Intervention de Dominique Langlois

Réunion du jeudi 19 avril 2018 à 14h30
Mission d'information sur le suivi des négociations liées au brexit et l'avenir des relations de l'union européenne et de la france avec le royaume-uni

Dominique Langlois, président de l'Interprofession bétail et viande (INTERBEV) :

INTERBEV représente les filières bovine, ovine, équine et caprine. Je m'en tiendrai aujourd'hui aux deux premières. Dans votre propos introductif, vous avez très bien résumé les préoccupations qui sont les nôtres. Je souhaite revenir sur quelques chiffres illustrant la situation générale des relations entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. Celui-là importe environ un tiers de sa consommation de viande bovine, soit 400 000 tonnes, dont 90 % depuis l'Europe. Son principal fournisseur est l'Irlande, qui y exporte actuellement 200 000 à 250 000 tonnes. En revanche, le Royaume-Uni exporte 100 000 tonnes de viande bovine piécée à très haute valeur ajoutée, à 90 % vers l'Union européenne – principalement vers l'Irlande, les Pays-Bas et la France. Pour la filière ovine, la situation est différente. Le Royaume-Uni réalise des exportations à forte valeur ajoutée de sa production, et des importations de viande à faible valeur, principalement congelée, destinée à sa consommation nationale. Il importe un tiers de sa consommation de viande ovine, soit 100 000 tonnes, dont 85 % d'Océanie, et en exporte cent mille tonnes, pour près de 60 % vers la France.

Pour sa part, la filière bovine française entretient peu de relations avec le Royaume-Uni, puisque les importations depuis ce pays représentent 8 000 tonnes et nos exportations n'y représentent que 5 000 tonnes, par rapport aux 1,4million de tonnes produites en France. C'est très marginal. En revanche, pour la filière ovine, nous sommes dépendants du Royaume-Uni à hauteur de 25 %, sur un total d'importation de 500 000 tonnes. Le reste vient de Nouvelle-Zélande et d'Irlande Nous importons essentiellement des carcasses, dans les périodes creuses de production nationale, à la fin de l'été et à l'automne, ce qui nous permet d'éviter d'avoir à importer de Nouvelle-Zélande et d'Australie des viandes piécées de qualité inférieure.

Pour nous les risques sont très clairs. Le premier est la question des contingents issus de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), de l'OMC et des accords bilatéraux conclus avec l'Union européenne. Les volumes ont été établis à vingt-huit. Quid de leur répartition à vingt-sept, demain ? Pour la filière ovine, ils représentent 97 000 des 176 000 tonnes importées en Europe, et en viande bovine un peu plus de 40 000 tonnes hors préparations de viande. Une question très importante vient d'être soulevée par mon collègue des vins, celle de l'évolution des relations entre le Royaume-Uni et l'Irlande, la seconde étant un exportateur très important vers le premier. Pour la filière ovine, le risque existe de voir se réduire la disponibilité de la production, donc des approvisionnements sur le territoire français, avec pour conséquence la une baisse de consommation – la production et la consommation de viande ovine étant déjà en régression. Vous avez également évoqué le risque indirect de voir le Royaume-Uni devenir un hub d'importation et de réexportation. D'où l'importance d'établir des règles strictes d'origine – né, élevé, abattu et transformé – et de mettre en place de contingents sur la base des volumes historiques.

Nous avons résumé notre position en cinq points. Premièrement, nous demandons le classement des viandes bovines et ovines comme produits sensibles dans le cadre des négociations à venir. C'est un point très important. Deuxièmement, nous souhaitons que soient déconsolidés les volumes issus des contingents historiques : GATT, OMC et accords bilatéraux. Nous ne pouvons pas faire l'impasse sur cette analyse et la suite qui y sera donnée. Troisièmement, nous voulons assurer les volumes. Il s'agit de faire en sorte que l'Irlande continue à être l'exportateur le plus important vers le Royaume-Uni. Car il est très clair que si elle perdait tout ou partie de ce marché, son pays cible deviendrait la France, sachant que la qualité de ses productions correspond à nos standards nationaux. Quatrièmement, nous entendons que soient fixées des règles d'origine très strictes et étendues, avec un étiquetage du « né, élevé, abattu, transformé », à la fois pour faciliter l'identification par le consommateur et pour éviter l'effet de swap que vous avez évoqué. Cinquièmement, nous souhaitons que soient respectées les règles sanitaires de production et d'utilisation de substances interdites en Europe, qui seraient potentiellement rendues possibles par l'importation par le Royaume-Uni de viandes en provenance de pays qui ne respectent pas les règles européennes.

Pour la filière ovine, la préoccupation est de taille. Pour la filière bovine, elle est peut-être moindre, mais il existe un risque majeur de voir s'y étendre ce qui se produira pour la viande ovine.

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