Je suis moi aussi défavorable à ces amendements.
Madame la ministre Batho, je crois que si nos pensées n'arrivent pas à se rejoindre, c'est parce que vous raisonnez à partir des débouchés de la filière – vous dites en substance que, les pertes étant peu importantes, on ne manquera pas de sucre. Ce que je vous demande, c'est de vous mettre à la place d'un agriculteur : que feriez-vous à la place d'un agriculteur ? Aujourd'hui, notre droit ne nous permet pas d'imposer à un agriculteur de semer de la betterave – et je crois que c'est une très bonne chose. Or la monoculture betteravière, qui existait il y a encore vingtaine d'années, a disparu : les agriculteurs qui cultivent de la betterave n'y consacrent que 15 à 20 % de leur exploitation. Ils ont donc la liberté du choix. Ce n'est pas du libéralisme : c'est la liberté de choisir ce qu'ils veulent planter.
Or nous devons nous assurer que les agriculteurs vont bien planter de la betterave cette année car s'ils ne le font pas, ce sont nos sucreries qui fermeront l'année prochaine, et vous pourrez dire adieu à toute la filière de la betterave. Je vous le répète : mettez-vous à la place d'un agriculteur, au lieu de multiplier les injonctions.
Plusieurs d'entre vous ont soulevé la question de la compensation financière. Nous avons déjà beaucoup réfléchi à cette question et je suis prêt à continuer à le faire, mais il y a plusieurs difficultés. D'abord, le FMSE est financé à 65 % par l'État et à 35 % par les agriculteurs eux-mêmes. Ensuite, les betteraviers ne cotisent pas à ce fonds. Enfin, la maladie de la jaunisse n'est pas éligible à ce fonds. Il faudrait donc modifier les règles à Bruxelles, ce qui est compliqué et ne pourra pas se faire cette année.
Il existe une autre difficulté, que M. Jean-Baptiste Moreau a bien expliquée. Cette année, il existe un gradient très fort de la maladie du Sud vers le Nord. L'année dernière, il était moins prononcé et il allait de l'Est vers l'Ouest. Autrement dit, l'état de la science ne permet de prévoir ni le lieu ni l'époque où ces pucerons attaquent. Si je suis bien votre raisonnement, monsieur Potier, vous dites que si 35 % des pertes sont à la charge de l'agriculteur, mais que ces pertes ne représentent que 20 % de sa production, alors il n'a en réalité que 5 % de pertes. Le problème, c'est que certains d'entre eux peuvent avoir 50 % de pertes. À vous, je ne vais pas demander de vous mettre à la place d'un agriculteur … Nous avons vraiment essayé de trouver une solution, mais je crois qu'il n'y en a pas.