Intervention de Éric Woerth

Réunion du jeudi 3 septembre 2020 à 15h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, président :

Un plan de relance était nécessaire : il fallait non seulement modifier, articuler, adapter et prolonger les mesures d'urgence qui avaient été décidées, mais également accélérer la transformation dans divers domaines. Par ailleurs, des mesures durables ayant déjà été prises et des dépenses réalisées pour préserver le pouvoir d'achat, il fallait, comme vous l'avez indiqué, mettre l'accent sur la compétitivité ; je pense notamment à la baisse des impôts de production.

Mes questions portent sur d'autres aspects. Bien que j'appartienne à l'opposition, je n'adopte pas là une approche politique : à titre personnel – je ne parle au nom du groupe Les Républicains, puisque nous n'avons pas encore eu d'échanges sur ce sujet –, je voterai le plan de relance.

Celui-ci consiste essentiellement en des dépenses publiques. Le Président de la République, le Premier ministre et vous-même mettez les chiffres en avant. Or il s'agit non pas de rivaliser avec les autres pays pour présenter le plan de relance le plus important, mais plutôt de déterminer si celui-ci sera efficace et durable. Les chiffres varient d'ailleurs sensiblement. Le Président de la République parle ainsi de 460 milliards, en tenant compte des prêts garantis par l'État (PGE). Par ailleurs, les 100 milliards comprennent des sommes qui seront réellement décaissées et d'autres qui ne le seront pas.

Certes, vous consentez un effort important, mais il comporte beaucoup de recyclage et porte sur de la dépense publique ; il faut donc être très vigilant.

Premièrement, comment dépenserez-vous ? Vous indiquez que vous appliquerez des méthodes efficaces de suivi. Ce qui compte, en effet, ce n'est pas seulement le volume budgétaire du plan, c'est aussi sa vitesse d'exécution. Aussi, avez-vous, comme on a pu le lire, défini, pour les principaux types de dépenses, un rythme d'exécution qui vous semblerait efficace ?

Par ailleurs, je mets en garde contre les effets de la conditionnalité. On ne dit pas à un malade qu'il sera sauvé s'il remplit certaines conditions : on cherche d'abord à le sauver, avant de poser des conditions. Je souhaiterais donc que vous précisiez à quel niveau vous comptez placer la conditionnalité.

Deuxièmement, on peut se demander si le plan de relance n'est pas un prétexte pour éviter toute réforme. Comment marierez-vous son exécution et la suite des réformes ? La meilleure des relances est naturellement la réforme structurelle de notre pays.

Troisièmement, disposons-nous encore de marges de manœuvre, dans l'hypothèse d'un rebond de l'épidémie ou d'une crise d'un autre type, ou avons-nous tiré toutes nos cartouches ?

Enfin, vous ne dites rien sur le financement du plan. Sur ce point, les réponses du Gouvernement paraissent courtes. Peut-on s'endetter sans limite ? Certes, les taux sont très faibles et il est probable qu'ils le restent durablement, mais cette durabilité elle-même est relative. Avait-on besoin de réhabiliter à ce point la dépense publique ? Après avoir été considérée comme une contrainte absolue, et comme devant être contingentée, elle devient aujourd'hui une forme de vertu. Comment la conciliez-vous avec une action plus profonde de réforme de notre pays ?

Nous pourrons approfondir ces questions lors d'auditions ultérieures et de l'examen du projet de loi de finances.

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