La réduction des émissions de gaz à effet de serre entraînée par la crise est de courte durée. Le plan de relance doit être un plan de transition. Les feuilles de route de chaque ministère doivent prendre en compte chacun de ces enjeux.

En sortie de crise, il est compréhensible d'encourager davantage la mobilité électrique, plus avancée et qui créerait de l'emploi, tout en investissant dans le développement de l'hydrogène.

La première stratégie consiste effectivement à capitaliser sur les bénéfices du confinement. Le télétravail, sans être envisageable pour tous les métiers, permettrait de réduire les déplacements et les émissions, tout en risquant effectivement d'entraîner un rebond des systèmes de refroidissement en été. Ce dernier aspect est important car ce moyen d'adaptation au changement climatique est coûteux en énergie. La rénovation des bâtiments doit intégrer à la fois le confort d'hiver et celui d'été.

En sortie de crise, la priorité est à la sécurisation des transports en commun. Encourager leur utilisation est important pour réduire les émissions, de même que privilégier les voitures plus petites. À terme, l'investissement dans le secteur ferroviaire est essentiel.

Jusqu'à présent, le HCC n'a pas approfondi le sujet de l'agriculture. À l'approche de la réforme de la politique agricole commune (PAC), ce sujet est important. Nous préconisons d'intégrer des mesures environnementales dans cette politique, notamment de valorisation du stockage de carbone dans les sols. Notre rapport mentionne la pression exercée sur ce secteur. Les mesures de sobriété qui permettraient de diminuer la consommation de protéines animales contribueraient à la réduire.

L'économie circulaire, qui réduit la consommation de matériaux et la pression sur l'environnement, doit être intégrée dans la transition bas-carbone.

À travers les commandes publiques, le Gouvernement peut faire preuve d'exemplarité, soutenir des filières et encourager l'évolution des mentalités. Au niveau européen, il doit soutenir des règles compatibles avec l'implication des gouvernements en faveur de la transition écologique. La commission européenne vise un objectif de neutralité carbone à horizon 2050 aligné sur celui de la France.

L'investissement dans la formation est important et implique des déplacements de filières. La rénovation des bâtiments pourrait soutenir la massification des mesures dans ce sens.

En matière de santé humaine, le respect de l'environnement présente de nombreux bénéfices et contribue à réduire la mortalité liée à la pollution de l'air. Ces avantages sont à valoriser.

Enfin, la Convention citoyenne pour le climat est pilotée par deux membres du HCC et constitue un exercice de démocratie participative intéressant. Le HCC recommande de valoriser ses propositions.

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