Intervention de Olivia Gregoire

Réunion du jeudi 23 janvier 2020 à 9h35
Mission d'information sur l'évaluation de la concrétisation des lois

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivia Gregoire :

Mes propos paraîtront peut-être redondants par rapport à ceux de Cendra Motin, mais ce n'est pas grave… Sans la moindre volonté de faire de la provocation, je me demande quant à moi, à l'inverse, si, en matière d'évaluation – je rapproche volontairement évaluation et concrétisation, même si j'approuve tout à fait le distinguo que vous avez fait –, le mieux n'est pas l'ennemi du bien : n'aurions-nous pas trop d'organes d'évaluation, dont certains parfois convergents, voire empiètent les uns sur les autres ?

Prenons l'exemple de la merveilleuse loi PACTE, pour laquelle j'ai une tendresse particulière et à laquelle M. Bolo a lui aussi largement contribué. Nous y avons introduit, par voie d'amendement, un dispositif d'évaluation relativement lourd ; autrement dit, la loi que nous avons votée, passant outre certaines réserves du Sénat, comprend une évaluation intégrée. Parallèlement, une mission d'évaluation est menée par France Stratégie, agence dépendant du Premier ministre, qui fait travailler à la fois des parlementaires et – il me semble important d'avoir cet élément en tête – des syndicats et des personnalités de la société civile. Ajoutez à tout cela les travaux cette mission d'information, où des parlementaires examinent certains aspects de la loi PACTE pour voir si la concrétisation est à la hauteur de l'ambition. Au final, pour cette seule loi, pas moins de trois évaluations sont en cours, et qui ne portent pas forcément sur la même échelle de temps. Sans oublier le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), qui ne manquera pas, à un moment ou un autre, de s'intéresser lui aussi au déploiement de la loi PACTE, ce qui nous en fait une quatrième… L'ambition est évidemment louable, mais ne ferions-nous pas mieux de rationaliser l'évaluation en la confiant à un seul organe plutôt que de chercher à l'intégrer un peu partout ?

Allons maintenant beaucoup plus en aval, au moment où la loi, promulguée et assortie de ses décrets d'application, arrive à celui que j'appellerai le destinataire final, autrement dit au citoyen. Ma question va un peu dans le sens de ce qu'a rappelé M. Bolo : alors que notre époque est marquée par la défiance envers la politique, ne pourrait-on songer, pour les années qui viennent, à permettre aux parties directement concernées par nos textes, autrement dit à ceux pour qui ils ont été originellement imaginés et votés – ainsi les entrepreneurs, notamment les patrons de TPE-PME, dans le cas de la loi PACTE –, de participer à ce travail sur la concrétisation de la loi, par le biais d'un outil technologique adapté, une plate-forme en ligne par exemple ? En tant que parlementaire et, accessoirement, citoyenne, je trouverais cela plutôt malin.

Ma dernière question est liée à la précédente. Personnellement, ce qui m'obsède dans l'évaluation et de la concrétisation de la loi, c'est la manière dont il est possible de la faire évoluer si certaines dispositions s'avèrent inadaptées ou méritent d'être élargies, revues, corrigées. Je vois quel peut être le parcours de l'évaluation et de la concrétisation, mais comment faire remonter les évolutions nécessaires au niveau de la loi, faire bouger certaines lignes, reprendre les dispositifs inadéquats, sinon en adoptant une nouvelle loi – une loi PACTE 2, par exemple – au risque de contribuer à l'inflation législative ?

Cette démarche par itération en fin de circuit, en association avec les parties prenantes et les destinataires de la loi, n'a évidemment d'autre but que de l'améliorer, et non de se gargariser en disant que l'évaluation est parfaite, que la loi est merveilleuse, que nous sommes fantastiques… Vérifier si la loi répond aux problèmes des citoyens, telle est bien la finalité de la concrétisation, vous l'avez dit, monsieur le ministre. Je vois à peu près comment nous pouvons atteindre les citoyens : ils sont souvent intelligents et, en ce qui concerne l'application, ne manquent pas d'idées qui peuvent être reprises via des mesures réglementaires, mais parfois aussi dans la loi. Encore faut-il faire revenir la balle, et c'est beaucoup plus difficile. Depuis deux ans et demi que je suis ici, je n'ai toujours pas compris comment y parvenir – mais je manque peut-être de sagacité.

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