Intervention de Hubert Carré

Réunion du jeudi 19 avril 2018 à 14h30
Mission d'information sur le suivi des négociations liées au brexit et l'avenir des relations de l'union européenne et de la france avec le royaume-uni

Hubert Carré, directeur général du CNPMEM :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, les pêcheurs européens sont soucieux de ne pas laisser la pêche devenir une variable d'ajustement alors que le Brexit emporte des intérêts plus importants. Comme l'a indiqué mon président, nous sommes rapidement passés à l'échelon européen pour faire entendre nos intérêts. Nous avons été relativement proactifs. Nous sommes assez satisfaits du travail porté par la Commission européenne.

Il est important que notre activité soit reconnue, et qu'elle ne soit pas marginalisée. Cela impose d'intégrer le secteur de la pêche dans les enjeux globaux, sociaux et économiques de toutes les filières. Nous sommes assez satisfaits de la rédaction du projet d'accord de retrait par la Commission. Et, surtout, nous avons été assez agréablement surpris par le fait que Mme Theresa May l'ait globalement accepté et ne l'ait pas remis en cause – ce qui a déclenché quelques réactions de la part des pêcheurs britanniques, fort mécontents de la tournure des événements puisqu'ils étaient absolument persuadés que dès le lendemain du Brexit, ils pourraient pêcher à volonté dans leurs eaux et avoir la force d'éloigner les intérêts des pêcheurs étrangers.

Nous sommes dans une période de statu quo jusqu'en décembre 2020. Celui-ci permettra à la PCP telle que nous la connaissons de continuer à s'appliquer. C'est important, puisque les entreprises de pêche ont besoin de stabilité. On ne remet pas en cause en quelques mois une politique créée en 1982. Bien entendu, nous serons extrêmement vigilants sur la suite des événements. Nous souhaitons que le contenu de la déclaration politique qui sera annexée à l'accord de retrait porte un certain nombre de dispositions de nature à garantir les intérêts des pêcheurs français et européens. Là aussi, nous pouvons nous féliciter d'avoir su construire et maintenir un front commun. Ce front a peut-être permis à M. Barnier de mieux défendre nos intérêts car nous ne sommes pas arrivés en ordre dispersé.

Les principes généraux que nous souhaitons voir figurer dans le projet d'accord de libre-échange pour servir de base à la négociation d'un futur accord de texte sont les suivants. Tout d'abord, avoir un accès réciproque aux eaux et aux ressources, sans ambiguïté, c'est-à-dire l'accès à la ZEE du Royaume-Uni en intégrant la zone dite des 6 à 12 milles, qui fait l'objet d'une réglementation plus particulière. Ensuite, nous attendons un engagement clair de parties prenantes de ce futur accord en faveur d'une gestion commune s'appuyant sur la science et la gestion durable des stocks, en ne perdant pas de vue le rendement maximum durable (RMD). Bien entendu, nous souhaitons aussi une collaboration scientifique entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Les poissons n'ont pas voté pour le Brexit et ils passent alternativement d'une zone à l'autre. Il est donc important de maintenir une expertise partagée, pour éviter des ponctions trop importantes par l'une des deux parties. Les pêcheurs britanniques ont d'ailleurs largement voté en faveur du Brexit car on leur avait affirmé qu'il n'y aurait plus de PCP, qu'ils ne se verraient plus imposer ni quotas, ni TAC, ni mesures techniques, et qu'ils pourraient donc pêcher à volonté. Nous appelons également de nos vœux un engagement fort en faveur d'un instrument juridique qui établisse des liens à long terme, incluant des dispositions tel qu'un mécanisme de consultation obligatoire. Ainsi, à chaque fois qu'il y aurait une évolution – changement climatique ou autre –, il faudrait trouver un mécanisme qui permette de travailler sur le même pas de temps. Nous attendons aussi un engagement à protéger les principes de la liberté d'établissement. Vous savez que les pêcheurs britanniques non seulement ne voulaient plus de navires étrangers dans leur ZEE, mais ne souhaitaient pas non plus qu'il y ait des intérêts étrangers économiques sur leur sol via une industrie de transformation. Pourtant, la liberté d'établissement est un principe important. J'ajoute que nous attendons un engagement à négocier un accord d'investissement réciproque. Nous avons tous besoin de lisibilité économique. Enfin, s'il n'y avait pas d'accord au-delà de 2020, il faudrait qu'un mécanisme permette de prévoir un certain statu quo en faveur des pêcheurs.

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