Intervention de Bruno Bonnell

Réunion du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Bonnell, secrétaire général pour l'investissement, chargé de France 2030 :

Mesdames et messieurs les députés et anciens collègues, n'occupant mes fonctions que depuis trois semaines, vous comprendrez que, si des questions très précises m'étaient posées, je confierais à Mme Géraldine Leveau ici présente, secrétaire générale adjointe, le soin d'y répondre.

Le plan France 2030 et le SGPI sont certes médiatisés, mais les objectifs poursuivis et les fondamentaux de notre action sont parfois mal compris. C'est pourquoi il m'apparaît essentiel de vous apporter des précisions.

France 2030 s'inscrit dans la continuité du plan de soutien et du plan de relance, mais il est en totale rupture avec le concept de guichet. Sa création a été annoncée par le Président de la République dans un discours d'octobre 2021, à l'occasion duquel il a énoncé dix objectifs fondamentaux, organisés autour de trois axes : mieux produire, mieux vivre et mieux comprendre. S'agissant du premier axe, il s'agit de faire émerger de petits réacteurs nucléaires modulaires, dits « SMR », de faire de la France le leader de l'hydrogène vert, de décarboner notre industrie, en visant une réduction de nos émissions de gaz à effet de serre de 35 % d'ici à 2030, de produire plus de 2 millions de voitures électriques et hybrides d'ici à 2030 et de fabriquer le premier avion bas carbone. Concernant le deuxième axe, les objectifs sont d'investir dans une alimentation saine, durable et traçable, de produire vingt biomédicaments – notamment contre les cancers et les maladies chroniques – et de créer les dispositifs médicaux de demain, ainsi que de placer la France en tête de la production de contenus culturels et créatifs. Pour ce qui est de mieux comprendre, nous poursuivons deux objectifs à plus long terme : investir dans la nouvelle aventure spatiale et dans le champ des fonds marins de grande profondeur.

Le plan est organisé très concrètement autour de ces objectifs, et couvre l'intégralité des domaines concernés, de la recherche fondamentale à l'industrialisation. C'est une nouveauté par rapport aux programmes d'investissements d'avenir, qui ne comportaient pas le volet de l'industrialisation, de la fabrication en masse de produits. Cela aura un impact sur l'économie en ce qui concerne les exportations et la balance extérieure, mais aussi sur ce qui est produit par l'État à partir des supports dont il dispose.

Le plan comporte une catégorie de crédits particuliers, évalués à 5 milliards d'euros, que nous appelons la « poche de rupture ». Il s'agit de fonds alloués à la prise de risques et, le cas échéant, à l'échec. Compte tenu de l'incertitude qui règne dans le monde de l'innovation, on doit accepter en effet qu'un certain nombre de programmes n'aillent pas jusqu'au bout. C'est pourquoi les projets feront non seulement l'objet d'une évaluation préalable et d'un bilan a posteriori, mais également d'une évaluation constante au cours de leur développement, ce qui nous permettra de déterminer si nous continuons à les soutenir. Si certains choix technologiques, certaines options ne nous paraissent plus valables, nous réallouerons les crédits qui leur restaient à d'autres programmes.

Le secrétariat général pour l'investissement est né il y a une dizaine d'années, avec les programmes d'investissements d'avenir. Il a mêlé depuis l'origine, de manière assez efficace, l'appel à manifestation d'intérêt, qui s'adresse, pour un domaine particulier, aux acteurs de la recherche, de l'industrie ou de la sphère institutionnelle, et l'appel à projets, beaucoup plus concret, assorti de financements parfois élevés – Agnès Pannier-Runacher a annoncé récemment un appel à projets concernant l'innovation dans le dispositif médical, financé à hauteur de 400 millions d'euros.

Ce sont la Banque publique d'investissement (Bpifrance), l'Agence de la transition écologique, l'Agence nationale de la recherche et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui jouent le rôle d'interface avec les entités candidates au soutien de l'État. Depuis l'origine, il y a donc à la fois une coordination, un pilotage global des PIA, et une délégation aux opérateurs. La nuance que nous apportons, c'est que la délégation s'accompagne de la fixation d'objectifs beaucoup plus précis, et que l'action de l'État bénéficie d'une plus grande visibilité – il ne faut pas perdre de vue que derrière l'action des opérateurs se cache le volontarisme de l'État.

France 2030 fait prendre un véritable virage à la politique publique. À chaque fois que, dans notre histoire, est survenue une grande rupture technologique ou énergétique – et le développement de l'électrification constitue aujourd'hui, sans conteste, une rupture énergétique – l'intervention de l'État a été déterminante dans au moins un des trois domaines suivants. Le premier d'entre eux est le « dérisquage » des investissements privés dans la nouvelle technologie ; cela fait partie des missions du SGPI, qui l'exerce par le biais de subventions, de prêts, quelle que soit leur forme, ou éventuellement de fonds propres. Le deuxième est la réflexion sur les impacts de la rupture technologique sur la commande publique et la manière d'accélérer l'intervention de l'État ; nous réfléchissons, pour notre part, aux méthodologies que nous pourrions appliquer. Le troisième domaine est l'encouragement à la prise de risque, pour retrouver des avantages concurrentiels. Face à la problématique récente des vaccins, on a ainsi encouragé tout un secteur à s'engager dans la direction des biomédicaments.

Plutôt que de plan, je parlerais, à propos de France 2030, d'un ensemble de projets, soutenus avec bienveillance et beaucoup de moyens par l'État. Nous voulons voir fleurir les initiatives, plutôt que donner des directives trop rigides du haut vers le bas.

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