Nous avons tous vu, mardi dernier, les images terribles d'un élevage de lapins en cage dans le Morbihan, diffusées par l'association L.214, et, il y a quelques semaines, celles d'un autre élevage, de poulets cette fois. Personne ne peut y être insensible ; elles imposent une réelle prise de conscience.
Tous les députés ici présents condamnent de telles conditions d'élevage et souhaitent un encadrement plus strict. Mais il importe de rappeler haut et fort que l'agriculture et l'élevage français, ce n'est pas cela. Ces situations marginales ne doivent pas cacher la réalité : les producteurs, les éleveurs français respectent et aiment leurs bêtes. Ne laissons pas croire que ces images terribles représentent l'ensemble des élevages en France, car tel n'est pas le cas. Signaler, condamner et encadrer, oui ; stigmatiser la majorité des éleveurs, non !
La question du bien-être animal a, il est vrai, été trop longtemps ignorée. Or elle est une importante préoccupation des Français. En tant qu'élus de la Nation, représentants du peuple, nous devons retranscrire sa volonté. Mais nous devons le faire sans recourir à des solutions ou à des arguments simplistes qui peuvent porter préjudice ou stigmatiser, par exemple, les éleveurs.
Ces sujets touchent, en définitive, à l'intime, car ils relèvent de positions philosophiques personnelles. Certaines de vos propositions ne peuvent que recueillir une large approbation ; d'autres laissent sceptiques et semblent très simplistes. De fait, certains problèmes ne peuvent pas être résolus par un oui ou un non ; leur complexité impose une longue discussion qui permette d'envisager les conséquences des mesures proposées.
On pourrait souhaiter un meilleur encadrement et des mesures d'accompagnement plus étoffées. Ainsi, vous proposez, à l'article 1er, un fonds de soutien à la transition pour le bien-être animal, mais aucune piste de financement n'est esquissée. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce point ? Vous renvoyez à un décret, mais vous devez bien avoir une idée…
À titre personnel, je voterai sans difficulté en faveur de la sortie programmée de captivité des animaux des cirques itinérants. Certes, il faut accompagner les filières, aménager une transition et indemniser les professionnels, tout en s'assurant du bon suivi des animaux concernés. Toutefois, j'appelle votre attention sur la nécessité de préserver les parcs zoologiques : les conditions de vie et d'élevage des animaux y sont extrêmement encadrées et leur vocation pédagogique et de préservation des espèces ne doit pas être sous-estimée. Je n'aurai pas non plus, à titre personnel, de difficultés à voter pour la sortie progressive de l'élevage et de l'abattage d'animaux élevés pour leur fourrure.
En revanche, votre article 5 n'est pas satisfaisant. La prise en compte du bien-être animal est une priorité pour l'ensemble des acteurs des filières animales, que vous devriez mieux connaître. Les aspects normatifs et réglementaires mais aussi la conscience collective des éleveurs les ont incités, au cours des dernières décennies, à améliorer sans cesse le confort et l'ambiance dans les bâtiments d'élevage. Encore une fois, l'existence d'une brebis galeuse ne doit pas vous amener à abattre le cheptel des éleveurs ! Les acteurs se sont engagés dans des plans de filière rigoureux qui prévoient un taux de 50 % de poules et de 25 % de lapins élevés en élevage alternatif d'ici à 2022 – objectif qui est d'ores et déjà atteint –, le développement des filières d'agriculture biologique et la révision du cahier des charges « Viande bovine label rouge », avec des garanties.
Votre proposition de loi est approximative dans la mesure où elle ne tient pas compte des spécificités des filières d'élevage et des besoins des différentes espèces animales ; je pense, par exemple, au risque de propagation de virus ou de maladies. Vous voulez interdire les boxes pour chevaux, mais vous auriez été bien inspiré de vous en prendre sévèrement aux auteurs des mutilations dont les équins ont été victimes ces dernières semaines. Vous passez sous silence tous les efforts financiers et logistiques que les filières d'élevage ont consentis ces dernières années, l'impact sur l'accès à l'alimentation que cela peut avoir sur la population alors que plus d'un Français sur dix saute un repas chaque jour, faute de moyens.
De bonnes intentions, d'un côté, un soupçon de communication, de l'autre : en l'état, cette proposition de loi est encore imparfaite.