Je salue la tenue et les modalités de fonctionnement du groupe de travail, qui ont permis, selon une démarche d'écoute, à tous les groupes d'opposition d'aboutir à un consensus sur le rapport présenté.
Sur le fond, face à la crise sanitaire et à d'autres crises qui pourraient advenir, nous sommes d'accord : il n'est pas souhaitable d'institutionnaliser un mode de gestion de crise relevant d'une gouvernance et d'un corps de règles spécifiques, car le Parlement a déjà été suffisamment affaibli. Bien entendu, il doit s'adapter en temps de crise, mais il ne faut pas créer un organe de gestion de crise qui reviendrait à le déposséder.
Nous saluons donc le refus transpartisan de la création d'un état d'urgence parlementaire. Celui-ci poserait d'ailleurs de nombreuses questions constitutionnelles, sur le fond comme sur la forme. Le Parlement ne peut pas être un organe réduit en temps de crise. Au contraire, il doit donner l'exemple.
Le rapport revient sur les mesures à prendre, mentionne les difficultés pratiques des parlementaires à assumer leurs missions en temps de crise, détaille la logistique de gestion de la crise sanitaire – accès à des véhicules, matériel sécurisé pour se réunir à distance, etc. Nous saluons cet effort. Il faudra mettre ces propositions en œuvre le plus rapidement possible.
Nous sommes également satisfaits que le rapport sanctuarise l'Assemblée nationale comme lieu de délibération et exclue de se pencher sur l'hypothèse d'une impossibilité complète de réunion des parlementaires – qui tomberait de toute façon sous le coup de l'article 16 de la Constitution.
À l'inverse, s'agissant des votes sur l'ensemble d'un texte ou sur la déclaration du Gouvernement en application de l'article 50-1 de la Constitution, nous sommes en désaccord avec les préconisations du rapport à l'égard du vote à distance. Il ne faut pas faire primer la gestion de crise sur la démocratie. Cela introduit en outre l'idée que la réunion des parlementaires n'est pas une condition formelle de la démocratie. Or nous pensons qu'elle l'est.
Enfin, le rapport propose de renforcer une boîte à outils en temps de crise par différentes dispositions. Nous saluons ainsi la création de binômes majorité-opposition dans chaque commission, même s'il faudra être vigilants quant à la constitution de ces binômes – il ne faudrait pas qu'elle favorise les deux principaux groupes parlementaires.
Plusieurs dispositions sont positives, même si certaines relèvent un peu du gadgets : questions écrites et contributions écrites, qui ne remplacent évidemment pas l'oral et le contradictoire, qui font la démocratie ; promotion des réunions entre les parlementaires et les préfets à l'échelon local comme lieux de co-élaboration avec les acteurs de proximité, où les parlementaires peuvent jouer un rôle – et non comme lieu d'information sur les décisions ; semaine de contrôle de l'action gouvernementale en sortie de crise. Ce dispositif, utile, ne doit pas se borner à valider un état de fait, comme nous l'avons vécu au printemps.
En conclusion, nous soulignons un travail de qualité, équilibré, qui interroge malgré tout sur la gestion de crise et les rapports de pouvoir entre institutions : rien sur le recours aux ordonnances ; rien sur les modalités de transition de l'état de crise à l'état « normal » et la reprise des rendez-vous réguliers ; rien sur le rééquilibrage du rapport entre Parlement et Gouvernement, alors que le Parlement est, trop souvent, une chambre d'enregistrement. Mais ces sujets sont connexes à celui qui nous occupe.