Madame Lebec, vous m'avez interrogé sur la gouvernance du SGPI. Le Président de la République lui-même a voulu que nous fonctionnions « en mode commando ». J'ai pris quelques premières mesures visant notamment à resserrer le comité de direction, éviter un organigramme en râteau et bien distinguer ce qui relève de l'héritage de ce qui correspond à nos objectifs. Il est peut-être un peu tôt pour que je vous présente la future gouvernance de façon plus formelle, mais je pense que nous allons gagner en réactivité.
Le sujet de la commande publique et de nos relations avec les grands groupes dépasse quelque peu le périmètre du SGPI. Nous serons probablement amenés à y réfléchir pour l'avenir, non pas dans un esprit de protectionnisme, mais dans un souci de positionnement. À d'autres moments de ma carrière, j'ai travaillé sur la formation des acheteurs : si on évalue uniquement la performance d'un acheteur en fonction des économies qu'il aura permises à court terme, on favorise des achats qui ne seront pas forcément idéaux, ni en termes écologiques, ni en termes de soutien à l'innovation française. Nous avons des solutions techniques à proposer pour que nos achats publics favorisent à la fois l'innovation de l'offre et l'innovation de la demande. Mais nous ne sommes pas les seuls acteurs concernés : la réflexion doit donc être collective.
Monsieur Jerretie, vous m'avez interrogé sur l'articulation entre le comité de surveillance et le secrétaire général. Le SGPI n'est pas une entreprise privée : le comité de surveillance, composé pour moitié de personnalités qualifiées, pour moitié de parlementaires – le rapporteur général de la commission des finances, Laurent Saint-Martin, en fait partie – joue donc plutôt un rôle de guide stratégique. Il ne lui revient pas de donner des autorisations mais d'encadrer, de commenter, d'aiguiller et de faire un point régulier sur l'action du secrétaire général, avec qui il travaille en bonne intelligence. Il me semble intéressant d'entendre ces conseils éclairés émanant de personnes de qualité pour, le cas échéant, corriger le tir.
Plusieurs rapports ont déjà été consacrés à l'évaluation des PIA. Je n'y reviendrai pas car cela impliquerait de longs développements. Mais nous avons bien pris conscience de la difficulté à réallouer les financements ; c'est pourquoi j'ai évoqué tout à l'heure l'analyse en ligne de la performance des projets et la faculté d'accepter l'échec.
Quant à la sous-traitance, elle fait partie de la chaîne de l'innovation, et donc de notre champ d'intervention. Il faut bien distinguer l'innovation de l'invention : l'invention est une offre nouvelle – le fil à couper le beurre – faite à un marché, qui peut l'accepter ou non ; l'innovation est toujours une réponse à une demande sociétale spécifique. Ainsi, l'optimisation d'un process industriel est une innovation, dans la mesure où elle répond à des besoins de précision, de rapidité ou de qualité. La sous-traitance peut donc tout à fait proposer des innovations – des machines plus performantes, des améliorations de la chaîne de transfert, des nouveautés dans le domaine de la robotique – qui méritent d'être soutenues.
Madame Magnier, vous m'avez interrogé sur les freins réglementaires. De nombreux acteurs m'ont déjà dit que leur problème n'était pas l'argent mais la norme. Je ne suis que secrétaire général pour l'investissement, mais je m'engage à vous faire remonter ces difficultés, qu'il vous incombera peut-être de résoudre dans l'hémicycle. Quoi qu'il en soit, nous devons tous prendre conscience qu'une énergie est en train de se développer, en France, en matière d'innovation, qui risque d'être freinée par un certain nombre de normes. Certaines sont intelligentes, notamment lorsqu'elles concernent la sécurité, mais d'autres mériteraient sans doute d'être revues, par exemple si elles résultent de la surtransposition de directives européennes.
J'en arrive à la question du deus ex machina, cher François Ruffin ! Je suis très fier d'avoir fait ce film Debout les femmes ! avec toi, tu le sais. Mais, nous nous en sommes déjà expliqués : pour ma part, je suis intimement persuadé que la solution consiste à fournir du travail à tout le monde. Pour que ces personnes retrouvent de la dignité et améliorent leur qualité de vie, nous devons leur apporter de la croissance – je sais bien que nous ne sommes pas d'accord là-dessus – qui donnera à leur travail une raison d'être. Je ne peux pas me renier, j'ai écrit un livre intitulé Viva la Robolution, mais je l'ai conclu en affirmant que cette révolution ne devrait pas servir d'excuse pour justifier un manque d'attention portée aux autres. Je fais le pari que ces investissements dans le progrès et le partage de la valeur gagnée libéreront du temps d'attention et des moyens, ce qui permettra à nos concitoyens de vivre plus dignement. C'est parfaitement cohérent, et mon combat n'a pas duré que le temps d'un film. À la tête du SGPI, je traite les choses différemment, mais toujours en croyant que les progrès réalisés généreront de la valeur qui pourra être partagée.